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L’après Covid-19 : le stress-test de la raison d’être ?

Chroniques | publié le : 11.05.2020 | Alain Roux

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L’après Covid-19 : le stress-test de la raison d’être ?

Crédit photo Alain Roux

Benoît Serre partner au BCG et vice-président délégué de l’ANDRH ; Charles-Henri Besseyre des Horts Professeur émérite à HEC, président de l’AGRH

La crise du coronavirus

apparaît comme la première véritable épreuve du feu pour les entreprises qui ont officiellement inscrit dans leur statut ou affiché leur raison d’être. Les sociétés du CAC 40 restent relativement frileuses puisque quatre d’entre elles (Carrefour, Atos, Engie, Orange), au début de la pandémie, avaient inscrit ou allaient inscrire leur raison d’être dans leurs statuts alors que 18 autres l’ont seulement affichée pour définir leur rôle dans un contexte sociétal1. Ce qui est en jeu est de pouvoir démontrer dans les faits aux yeux des parties prenantes le respect des engagements pris au titre de la responsabilité sociale et environnementale.

L’exemple d’une entreprise

qui, dans ce contexte de crise, a traduit sa vision dans une action concrète de sa raison d’être, définie en juin 2019, est la MAIF. Cet assureur a décidé mi-avril 2020 de reverser à ses clients 100 millions d’euros économisés sur les accidents de la route, en forte baisse en raison du confinement, en leur laissant le choix entre récupérer pour eux-mêmes la somme remboursée ou la reverser à des associations luttant contre la pandémie2. Dans une perspective similaire, Veolia a concrétisé par une action exemplaire l’un des éléments clés de sa raison d’être, lié à la santé et au bien-être des collaborateurs, en faisant tester ses 50 000 salariés français au Covid-19 en vue du déconfinement.

Ces deux exemples

montrent que les semaines et les mois à venir vont être déterminants pour tester la solidité et la pertinence des raisons d’être dans les entreprises qui se sont engagées avant la crise dans cette démarche volontaire. Il serait très préjudiciable pour ces sociétés que les actes ne suivent pas la vision exprimée dans leur raison d’être notamment sur le plan social. Dans cette perspective, les DRH seront aux premières loges pour assurer que les engagements pris soient tenus dans l’après-crise avec ou sans l’aide de l’État. Mais au-delà de l’attention nécessaire portée aux managers et aux collaborateurs, ils peuvent jouer un rôle clé vis-à-vis des partenaires de l’entreprise, clients et fournisseurs, dont les salariés peuvent être eux-mêmes évidemment particulièrement touchés.

Durant cette crise,

nombre d’entreprises ont vécu vis-à-vis de leur raison d’être une expérience mitigée. La confrontation de leur promesse employeur et de leur engagement sociétal a trouvé là une occasion de s’exprimer concrètement au travers de décisions simples et scrutées par leurs salariés comme par les médias. Le choix de compenser ou non le chômage partiel, la bienveillance du management pour soutenir les collaborateurs, l’adaptation de leur outil de production aux besoins de la Nation en masques ou en gel. La raison d’être devenait concrète et visible ou, au contraire, elle semblait détachée de la réalité. D’autres organisations réfléchissent dès maintenant à l’impact de cette crise sur leurs relations employeur/employé comme sur leur rôle dans la société, sur leur pacte social comme sur leur responsabilité collective.

Depuis plus d’un an,

les réflexions comme les actions d’entreprises « à mission » fournissaient un débat sur le rôle de l’entreprise. Qui aurait cru que ce débat deviendrait une réalité concrète et perceptible aussi rapidement ? Le chemin n’est pas fini, loin de là, mais il vient de prendre un angle particulier autour de la place de l’être humain dans la performance économique et sociale. Cela constitue un des points majeurs de la raison d’être tant chacun sait aujourd’hui que la dimension économique ne peut être imaginée sans une dimension sociétale et humaine que cette crise a révélée parfois si faible et en même temps si essentielle.

Auteur

  • Alain Roux