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Sur le terrain

Reconversion : Hinov veut favoriser le recrutement de militaires blessés

Sur le terrain | publié le : 14.03.2021 | Mathilde Régis

Impossible de rebondir après un syndrome de stress post-traumatique ? Alors que 80 % des militaires blessés et victimes de troubles psychiques souhaitent se réinsérer dans le secteur privé, Stéphane Imbert peut témoigner de son parcours. Pilote d’avion blessé en opération, il a créé une structure ad hoc, Hinov, afin d’aider à la reconversion de ses anciens frères d’armes.

Donner une chance pour panser les blessures. Avec des engagements de haute intensité au Mali ou en Irak, les militaires de l’armée de terre seraient entre 1 400 et 1 700 à avoir été identifiés comme blessés psychiques. Le stress post-traumatique est, d’ailleurs, aujourd’hui reconnu comme une des causes principales de leur mise en congé de longue maladie. Dans ces conditions, un retour vers une activité professionnelle est un long parcours du combattant. C’est pourquoi le Medef de Lyon s’est intéressé au recrutement dans le civil d’anciens militaires blessés en opération. Stéphane Imbert en est un parfait exemple. « En 2011, j’ai eu un incident de vol qui a provoqué, trois ans plus tard, un stress post-traumatique. Mon corps m’a totalement lâché lorsque j’étais en détachement au Mali », raconte cet ancien pilote militaire d’hélicoptère, puis d’avion. En l’espace de quelques semaines, sa carrière militaire de quinze ans a pris fin. C’est un reportage sur les drones qui va lui donner une porte de sortie. « Ce domaine m’a permis de réutiliser mes compétences en aéronautique dans un secteur totalement nouveau. » En créant une entreprise adaptée, Hinov, qui a déjà décroché des contrats avec de grands comptes, il a souhaité « rendre la pareille » à l’institution militaire.

« Hinov est une structure dédiée à la reconversion, créée pour apporter une aide à des militaires blessés en proposant des métiers opérationnels, loin des clichés du handicap. Mes clients industriels ont tout de suite adhéré à ce projet », explique-t-il. En lien avec la cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre, Stéphane Imbert a ainsi accueilli plusieurs anciens soldats dans son entreprise. « Aujourd’hui, deux ont signé un CDI », se réjouit-il. Une main tendue qui permet notamment de lutter contre la principale difficulté pour les militaires blessés : appréhender la diversité des métiers dans le civil. « Dans l’armée, il s’agit davantage d’adhérer à un mode de vie et à la notion de service rendu. L’autre obstacle concerne le lien entre compétences et qualifications. Celles d’un tireur d’élite ne peuvent pas s’appliquer dans le monde civil. En revanche, il a accumulé énormément de compétences en management et en gestion de crise. L’armée de terre a inventé le système D et l’entreprise n’est pas forcément habituée à avoir des personnes qui savent autant s’adapter. L’investissement d’un militaire va aussi souvent plus loin que sa simple fiche de poste », poursuit Stéphane Imbert.

Opération Oméga

Si les métiers du civil sont parfois méconnus des militaires, le monde de l’entreprise connaît mal, en retour, le milieu des armées, a fortiori lorsqu’il s’agit de militaires blessés. Un projet mis sur pied par les armées et baptisé Oméga vise ainsi spécifiquement la réadaptation professionnelle de ces soldats. Il s’appuie sur une antenne présente dans chaque région de France. Chaque militaire en congé maladie de longue durée pris en charge par Oméga bénéficie d’une convention de stage afin qu’il puisse venir dans l’entreprise. Si les militaires sont globalement accompagnés par le bureau Défense mobilité, qui gère leur reconversion professionnelle, les soldats blessés au combat ont une particularité par rapport à ceux qui quittent les armées à la fin de leur contrat, parce qu’ils n’ont pas choisi de retourner au civil.

Réadaptation sociale

« Pour moi et mes confrères, la sortie du monde militaire à la suite d’une blessure est souvent perçue comme un échec et le rebond n’est pas forcément facile. Il y a l’aspect professionnel de la reconversion, mais aussi une forme de réadaptation sociale, car il y a souvent une période d’isolement après la blessure. Le chef d’entreprise ou le manager va, peut-être, devoir se montrer beaucoup plus humain dans cette démarche qui diffère de l’embauche d’un civil sur CV », prévient Stéphane Imbert. Les stages en entreprise ne demandent aucun engagement, et même si le recrutement du militaire accueilli est la finalité souhaitée, le but de la démarche est davantage de permettre aux militaires blessés d’identifier leurs réelles possibilités de reconversion. « Si la rencontre fonctionne, l’entreprise à tout à y gagner. Elle va accueillir une personne motivée, qui a des valeurs et va se donner sans mesure dans son poste », insiste Stéphane Imbert.

Auteur

  • Mathilde Régis