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Digital : RH et IA font bon ménage

Le point sur | publié le : 09.03.2020 | Xavier Biseul

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Digital : RH et IA font bon ménage

Crédit photo Xavier Biseul

Du recrutement prédictif à la gestion de carrière personnalisée, les technologies de l’intelligence artificielle se positionnent sur l’ensemble des process de la fonction RH. Au-delà de l’effet marketing, revue de détail des apports réels de ces solutions innovantes.

L’effet de mode a saisi l’ensemble du marché. Des start-up spécialisées aux éditeurs de logiciels traditionnels, il n’y a guère de solution RH qui ne sorte aujourd’hui sans le tampon intelligence artificielle. Les technologies du machine learning ou du traitement du langage naturel viennent épauler la DRH dans la quasi-totalité de ses missions, du recrutement à la mesure du climat social.

À commencer par le sourcing. Un exemple ? CV Catcher de Jobijoba analyse automatiquement le contenu d’un CV afin d’orienter le candidat vers les offres les plus pertinentes. Fnac Darty l’utilise comme point d’entrée de son site carrières afin que le visiteur ne se sente pas perdu parmi les 300 à 400 offres d’emploi proposées en permanence.

Plus besoin de passer par un formulaire ou un moteur de recherche, il suffit au candidat d’« uploader » son CV pour se voir proposer une sélection d’annonces correspondant à son métier, ses compétences et sa géolocalisation. Un moyen aussi pour Fnac Darty de faire baisser le volume de candidatures spontanées.

La bonne personnalité au bon poste

L’étape suivante est celle du recrutement prédictif. Il s’agit là d’évaluer la capacité d’un candidat à réussir et à s’épanouir à un poste donné. Pour cela, une solution comme AssessFirst va, au travers d’un questionnaire, évaluer son raisonnement logique, sa personnalité et ses facteurs de motivation.

« Il s’agit de cerner ce qui stimule un individu dans un contexte professionnel, avance Simon Baron, chief science et innovation chez AssessFirst. Souhaite-t-il évoluer dans un environnement sécurisant ou créatif ? Aime-t-il les tâches variées ? Le travail en équipe ? Le rôle qu’il sera amené à occuper doit être en phase avec ses aspirations profondes. » Cette approche par compétences comportementales permet, selon lui, de réduire les coûts de recrutement de 20 % et le turn-over de 50 % tout en éliminant les biais de perception conscients ou inconscients des recruteurs.

« Un cerveau humain qui a peu de temps pour traiter un grand volume d’informations, comme une pile de CV, va se rattacher à des processus connus, à son instinct, poursuit Simon Baron. L’IA va, elle, prendre une décision rationnelle en prenant en compte tous les éléments objectifs qu’elle a à sa disposition. Elle peut repêcher des profils hors cible comme un ancien boulanger devenu commercial. »

En plein développement en France, l’enseigne britannique Pret A Manger utilise AssessFirst pour attirer des talents dans le secteur peu attractif qu’est la restauration rapide. « La solution valorise le savoir-être et la motivation du candidat plus que le savoir-faire qui peut s’apprendre », estime Yohan Lefevre, responsable recrutement et formation.

Déchargés du « screening » des CV, les recruteurs ont, selon lui, plus de temps à accorder aux candidats sélectionnés. « En ayant déjà une vision de la personne rencontrée, les entretiens sont plus approfondis et qualitatifs. On peut la challenger sur un axe d’amélioration. S’agit-il d’un obstacle insurmontable ou d’un point à travailler ? »

Un coach de carrière personnalisé

Dès lors que le candidat est retenu, d’autres plateformes d’IA prennent le relais. À l’image de 365 Talents qui dresse une cartographie dynamique des compétences d’une entreprise. Au-delà des sources de données connues (CV, entretiens de carrière…), elle fait appel à l’analyse sémantique pour révéler les aptitudes dormantes ou cachées d’un employé. Ce dernier va aussi auto-déclarer des compétences sur son profil.

Une fois ce travail réalisé, le collaborateur reçoit des suggestions personnalisées de postes en mobilité interne, de missions dans le cadre d’équipes projets ou de formations. Avec l’aide de l’IA, la DRH peut accompagner un plus grand nombre de salariés au-delà des fameux 5 % de hauts potentiels. Elle peut aussi plus facilement se projeter sur les besoins futurs en compétences dans le cadre d’une GPEC. « Jusqu’à présent, les DRH s’appuient sur une forme structurée des compétences. Ces référentiels figés rassurent, mais ne prennent pas en compte les compétences dans toute leur richesse », note Loïc Michel, PDG de 365 Talents qui compte, parmi ses références, Société générale, April, Crédit agricole, Eiffage, RTE ou la Caisse des dépôts.

Récemment racheté par l’américain Cornerstone, Clustree, qui a dans sa clientèle des grands comptes comme Sanofi, Michelin, Alstom, Orange ou SNCF, se présente comme une plateforme de gestion de carrières embrassant les différents process RH, du recrutement à la gestion des talents. Là encore, l’approche par compétences prévaut. « La compétence est un langage universel, estime Bénédicte de Raphelis Soissan, associate vice president EMEA chez Cornerstone. Une fois que l’on a défini un individu par ses compétences et non par un intitulé de poste, il est possible de lui proposer des suggestions pertinentes. »

L’IA mesure le niveau de compétence en évaluant sa durée et son intensité. Elle permet aussi de jeter des passerelles entre deux compétences identifiées comme proches comme « design web » et « interface utilisateur ». Elle va, enfin, identifier le « gap » de compétences pour occuper le poste et proposer la formation ad hoc pour le combler.

Mesurer l’engagement des collaborateurs

Enfin, l’IA permet de sonder régulièrement le moral des troupes. « Les entreprises ont un CRM pour évaluer la relation client, mais rien pour mesurer l’engagement de leurs salariés », déplore Christophe Bergeon, PDG et cofondateur de l’éditeur Zest. Sa solution permet d’interroger le terrain à partir d’un questionnaire axé sur les principaux leviers d’engagement. Avec des questions comme « Adhérez-vous à la stratégie de l’entreprise ? ». En sens inverse, le salarié peut remonter son feed-back. Grâce au traitement du langage naturel, Zest va dégager des tendances de cette masse de verbatims.

Les clients de cet éditeur parmi lesquels on trouve EY, Orange, Bouygues Construction, Engie ou But sont souvent en pleine transformation et veulent savoir si tout le monde suit dans les rangs. D’autres souhaitent améliorer l’expérience collaborateur ou prévenir les risques psychosociaux. Enfin, il y a la volonté de s’assurer que les valeurs de l’entreprise sont partagées par les générations Y et Z. Des jeunes actifs qui ne veulent plus de management à l’ancienne de type « top down » et privilégient l’intelligence collective.

Auteur

  • Xavier Biseul