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Avenir, que nous réserves-tu ?

Chroniques | publié le : 02.02.2021 | Gilles Gateau directeur général de l’Apec

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Avenir, que nous réserves-tu ?

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Il l’était déjà, mais l’exercice de prévision est devenu plus difficile encore. L’année 2020 aura douché nombre d’ambitions dans l’art divinatoire… Il n’empêche, l’exercice prospectif reste indispensable.

Indispensable, pas pour dire ce qui sera – personne ne le sait – mais pour poser, en s’appuyant sur des analyses étayées, les enjeux auxquels on peut raisonnablement s’attendre. C’est pour toutes les fonctions de l’entreprise – en premier lieu les fonctions RH – un outil nécessaire d’anticipation. Qui réclame rigueur et humilité.

L’Apec réaffirme cette ambition prospective dans sa raison d’être, qu’elle vient de publier1 : saisir les tendances, les signaux faibles derrière les évidences, c’est ce dont ont besoin les acteurs ! L’étude « Cinq enjeux pour l’emploi des cadres » qu’elle vient de publier, comme chaque année, mérite d’être lue comme un repère utile, certains diront « un phare dans la tempête » tant les bourrasques des crises économique, sociale et sanitaire nous font valdinguer de-ci, de-là.

Que nous apprend-elle ? D’abord, et c’est rassurant, que beaucoup des tendances de fond qui caractériseront l’emploi des cadres en 2021 s’inscrivent dans le prolongement des précédentes. S’il y a ruptures, c’est dans l’accélération ou le coup de frein brutal, ou dans la reformulation de questions anciennes. Dit autrement, ces tendances étaient là, mais apparaissent sous un jour nouveau.

C’est le cas pour le recrutement : le retournement brutal de situation pour les cadres -30 % à -40 % d’embauches en moins – ne fait pas disparaître par miracle les difficultés de recrutement qui préexistaient, parfois même c’est paradoxalement le contraire. Deuxième constat, la fragilisation des « jeunes diplômés » et, à l’autre extrémité du spectre, des « cadres seniors » : une malédiction bien française que l’on déplorait déjà lorsque j’étais étudiant en économie du travail il y a… 40 ans ! Présente aussi depuis quelques années, l’aspiration à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle : la crise sanitaire l’a décuplée !

Deux autres tendances doivent nous interpeller. D’abord l’évolution nécessaire des pratiques managériales. Ce n’est pas un scoop, la révolution numérique a déjà modifié nos manières de faire : plus grande individualisation des salariés, aspiration à plus d’autonomie… Mais la crise fait définitivement exploser le cadre ancien ! Des questions surgissent avec force : comment faire ensemble quand les équipes sont éclatées, comment faire du collaboratif avec des outils qui soi-disant le sont, mais à l’usage pas tant que cela ? La crise souligne un besoin énorme en formation, auquel les entreprises vont devoir répondre pour aider les managers face à un monde nouveau. On bricole pendant la crise, on tient bon, mais il va falloir apprendre vraiment à collaborer de loin et à manager à distance.

Autre tendance, encore un peu incertaine : les transitions professionnelles vont-elles s’accélérer, celles qui sont subies, mais aussi les autres ? Ce serait une vraie surprise : toutes les crises du passé ont vu la mobilité des cadres ralentir brutalement. Ce n’est pas ce qu’on observe début 2021, pourquoi ? 57 % des cadres estiment que la crise les a incités à réfléchir à leur avenir professionnel. Ce n’est donc pas « tous aux abris ». On pourrait même y trouver une touche d’optimisme : malgré les temps difficiles, la recherche de sens, le besoin d’un travail plus en phase avec ce qu’on est restent des moteurs de l’avenir. Première éclaircie dans la tempête ? Encore faut-il que ce désir de mobilité puisse se concrétiser, sinon il nourrira encore un peu plus de frustration : un vrai défi pour 2021 !

(1) « Accompagnant les mutations du travail et de l’emploi, l’Apec s’engage pour une action efficace, inclusive et prospective au service de l’intérêt général et du dynamisme des territoires, pour les cadres, les jeunes diplômés et les entreprises. »

Auteur

  • Gilles Gateau directeur général de l’Apec