Le discours ambiant nous vante les personnes heureuses et rayonnantes.

Les magazines insistent sur l’art et la manière de s’occuper de soi, d’être détendu, de se chouchouter. Et par-dessus tout, il faut positiver et être bienveillant avec soi-même. En entreprise, pas le droit au « coup de mou » ! Il faut être en forme. Le bien-être semble devenir un but en soi et une nouvelle norme.

Malheur à celui ou celle qui traverse une phase difficile ou qui déprime ! Pourtant ce n’est pas cet état qui est bizarre, c’est la promesse de la société qui nous maintient dans l’illusion. Connaissez-vous des personnes toujours épanouies, rayonnantes, en paix avec elles-mêmes et n’ayant jamais traversé de difficultés ? Certains individus, il est vrai, sont plus épargnés que d’autres, mais chacun rencontre un jour ou l’autre des épreuves à surmonter.

Promettre le bien-être pour tous, tout le temps, est comme offrir une assurance gratuite contre les aléas de la vie. Notre société qui adore le confort et nourrit une réelle aversion pour le risque est immédiatement séduite. À tort. Croire que l’état de bien-être permanent est normal rend malheureux tous ceux qui n’accèdent pas à ce Nirvana. Pourtant, depuis des milliers d’années, les philosophies du monde ont médité sur la souffrance humaine, le sens de la vie, la place des épreuves dans la construction de soi. Depuis toujours, chacun s’interroge sur les événements qui marquent sa vie, ses bonheurs et ses désillusions, ses aspirations, sa destinée, ses engagements. C’est ce questionnement qui fait grandir.

Vouloir aujourd’hui un parcours facile, sans hauts ni bas, avec une météo constamment au beau fixe, c’est ignorer les lois de la vie. L’évolution d’une personne est organique, non linéaire. Elle se fait par cycles, par « saisons ». Certaines phases sont enthousiasmantes, d’autres plus tristes. On traverse parfois des moments de doute, on se cherche. Chaque difficulté surmontée, chaque larme versée, chaque « méandre de vie » exploré courageusement sans savoir où tout cela nous conduit contribue à notre transformation.

Aujourd’hui, les perceptions individuelles sont très affûtées, les personnes ressentent ce qui n’est pas en harmonie dans leur vie ; elles captent également la démesure de ceux qui mettent en péril les équilibres planétaires. Elles veulent agir. On passe du bien-être centré sur soi au souci du bien agir.

Plutôt que de savoir si nous sommes heureux, sommes-nous en mouvement ? Nos actions, nos attitudes nous rapprochent-elles de nos valeurs et de nos aspirations les plus profondes ? Parfois des épreuves imprévues surviennent, et notre fragile équilibre se rompt. Notre bonheur est-il perdu pour autant ? Non, nous préparons un nouveau cycle, nous construisons une nouvelle solidité intérieure.

La clé est de rester en lien : avec soi pour commencer bien sûr, mais surtout avec son environnement, avec les communautés qui nous entourent.

Ce lien crée de la confiance et permet de grandes transformations, autant individuelles que collectives.