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Sur le terrain

Conditions de travail : JP Morgan Chase prépare déjà le retour au bureau

Sur le terrain | publié le : 31.05.2021 | Caroline Crosdale

Lorsque l’épidémie de Covid-19 sera maîtrisée, JP Morgan Chase va privilégier le retour au bureau pour 90 % de ses troupes. C’est peu de dire que les grandes banques d’affaires américaines n’ont pas succombé au charme du travail à distance.

Jamie Dimon, le patron de la très puissante banque JP Morgan Chase, prévoit déjà l’après-pandémie. Et ce sera plutôt au bureau. Dans une longue lettre de 66 pages adressée aux actionnaires, le dirigeant de la banque, numéro un aux États-Unis, explique que seulement 10 % des employés, dans des positions très « spécifiques », pourront être maintenus à distance. Certains autres mixeront travail à la maison et à la banque, mais la plupart retrouveront purement et simplement leur bureau. Jamie Dimon reconnaît que ses troupes ont été efficaces, loin de la maison mère. Quand, en mars 2020, presque tout s’est arrêté pour près de 260 000 personnes, les équipes des centres d’appels, des salles de marchés et celles en charge des activités de banque d’investissement ont travaillé à domicile. « Nous nous sommes aperçus que nous pouvions fonctionner virtuellement avec Zoom et Cisco, admet le président du groupe. Et nous avons maintenu la productivité à court terme. » JP Morgan Chase a en effet réalisé un chiffre d’affaires de 123 milliards de dollars l’an dernier et dégagé un bénéfice net de 29 milliards de dollars. Des résultats records.

Alors pourquoi ne pas poursuivre en distanciel ? Jamie Dimon insiste sur le caractère court-termiste de la performance, comme s’il doutait de sa durabilité. « Travailler chez soi va devenir plus intangible », concède-t-il. Mais il faut que « cela marche pour l’entreprise et les clients » poursuit-il. Et le dirigeant estime que de nombreux postes réclament la présence des employés sur place, à plein temps pour le travail en agences, le traitement des chèques, l’accès à la chambre forte et aux coffres-forts, les activités de courtage, la sécurité…

Les bienfaits du compagnonnage

Certains postes n’impliquent pas la présence des intéressés à leur bureau. Mais, selon le numéro un de la banque, « le monde virtuel présente de sérieuses faiblesses ». Les quelques mois de séparation des uns et des autres ont ainsi montré que la collaboration à distance est plus réussie quand les personnels se connaissent déjà. Si ce n’est pas le cas, « cela ne marche pas », martèle le patron dans sa missive. Pas moyen de répliquer sur Zoom le passage de témoin entre un employé expérimenté et son jeune voisin. La direction de JP Morgan a donc décidé de faire revenir les stagiaires au bureau dès cet été.

JP Morgan Chase n’est pas le seul groupe à mettre en avant les bienfaits du compagnonnage entre anciens et nouveaux. Discover, l’expert en cartes de crédit, déplore ainsi l’arrêt temporaire de ses six semaines de formation en présentiel. Les nouveaux venus, retranchés derrière leur ordinateur, ont plus de mal à intégrer la culture maison et, même, à comprendre le jargon des habitués.

Moins de bureau, moins de créativité

Le dirigeant de JP Morgan ajoute à cette longue liste de récriminations d’autres défauts. « Trop de Zoom ralentit le processus de décision », écrit-il, car « il n’y a pas de suivi immédiat ». Enfin, l’éloignement des équipes fait disparaître « les rencontres spontanées et la créativité qui en résulte ». Finies les discussions autour de la machine à café et les voyages pour aller au-devant des clients et des collègues. Le feedback sur les produits et les services s’en ressent.

Au bout du compte, Jamie Dimon n’est pas loin de partager l’avis de David Solomon, le patron de la banque d’affaires Goldman Sachs, qui estime que le travail à distance est « une aberration ». Pourtant, du bout des lèvres, la direction de JP Morgan accepte certaines formules hybrides pour ses banquiers d’investissement. Le coprésident Daniel Pinto, proche de Jamie Dimon, a ainsi évoqué la possibilité d’une semaine par mois à la maison, voire deux semaines, ou encore, deux jours par semaine loin du bureau. Ce compromis satisfait ceux qui savourent la diminution des transports en commun et les repas express au coin de l’ordinateur. En plus, la banque en profite pour réduire son empreinte immobilière. Le nouveau QG en construction à New York sur Park Avenue prévoit des « sièges ouverts » qui seront gérés par des outils digitaux et faciliteront la « rotation » des effectifs. Cent personnes qui rejoignaient autrefois le bureau en masse sont remplacées par une tournante d’une soixantaine d’employés. Jamie Dimon a beau préférer le présentiel, il accepte avec plaisir la réduction des coûts immobiliers.

Auteur

  • Caroline Crosdale