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Entretien : Les groupements d’employeurs, un dispositif à part…

Le point sur | publié le : 25.05.2020 | D. P.

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Entretien : Les groupements d’employeurs, un dispositif à part…

Crédit photo D. P.

Amélie Artis, maître de conférences en économie à Sciences Po Grenoble, a réalisé plusieurs recherches et publications sur les GEIQ, dont la dernière, réalisée avec Marc-André Vilette, porte sur les spécificités de l’accompagnement dans les GEIQ dans la région Auvergne-Rhône-Alpes*. Englobant les problématiques d’insertion professionnelle et sociale, ils n’entrent finalement dans aucun cadre connu.

Dans quel contexte avez-vous réalisé cette étude ?

Nous avions réalisé une première publication avec Marc-André Vilette sur le développement professionnel des alternants dans un GEIQ, et le comité régional Auvergne Rhône-Alpes des GEIQ nous a demandé une nouvelle étude pour tenter de mieux conceptualiser, analyser et évaluer l’accompagnement si spécifique dans les GEIQ. Nous avons rencontré à la fois des responsables, des organismes de formation et des salariés.

Comment pourriez-vous qualifier cet accompagnement ?

Nous avons rencontré quelques difficultés à circonscrire les spécificités par rapport à d’autres structures. Il y a un consensus sur l’accompagnement au sein des GEIQ, tous proposent globalement les mêmes services, mais c’est un modèle totalement différent des autres, que peuvent fournir un conseiller Pôle emploi ou le service RH d’une société. Car il comprend des actions d’une fonction RH propre à une entreprise et, en même temps, un accompagnement social proche de celui qu’offrent les travailleurs sociaux. D’ordinaire, ces rôles sont cloisonnés avec des identités professionnelles complètement différentes. La spécificité des GEIQ est d’internaliser ces deux composantes, de proposer un spectre très large, de la fonction RH jusqu’à l’accompagnement social, mais mené bout à bout par le GEIQ lui-même, qui est l’employeur et doit aussi s’assurer que son service fonctionne. On pourrait donc dire qu’il s’agit d’une fonction productive et d’une fonction sociale intégrées. C’est ce qui en fait également toute la richesse, car son modèle économique est basé sur le fait que tout le monde doit être satisfait, ses salariés comme les employeurs.

Les résultats des GEIQ en termes de réussite aux diplômes ou certifications et d’insertion sont très satisfaisants. Pourtant, le modèle n’est pas tellement connu. Est-ce l’exigence de cet accompagnement qui l’expliquerait ?

Il est vrai que les GEIQ, alors qu’ils sont assez anciens, ne sont pas si répandus, et encore très focalisés dans certains secteurs. La première réticence pour entrer dans un GEIQ vient plutôt de la question de la mutualisation de la fonction employeur au sein du groupement. Tous les membres du GEIQ étant employeurs doivent être solidaires des autres. Si l’un est en difficulté, ou pas efficient dans sa fonction RH, tout le monde doit être solidaire, cela peut représenter un frein si ce n’est pas le cas. Pourtant, et presque paradoxalement, une fois que les entreprises sont engagées dans le GEIQ, on constate une grande fidélité, une grande stabilité et un véritable engagement. Le fait qu’il accompagne vraiment les salariés dans leur parcours et leur montée en qualification est une explication. Il existe aussi un effet de réciprocité : certains salariés qui sont passés par le GEIQ, et qui ont été recrutés par leur entreprise d’accueil, gardent souvent un attachement à ce modèle, et y adhèrent ensuite. Parfois même s’ils n’ont pas besoin de ses services dans l’immédiat.

Côté salariés, la satisfaction est-elle la même ?

Le salarié bénéficie d’un vrai accompagnement, et peut utiliser à tout moment les services des GEIQ pour poser des questions. Mais les retours sont en demi-teinte concernant les entreprises qui les recrutent. Dans la plupart des cas, il y a un suivi réel dans l’entreprise, un engagement à long terme, une régularité dans les rendez-vous, une recherche d’adéquation entre le poste de travail et la formation… Il s’agit par exemple du secteur des services à la personne, avec de vrais enjeux liés à la pénurie de compétences et à une nécessité d’entretenir des relations interpersonnelles très importantes dans le métier. Mais dans d’autres secteurs, des entreprises fonctionnent plus comme dans l’intérim, en considérant qu’il s’agit de personnel présent sur une plus courte durée, sans grand lien avec la formation dispensée. Mais tout le travail des GEIQ justement est de montrer aux nouveaux entrants les différences avec, certes, une mise à disposition du personnel, mais un attachement au parcours de chacun.

* L’accompagnement dans les GEIQ d’Auvergne-Rhône-Alpes, rapport de recherche-action au comité régional des GEIQ AURA.

Auteur

  • D. P.