logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Sur le terrain

Question de droit : Plateforme de réservation et VTC : requalification en relation de travail salariée

Sur le terrain | publié le : 21.01.2019 | Laurent Beljean

Une relation de travail salariée est caractérisée dès lors qu’un individu exerce une activité professionnelle sous la subordination économique d’un tiers.

En présence d’un contrat relevant d’une autre qualification selon les parties, il appartient au juge de déterminer, par la méthode dite « du faisceau d’indices », la véritable nature de la relation contractuelle. Un chauffeur VTC avait conclu avec la plateforme de réservation en ligne Uber une charte aux termes de laquelle ce dernier s’engageait à un certain nombre d’obligations. Après plusieurs mois d’activité, et sur la base d’une étude approfondie de son dossier, la plateforme décidait de désactiver son compte. L’intéressé saisissait le conseil de prud’hommes de Paris, considérant que la coupure définitive de son compte devait s’analyser en un licenciement abusif, et demandait la requalification de la relation de travail en une relation salariée. En première instance, l’intéressé était débouté de ses demandes, la juridiction prud’homale considérant que la relation qu’il avait entretenue avec la société Uber était une relation de nature commerciale. La cour d’appel de Paris par un arrêt du 10 janvier 2019, infirme cette décision. Si les magistrats ont tout d’abord rappelé que l’immatriculation du chauffeur au registre des métiers emportait une présomption simple de non-salariat, conformément aux dispositions légales, ils ont ensuite relevé que la teneur de la charte conclue et les conditions réelles d’activité du chauffeur le plaçaient dans un état de subordination. Les juges ont ainsi estimé que le chauffeur n’avait tout d’abord pas le libre choix de ses clients, de ses itinéraires et de ses tarifs, lesquels lui étaient donnés par l’application Uber à laquelle il était connecté. Le système de géolocalisation intégré permettait de s’assurer du respect des directives données. Les magistrats ont d’ailleurs relevé que la plateforme de réservation en ligne avait un pouvoir de sanction à l’encontre du chauffeur, puisque plusieurs refus de courses de l’intéressé pouvaient aboutir à sa désactivation définitive. Surtout, les juges ont estimé que le seul fait que le chauffeur pouvait choisir ses horaires d’activité n’excluait pas en soi une relation de travail subordonnée, dès lors qu’il intégrait lorsqu’il se connectait à l’application, un service organisé lui donnant des directives, contrôlant son activité et exerçant un pouvoir de sanction à son endroit. Il ne fait nul doute que l’affaire devrait être examinée par la Cour de cassation. Une confirmation de la Haute juridiction marquerait, à n’en pas douter, un arrêt brutal de ce modèle économique.

Auteur

  • Laurent Beljean