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Insertion: les entreprises se penchent sur le sort des réfugiés

Le point sur | publié le : 27.09.2021 | Natasha Laporte

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Insertion : Les entreprises se penchent sur le sort des réfugiés

Crédit photo Natasha Laporte

 

En raison de la pénurie de main-d’œuvre ou par engagement en faveur de la diversité, certains employeurs se mobilisent pour former et recruter des personnes ayant obtenu ce statut. Même s’il y a de nombreux défis à relever…

Mohamed, 29 ans, originaire du Soudan, a été, l’an dernier, accompagné, avec six autres réfugiés, dans l’obtention du titre professionnel de maçon en voirie et réseaux divers par le GEIQ BTP Hérault, groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification dans les métiers du BTP. Tous ont bénéficié, pendant plusieurs mois, du programme Hope, un dispositif national qui réunit différents partenaires – dans le cas de ce projet, le GEIQ BTP Hérault, l’État, l’Office français de l’immigration et intégration (OFII), Pôle emploi, l’Afpa, l’Opco Constructys et la Fédération régionale des travaux publics. De quoi leur permettre de suivre une formation au français et de décrocher un contrat de professionnalisation, alternant formation pratique et travail en équipe sur chantiers. Puis de trouver un emploi à l’issue de ce parcours.

Dans notre secteur, « il y a un grand manque de candidats », explique Barbara Atlan, directrice de ce groupement qui a associé les entreprises Eurovia Baillargues, Joulié TP, Faurie, Eiffage Route, Colas Vendargues ainsi que Bouygues Énergies &Services pour cette opération. « Ces réfugiés sont aussi particulièrement motivés », poursuit-elle, malgré la barrière linguistique ou des difficultés de mobilité pour rejoindre des chantiers excentrés. Mohamed a finalement obtenu un CDI dans l’entreprise Faurie, qui l’a accompagné durant le programme. Et le GEIQ BTP Hérault de transformer l’essai avec une nouvelle formation, en cours, sur le métier de canalisateur, puis une autre, à venir, sur celui de coffreur-bancheur, au bénéfice de réfugiés.

Dans un tout autre secteur, L’Oréal France a récemment participé, en partenariat avec la start-up Place, à un programme de six mois, en anglais, pour former 19 candidats en innovation. « Près de la moitié d’entre eux étaient des réfugiés », indique Audrey Meznarie, talent acquisition et campus manager de L’Oréal France. Autre initiative sur les rails, toujours avec Place, « Fast Forward », qui ambitionne d’accélérer l’accès à l’emploi des femmes réfugiées. « Avoir des équipes réellement diversifiées permet d’accroître la performance, la créativité et l’innovation, mais aussi de mieux comprendre les attentes des consommateurs et consommatrices à travers le monde », ajoute de son côté Margaret Johnston-Clarke, directrice de la diversité et de l’inclusion de L’Oréal Groupe. Surtout, ces actions s’inscrivent dans l’engagement, plus large, du groupe en faveur de la diversité et de l’inclusion. La multinationale tente d’ailleurs de faire bouger les lignes : elle a co-écrit, avec une dizaine de grands groupes, une tribune visant à encourager d’autres entreprises à s’engager dans l’accompagnement des réfugiés, publiée en juin dernier. Et depuis, « nous avons été très sollicités par des associations et des entreprises qui souhaitaient adhérer ou participer à des rencontres avec des talents réfugiés », se réjouit Margaret Johnston-Clarke.

 

Dispositifs publics

Au-delà des entreprises, l’État tente également de faire progresser l’intégration des réfugiés dans l’emploi, avec le dispositif Hope notamment, lancé en 2017, et qui comprend une formation au français à visée professionnelle, une formation métiers via un contrat de professionnalisation ou un contrat de développement professionnel intérimaire, orientée vers les besoins non pourvus des entreprises, en plus des prestations d’hébergement et d’un accompagnement social. Par ailleurs, outre la création en 2018, de la Délégation à l’accueil et à l’intégration des réfugiés, qui s’est vue confier le pilotage de la mise en œuvre de la stratégie nationale pour l’intégration des personnes réfugiées, la réforme, en 2019, du Contrat d’intégration républicaine, conclu entre l’État et tout étranger non européen admis au séjour et voulant s’installer en France, a doublé le nombre d’heures dévolues à la formation linguistique à 400 heures et l’a même porté jusqu’à 600 pour les non-lecteurs et les non-scripteurs. Enfin, pour évaluer les politiques publiques, un rapport a été confié à deux députés, Stella Dupont (LREM) et Jean-Noël Barrot (Modem). Il a été présenté en septembre 2020. Les auteurs déplorent « une approche restrictive en direction des demandeurs d’asile », mais reconnaissent « des engagements volontaristes en faveur des réfugiés ». « Nous avons constaté que le fait d’augmenter le nombre d’heures d’apprentissage du français était une mesure qui portait ses fruits », indique ainsi Stella Dupont. De fait, « plus tôt les réfugiés accèdent aux cours de français, plus tôt ils ont la possibilité et la capacité de s’intégrer tant dans la vie de tous les jours que par le travail », ajoute l’élue, qui propose d’ailleurs que la formation linguistique soit davantage anticipée et que les cours puissent être déclenchés avant la décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

Enfin, la députée précise que ce n’est pas parce qu’un demandeur d’asile est débouté qu’un employeur ne peut pas solliciter, dans certains cas, un titre de séjour salarié pour lui. Mais « cette possibilité est souvent méconnue », regrette Stella Dupont. Quant au « brouillard statistique », selon l’expression employée par le rapport, qui entoure le nombre d’autorisations de travail accordées aux demandeurs d’asile et le taux de chômage des réfugiés, il empêche de juger de l’efficacité des actions engagées.

Le sens des mots

Un demandeur d’asile est une personne qui sollicite une protection internationale hors de son pays et dont la demande est en cours d’examen. Elle n’est pas autorisée à travailler les six premiers mois suivant l’enregistrement de sa demande.

Un réfugié est une personne ayant obtenu une réponse positive à sa demande d’asile. Selon la Convention de Genève du 28 juillet 1951, ce terme s’applique à toute personne « qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité, et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ». Le récépissé portant la mention « reconnu réfugié » et la carte de résident lui permettent de travailler en France.

Auteur

  • Natasha Laporte