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Expérience : Quand la confiance est la clé du succès

Le point sur | publié le : 08.04.2019 | L. Z.

Le secret de ce cabinet d’ingénierie pour fidéliser ses salariés ? Leur offrir la plus grande liberté possible. Voyage au pays de la confiance et de l’implication.

« L’an dernier, on m’a offert un livre d’Isaac Getz (le professeur de l’ESCP Europe qui a popularisé le concept d’entreprise libérée en France, NDLR) et je me suis rendu compte que j’étais sur le même modèle. » Bruno Rigoulay, patron de DRB Méthodes et Applications, un cabinet d’ingénierie basé dans le Maine-et-Loire, comptant une vingtaine de salariés disséminés sur le territoire, s’est servi de son intuition et de ses goûts propres pour gérer l’entreprise qu’il a lancée en 2005. « Après avoir été managé à l’ancienne et avoir détesté cela, j’ai voulu travailler seul », explique-t-il. Comme consultant, en mettant son savoir-faire au service de la performance industrielle de ses clients (Unilever ou Nestlé, entre autres, qui en redemandent). Il a dû embaucher avec une ligne directrice : « faire comme je le sentais », dit-il. Autrement dit, en faisant confiance aux salariés, en les laissant libres de s’organiser, et bien sûr, en les libérant de toute hiérarchie. Si Bruno Rigoulay précise au détour d’une phrase qu’il est bien le patron, DRB Méthodes et Applications fonctionne en pôles (qualité, sécurité, marketing, bien-être, technique…), sous forme de cercles façon mathématiques modernes et théorie des ensembles. Chaque pôle est doté d’un leader, qui peut lui-même être « leadé » dans un autre pôle, précise Bruno Rigoulay.

Cette organisation horizontale s’exprime également par la transparence sur les salaires – chaque collaborateur connaissant celui des autres – mais aussi par l’esprit d’entraide. « Si un ingénieur, par exemple, nous dit qu’il a du mal avec un projet, nous lui envoyons de l’aide, par l’intermédiaire d’un autre ingénieur, qui apportera un regard neuf. Et ce dernier pourra un jour se trouver dans la même situation, celle de recevoir de l’aide d’un autre », explique le dirigeant.

Outre ce fonctionnement en pôle et cet état d’esprit solidaire, DRB mise également sur la confiance et la flexibilité. « Récemment, un salarié que j’appelais au téléphone m’a dit qu’il ne pouvait pas me parler parce qu’il était chez le coiffeur, raconte Bruno Rigoulay. Où est le problème ? Je sais que le travail sera fait plus tard et livré en temps et en heure. » Et côté flexibilité, « un ingénieur peut aussi faire du commercial, surtout si les projets venaient à manquer pendant une période », poursuit le dirigeant de DRB.

Transparence et entraide

Dans tous les cas, ses salariés ne semblent pas s’en plaindre. Adrien Moyet, ingénieur technique depuis deux ans et demi chez DRB, apprécie cette confiance, de même qu’il accueille avec plaisir le fait que le service communication lui demande son avis sur un nouveau visuel, par exemple, ou que les RH l’incluent dans les entretiens de recrutement. À travers ces coups de main ponctuels comme dans ses tâches principales, ce jeune professionnel cherche à savoir que son travail a un impact sur l’entreprise. « J’ai travaillé dans un grand groupe international qui comptait 16 000 salariés et je pouvais être absent une semaine, cela n’avait aucune incidence sur l’entreprise ! », s’exclame-t-il. C’est parce qu’il s’ennuyait ferme dans son précédent poste qu’il a postulé chez DRB, « une entreprise à taille humaine ».

Si la société poursuit son expansion au rythme actuel – elle est passée de six salariés lorsqu’Adrien Moyet est arrivé à une vingtaine aujourd’hui –, l’organisation mise en place par Bruno Rigoulay pourra-t-elle fonctionner de la même façon ? Le jeune ingénieur n’a pas la réponse. « C’est peut-être là que le concept d’entreprise libérée trouve ses limites », avance-t-il, tout en espérant que DRB saura regrouper les équipes en petites unités, avec des passerelles entre chacune, pour maintenir l’état d’esprit qui règne aujourd’hui.

« Moi aussi, j’ai eu de la chance, assure Charles Lindemann, ingénieur commercial pour DRB. Je connaissais un ingénieur de l’entreprise. Lorsque j’ai postulé, je lui ai demandé comment cela se passait », explique-t-il. L’idée que « tout le monde peut être mis à contribution pour faire avancer l’entreprise » l’a séduit. « La liberté exceptionnelle et la confiance absolue qui sont accordées aux salariés » également.

« Ce qui m’a le plus surpris, c’est le fait que la réalité de la vie quotidienne de l’entreprise matche le discours délivré aux jeunes recrues, dit-il. Dans d’autres organisations, ce n’est qu’une façade. » Bref, cette communauté qui a pris corps est aussi la raison pour laquelle les salariés « ne comptent pas leurs heures », et que l’entreprise est performante.

Confiance en soi et en les autres

L’entreprise libérée est-elle un mode d’organisation qui peut se décliner partout ? « Le profil psychologique est très important, avance Charles Lindemann, il faut avoir confiance en soi et en les autres.

Mais cela se travaille », ajoute-t-il. Il y a eu pour l’instant peu d’erreurs de casting, et Bruno Rigoulay s’enorgueillit d’avoir un turnover très faible – « une seule personne est partie », dit-il –, « je me demande aussi si, à 50 ou à 100 personnes, il n’y aura pas un salarié qui voudra profiter du système ? », s’interroge cependant Adrien Moyet. Reste que quand DRB a dû se séparer d’un collaborateur très en difficulté, Bruno Rigoulay a appelé un chef d’entreprise de la région pour lui retrouver un poste. Entreprise libérée et humaine jusqu’à la rupture…

Auteur

  • L. Z.