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Denis Monneuse : Du côté de la recherche

Chroniques | publié le : 01.04.2019 | Denis Monneuse

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Denis Monneuse : Du côté de la recherche

Crédit photo Denis Monneuse

Pourquoi les Noirs sont-ils moins payés que les Blancs ?

La question des rémunérations est au cœur du sujet de l’égalité professionnelle. Malgré un arsenal juridique qui n’a cessé de s’étoffer depuis les années 1970, il existe encore des écarts salariaux en faveur des hommes.

En 1972, la loi pour l’égalité professionnelle stipulait que « tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes ». Pourtant, les hommes perçoivent encore aujourd’hui une rémunération de 9 % supérieure à celle des femmes à travail égal et des revenus supérieurs de 25 % au total sur l’ensemble de leur carrière. D’où l’obligation de publier chaque année un rapport de situation comparée (RSC) et, surtout, une nouvelle sanction sous forme d’amende de 1 % du chiffre d’affaires pour les entreprises de plus de 50 salariés qui ne respecteraient pas la loi dans ce domaine.

À moins que la France ne représente une exception dans le monde, il est probable que des écarts de rémunération existent aussi chez nous entre salariés suivant leur couleur de peau. Toutefois, la législation en vigueur n’autorise pas la mise en place d’études précises pour le vérifier, contrairement à ce qui est possible dans d’autres pays. On observe par exemple aux États-Unis des différences de rémunération entre les Blancs et les Noirs. Une des explications tiendrait à la négociation du premier salaire par les demandeurs d’emploi.

Morela Hernandez, Derek Avery, Sabrina Volpone et Cheryl Kaiser, chercheurs dans les universités de Virginie, Wake Forest, Colorado et Washington, ont mené trois études pour mieux comprendre les différences entre les Blancs et les Noirs au moment de négocier leur salaire d’entrée dans une entreprise. Ils viennent de publier leurs résultats dans Journal of Applied Psychology.

Il s’avère que les employeurs s’attendent moins à ce que les demandeurs d’emploi noirs négocient que leurs homologues blancs. Le fait qu’un Noir demande à négocier son salaire d’entrée dans une entreprise a donc plus de risque d’être mal perçu par son interlocuteur : ce comportement peut être vu comme transgressif, ce qui tend à provoquer de la résistance auprès de l’interlocuteur. Les Noirs obtiennent donc de moins bons salaires, en particulier s’ils engagent une négociation salariale avec un interlocuteur qui a des préjugés raciaux, considérant que les Noirs devraient obtenir des salaires plus faibles que les Blancs. Pour les gens qui partagent cette opinion, les demandeurs d’emploi noirs devraient déjà être contents qu’on les embauche. Le fait qu’ils cherchent à négocier leur semble alors quelque peu choquant.

On retrouve ici des différences observées entre les hommes et les femmes. Si les femmes font preuve de négociation et de compétition, qui sont des valeurs plutôt considérées comme masculines, elles ont tendance à passer pour peu féminines : elles transgressent les stéréotypes de genre. Et si elles ne négocient pas leur rémunération, on pourra aussi leur dire que c’est de leur faute s’il existe des écarts salariaux entre hommes et femmes.

Bref, vivement que le droit à la négociation soit inscrit dans les droits de l’homme et du citoyen ! Ce serait un bon point de départ pour plus d’égalité salariale.

Auteur

  • Denis Monneuse