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Elections professionnelles : l’heure de vérité

Entreprise & Carrières, 07/10/2008 | Accord | publié le : 08.10.2008 |

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Applicable depuis le 20 août, la réforme de la démocratie sociale modifie l’architecture des relations sociales. Entreprise & Carrières revient sur les principaux points de cette loi, qui fait des élections professionnelles un moment charnière de la vie sociale des entreprises, et l’objet de toutes les attentions de la part des DRH.

De la circonspection mêlée d’un brin d’appréhension. Tel est le sentiment dominant des entreprises lorsqu’elles évoquent la loi du 20 août 2008, “portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail”. Pas de panique donc, face à cette loi qui est pourtant une révolution copernicienne, celle souhaitée – du moins s’agissant des dispositions sur la démocratie sociale – par les signataires de la “position commune” du 10 avril 2008 : la CGT, la CFDT, le Medef et la CGPME. Pas de panique, car le déploiement de la loi est suffisamment progressif pour que les entreprises aient le temps de s’y préparer : les dispositions sur la représentativité syndicale ne s’appliqueront qu’à l’issue des prochaines élections professionnelles. Ainsi, celles que nous avons interrogées seront concernées entre aujourd’hui et 2012.

 

Le temps de la réflexion

Si certains établissements de Sanofi Aventis votent conformément aux nouvelles règles dès cette année, l’Afpa ne le fera qu’à partir du printemps 2009, la Société des 3 Vallées en 2010, et Aéroports de Paris en 2011 (lire p. 31 à 35). Ce qui ne les empêche pas de réfléchir à la réforme. Le top départ est la date de la première réunion de négociation du protocole d’accord préélectoral. Si elle s’est déroulée après le 21 août 2008, les élections professionnelles suivantes sont soumises à la réforme.
Pas de panique, mais tout de même de l’appréhension devant une loi qui modifie très profondément le système social de l’entreprise. En remplaçant la représentativité irréfragable par une représentativité prouvée, fondée principalement sur l’audience, le législateur a fait des élections professionnelles un moment fondateur des relations sociales.

 

Eviter toute contestation

Leur bon déroulement incombe aux DRH. Tous soulignent qu’il est fondamental que les élections et leurs résultats ne souffrent pas de contestations. C’est pourquoi la première partie de cette enquête s’efforce de décrire dans le détail l’organisation des élections professionnelles conformément aux nouvelles règles. Stéphanie Stein, avocate au sein du cabinet Eversheds et membre de l’association Avosial, apporte un éclairage juridique.

 

Perte de contrôle

La principale cause d’appréhension des directions est de « perdre le contrôle de leur système social », relève Thierry Heurteaux, associé au cabinet de conseil en relations sociales Pactes Conseil (lire entretien p. 35). Le paysage syndical de l’entreprise dépend maintenant du vote des salariés. Ces derniers viennent d’acquérir un pouvoir dont il leur reste encore à prendre conscience. Les directions n’ont pas attendu ce moment pour craindre de voir disparaître des syndicats – faute d’avoir réuni 10 % des suffrages aux élections professionnelles –, qui étaient leurs interlocuteurs traditionnels ou d’en voir apparaître d’autres.

 

Des validations plus exigeantes

Ainsi, à l’Afpa, le risque de disparition de certains syndicats compromet des majorités sur lesquelles la direction s’appuie pour valider des accords. Or, dès le 1er janvier 2009, la validation d’un accord devient plus exigeante, car subordonnée à sa signature par des syndicats représentant 30 % des suffrages. Cette condition s’ajoute à l’absence d’opposition de syndicats majoritaires. L’objectif du législateur étant de renforcer la légitimité de l’accord d’entreprise en vue de lui donner davantage d’autonomie. Ce principe est illico mis en application dans la partie “temps de travail” de la loi.

 

Rétablir une forme de justice

Chez Sanofi Aventis, la direction éprouve également quelques craintes sur le déroulement futur des négociations. Mais, dans cette entreprise qui ne compte pas moins de dix syndicats, son sentiment dominant est que la réforme rétablit une forme de justice entre organisations syndicales.

A contrario, d’autres entreprises peuvent craindre l’arrivée de nouveaux syndicats qu’elles ne souhaitaient pas, plus radicaux et moins facilement contrôlables. D’autant que la loi facilite l’implantation des syndicats. Thierry Heurteaux décrit le contexte qui favorise cette émergence.

 

Prouver sa représentativité

Du côté des syndicats, la première urgence est de prouver leur représentativité. Tous n’y parviendront pas. Des délégués syndicaux vont perdre leur mandat et vont devoir songer à un retour à l’opérationnel. Une question qui préoccupe au premier chef les délégués eux-mêmes, mais aussi les fédérations et les unions locales, dont certaines fonctionnent grâce aux heures de délégation octroyées à ces salariés. Enfin, l’entreprise elle-même, qui va devoir réintégrer des personnels dont certains n’ont plus exercé leur métier depuis longtemps. Pour l’heure, la réforme de la démocratie sociale est un vaste chantier de questions.

 

Emmanuel Franck