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Pierre Courbebaisse, président de la FFP : « Moins de 20 euros de l’heure, c’est regrettable »

Le point sur | publié le : 08.10.2018 | Benjamin d’Alguerre

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Pierre Courbebaisse, président de la FFP : « Moins de 20 euros de l’heure, c’est regrettable »

Crédit photo Benjamin d’Alguerre

La tarification horaire à 14,28 euros préoccupe les professionnels de la formation. Le président de la FFP, Pierre Courbebaisse, estime que ce montant est insuffisant au vu des enjeux, même s’il ne s’agit pas du seul point de vigilance du secteur sur la réforme.

La ministre du Travail a évoqué l’idée d’une monétisation du CPF à 14,28 euros de l’heure. Le tarif est-il raisonnable, selon vous ?

Le niveau de monétisation du CPF est l’une de nos inquiétudes, mais ce n’est pas la seule. L’application mobile qui doit garantir l’accessibilité du compte aux individus, les conditions d’achat de formation par les potentiels apprenants ou l’accompagnement des acheteurs constituent d’autres points de vigilance. Ce que nous souhaitons, c’est trouver avec le gouvernement une solution partagée et équilibrée. La réforme engagée par le gouvernement va dans le bon sens. Nous ne la critiquons pas. Mais nous restons vigilants quant à sa mise en œuvre.

N’empêche que certains parlent de quasi-bénévolat pour ce tarif…

Quand même pas… mais ça reste tout de même très bas. La FFP soutenait la monétisation du CPF sur une base de 500 euros par an pour remplacer les 24 heures annuelles nées de la précédente réforme, mais pas à ce montant-là. En moyenne, nous estimons le prix de l’heure de formation à 20 ou 21 euros, sans compter la prise en charge des rémunérations des stagiaires. Si on veut vraiment travailler sur la montée en compétences des actifs, on peut difficilement faire moins. Nous regrettons que le ministère du Travail ait choisi une tarification horaire inférieure à 20 euros de l’heure qui risque de rendre certaines formations inaccessibles au CPF : à savoir celles qui exigent la présence de plateaux techniques, liées au numérique ou qui demandent de l’accompagnement pour les stagiaires comme le blended-learning. De même, certaines habilitations obligatoires et autres permis (CACES…) risquent d’être trop chères pour se voir financées par un CPF à 14,28 euros. Il n’existe pas de modèle type de formation. Nous ne sommes pas sur la même configuration que dans la formation initiale où la massification permet de déterminer un coût horaire assez conforme à la réalité. Une formation peut être plus ou moins coûteuse selon les territoires, par exemple. Peut-être aurait-il mieux valu évoquer d’abord les possibilités d’abondements ou de cofinancements du CPF avant d’annoncer un montant horaire.

Redoutez-vous une zone de turbulence lors de l’entrée en application de la réforme comme ce fut le cas en 2015 ?

La période de transition qui s’annonce entre le CPF calculé en heures et celui libellé en euros est évidemment au centre de toutes nos préoccupations. Si on la rate, on risque de perdre la moitié de notre appareil de formation et il faudra des années pour le reconstituer. Et pendant ce temps, les compétences des actifs ne se développeront pas. Que ce soit pour le CPF « normal » ou pour celui de transition qui remplacera le CIF (congé individuel de formation), une année blanche serait catastrophique. Sur ce plan, nous regrettons que la transition Opca-Opco n’ait pas été mieux lissée. À ce titre, il est dommage que Pro-A, qui remplace la période de professionnalisation ne soit pas assez ouverte pour être accessible à un maximum d’entreprises et de salariés. Il ne faudrait pas que les Opca disparaissent avant que les Opérateurs de compétences ne les remplacent sans qu’il n’y ait continuité de service entre les entités. Après tout, il s’agit surtout d’un mécanisme de fusion-absorption d’organismes existant déjà. À notre niveau et avec nos moyens, nous allons veiller à ce que la transition soit la plus fluide possible.

D’un côté les PME/TPE qui auront accès des fonds mutualisés des Opco ; de l’autre les grands groupes qui disposent de budgets formation et de services dédiés. Entre les deux, toutes les autres entreprises… N’auront-elles que la solution d’une coconstruction du CPF avec leurs salariés pour développer leurs compétences ?

Relativisons. Vous n’avez pas la même politique RH si vous êtes une PME de 51 salariés ou une ETI de 1 000. Mais c’est vrai que le curseur aurait pu être placé différemment pour l’accès aux fonds des Opco. J’aurais personnellement préféré qu’il le soit à 250 ou 300 salariés. 50, c’est trop bas. Mais qui sait, cela évoluera peut-être.

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre