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Sur le terrain

Dialogue social : La sécurité privée bute sur la question des salaires

Sur le terrain | publié le : 18.03.2019 | Benjamin D’Alguerre

Après plusieurs années de dialogue social au point mort, les partenaires sociaux de la sécurité privée se sont engagés dans une demi-douzaine de négociations de branche. Mais les discussions butent sur la question de la hausse des salaires.

C’est à un grand dépoussiérage de leur dialogue social que procèdent les principales fédérations de la branche de la sécurité privée depuis 2018. Alors que l’agenda des négociations était resté désespérément vide une demi-douzaine d’années durant, l’Union de la sécurité privée (USP) et le Syndicat national des entreprises de sécurité privée (SNES) ont décidé de se rasseoir à la table des négociations avec les syndicats pour donner un coup de jeune au modèle social de la branche. Une initiative davantage guidée par les impératifs du business que par la philanthropie, explique Alain Bouteloux, négociateur syndical et secrétaire fédéral prévention-sécurité au sein de la FEETS FO : « Ce retour à la négociation répond à une injonction des pouvoirs publics. Les JO de Paris 2024 se profilent à l’horizon et les besoins en sécurité seront énormes. Or, dans l’état actuel des choses, la branche ne peut y répondre. »

Si le secteur emploie quelque 170 000 salariés, ses métiers attirent peu et le turn-over y est important. Selon les chiffres de l’USP, quelque 30 000 postes offerts par les entreprises de la sécurité privée ne trouveraient pas preneurs, faute de candidats. En cause : des salaires peu élevés, des horaires contraignants et, parfois, des impératifs de planning décidés, au mieux, à sept jours. Rien de très engageant à première vue, donc.

35 % des salaires inférieurs au SMIC

C’est justement cette nécessité de redonner de l’attractivité à leurs métiers qui a poussé les employeurs à reprendre langue avec les syndicats. Car, faute de dialogue social au niveau de la branche, les entreprises se sont recroquevillées sur leurs marchés, tirant les prix toujours plus bas pour en conquérir de nouveaux. « La baisse des tarifs dans le secteur et le manque de dynamisme des négociations ont entraîné une perte de marges depuis une dizaine d’années. Ce qui inquiète la profession », abonde Stéphanie Sanchez, directrice des affaires sociales de l’USP.

L’ouverture d’une négociation sur les salaires a donc été l’une des priorités de la branche. Celle-ci s’est conclue par la signature, en septembre 2018, d’un accord rehaussant légèrement les rémunérations : + 1,2 % sur les salaires, 7 euros d’indemnité par mois pour « entretien des tenues » et revalorisation de l’indemnité panier de 1,2 %. « Ces accords apportent des changements, mais ne sont pas suffisants », estime-t-on au SNEPS-CFTC, qui les a tout de même signés, tout comme la CFDT et FO. « Nous sommes bien conscients que l’augmentation n’est pas substantielle, mais c’était un signe de la volonté des employeurs de repartir sur de bonnes bases de dialogue », explique Stéphanie Sanchez. Problème : si ce coup de pouce a permis de réévaluer les rémunérations des catégories « 120 » et « 130 » – les plus basses – de la grille salariale de la sécurité privée (les portant respectivement à 1 500,30 et 1 519,90 euros brut par mois), l’accord de 2018 n’a été étendu qu’en février 2019, pour application en mars… Sauf qu’entre-temps, la revalorisation générale du Smic (+ 1,4 %) a maintenu ces rémunérations en dessous du salaire minimal. En conséquence de quoi, les organisations syndicales ont boycotté quelques mois la négociation en attendant que la partie patronale revienne avec des propositions plus ambitieuses. La brouille a fini par se terminer mi-février, mais sans que les syndicats ne cèdent sur leur position de principe. Une prochaine réunion, fixée au 22 mars, pourrait être décisive pour savoir si la situation redémarre… ou s’enlise.

De faibles marges de manœuvre

Mais l’exercice risque d’être ardu. « La sécurité privée est un marché de main-d’œuvre non délocalisable sur lequel évoluent 20 000 à 30 000 entreprises. Dans ce contexte, les clients demandent toujours plus et toujours moins cher, obligeant les prestataires à s’aligner. Et, à ce jeu, on trouve toujours plus requin que soi… », regrette Alain Bouteloux. Mais en admettant que cette négociation aboutisse positivement, restera encore à s’attaquer à un autre gros morceau : celui des classifications liées aux formations. Un autre chantier stratégique pour la branche qui n’avait pas évolué depuis 2006.

Auteur

  • Benjamin D’Alguerre