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Yvan William : La chronique juridique

Chroniques | publié le : 26.10.2020 | Yvan William

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Yvan William : La chronique juridique

Crédit photo Yvan William

Formation, adaptation et entretien professionnel

L’Accord national interprofessionnel du 9 juillet 1970 et la loi du 16 juillet 1971 « portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l’éducation permanente », ont fait entrer le droit à la formation continue dans le Code du travail.

En instaurant d’une part, un droit individuel à la formation via le congé individuel de formation, en faisant de la formation professionnelle un enjeu de négociation collective, d’autre part.

Cinquante ans de réformes successives démontrent les préoccupations de l’État et des partenaires sociaux pour cet enjeu central dans la préservation et le développement de l’emploi.

Et pourtant, malgré de nombreux outils et innovations, nous tâtonnons toujours.

Un arrêt récent de la Cour de cassation (Cass. soc. 16/09/2020, n° 18-19.889) pose de manière simple la difficile question de l’initiative de la formation professionnelle : un cadre dans le milieu bancaire exerçant des mandats de représentants du personnel s’estime victime de discrimination syndicale et de harcèlement moral.

Il revendique son repositionnement à un échelon supérieur et sollicite des dommages-intérêts pour violation de l’obligation de formation et d’entretien professionnel.

La Cour d’appel rejette ses demandes : « Quand bien même le salarié n’aurait eu aucun entretien professionnel depuis l’année 2014, il n’a expressément sollicité pour lui-même aucune formation dite d’adaptation à son poste de travail et s’est limité à revendiquer un positionnement qui ne correspond pas à son réel niveau de compétence ».

Pour avoir inversé la charge de l’obligation de formation et refusé de reconnaître le préjudice lié au défaut d’entretien professionnel, l’arrêt de la Cour d’appel est cassé.

L’obligation de formation-adaptation pèse sur l’entreprise

L’article L. 6321-1 du Code du travail le rappelle sans ambages : « L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations…

Les actions de formation mises en œuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de développement des compétences mentionné au 1° de l’article L. 6312-1. »

En matière de licenciement, il est jugé depuis de nombreuses années que le défaut ou l’insuffisance de formation cause un préjudice distinct de celui pouvant résulter d’un licenciement abusif qui doit être réparé (Cass. soc. 09/12/2015, n° 14-20.377).

Dans l’hypothèse d’une restructuration en raison d’une mutation technologique, l’entreprise sera condamnée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse si elle n’a pas satisfait préalablement à cette obligation.

Idem concernant l’obligation de reclassement préalable. Tous les postes pouvant être tenus par le salarié dont le poste est supprimé après une formation d’adaptation devront être proposés faute de quoi le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 07/07/2004 n° 08-45.277).

Les entretiens professionnels bisannuels et sexennaux doivent être organisés par l’employeur et formalisés par écrit

Tous les salariés sont invités par l’entreprise tous les deux ans selon leur date d’entrée puis de date à date par rapport dernier entretien. Pour la sixième année, l’entretien contient un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel dans les conditions fixées par l’article L. 6315-1 du Code du travail.

Ces entretiens doivent être formalisés par écrit, datés et signés par le manager, et idéalement cosignés par le salarié qui recevra une copie du document.

Le ministère du Travail a confirmé que ces entretiens peuvent être tenus en visioconférence.

L’ordonnance n° 2020-387 du 01/04/2020 laisse un répit aux entreprises qui n’ont pas encore tenu leurs premiers entretiens état des lieux mais ils devront être impérativement organisés avant le 31/12/2020.

Outre les sanctions rappelées par l’arrêt du 16 septembre 2020 en cas d’action judiciaire, et l’abondement correctif de 3 000 € que l’employeur devra payer, l’entretien professionnel est un temps fort pour le salarié. Pour l’entreprise, il constitue un outil central de la gestion prévisionnelle des compétences.

Auteur

  • Yvan William