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Le fait de la semaine

Les grands enjeux formation pour les RH pour 2022

Le fait de la semaine | publié le : 27.12.2021 | Irène Lopez

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Formation : Les grands enjeux RH pour 2022

Crédit photo Irène Lopez

 

Si 2022 sera, pour nombre d’entreprises, l’année de la reprise, encore faut-il l’aborder en étant en ordre de marche. Au-delà des recrutements et de la rétention des talents, pour les DRH, cela signifie avant tout former : au management, au travail hybride, au numérique…
 
Premier enjeu : le bon usage du numérique

"Ce n’est pas parce que nous maîtrisons les outils que nous en avons les codes", assène Mathilde Le Coz, DRH de Mazars. "Lorsque nous envoyons un message WhatsApp à 23 heures, si cela ne pose peut-être pas de problème dans la sphère privée, cela dit quelque chose de la sphère professionnelle…" En France, le cabinet d’audit, de conseil et de services aux entreprises compte 3 700 salariés dont la moyenne d’âge est de 29 ans. La génération des trentenaires a beau savoir utiliser les messageries digitales, comment doit-elle réagir à la réception d’un message d’un supérieur à 23 heures ? L’ignorer ou y répondre ? En général, les collaborateurs y répondent, de peur de se voir reprocher leur silence le lendemain.

Stress numérique, réunions en visio qui s’enchaînent, infobésité sont autant de défis pour les RH. "Ne sommes-nous pas rentrés dans une spirale infernale ?, poursuit ainsi Mathilde Le Coz. Dans toutes les organisations, je le constate, la machine s’est emballée." De quoi, chez Mazars, alerter l’équipe RH, consciente que ce stress peut être générateur de risques psychosociaux. L’un des enjeux 2022 pour le cabinet sera donc de former les salariés à une bonne hygiène numérique. Parmi les thèmes abordés lors des formations figureront des exemples précis, comme le nombre de personnes à mettre en copie d’un mail et le droit à la déconnexion.

Accompagner les collaborateurs dans le numérique fait aussi partie des enjeux d’Eurecia, une entreprise qui développe un outil SIRH. Les formations sont déjà en cours. "Cela peut paraître un comble pour une entreprise comme la notre, qui a développé l’application MyEurecia sur laquelle nous proposons à nos clients des services en ligne – obtenir son bulletin de salaire à tout instant, demander une attestation à son service RH ou badger en un clic… –, souligne Louise Robitail, la DRH, mais jusqu’à maintenant, nos tickets-restaurant étaient au format papier. Nous venons de passer à la version électronique. Nous simplifions nos process RH en les digitalisant." Certains salariés étaient d’ailleurs réticents face aux tickets restaurant digitaux. "Mais une sensibilisation et une formation ont levé ces obstacles", conclut-elle.

 

Deuxième enjeu : former des managers de qualité

Avec la fin du confinement et le redémarrage de la plupart des activités, le recrutement a été l’un des thèmes majeurs de 2021. Le cabinet Mazars n’y échappe pas. Quelque 1 400 embauches sont prévues en France en 2022. "Et c’est compliqué", avoue Mathilde Le Coz. L’entreprise dispose de 40 bureaux, à Paris et en régions, et conjugue présentiel et distanciel. La localisation n’est pas le problème… "C’est la qualité managériale qui l’est !", s’exclame la DRH. Pour elle, d’ailleurs, pas question de distinguer le management à distance du management "physique". "Il n’y a qu’un management, martèle-t-elle. Si le manager est bon, il le reste à distance. Tout est question de comportements – et non d’outils ni de process." Et si un manager est mauvais, le risque que certains salariés fuient l’entreprise est grand. La DRH en est parfaitement consciente. "L’entreprise ne séduit plus. Lorsqu’ils font face à un mauvais manager, les collaborateurs préfèrent devenir free-lance".

Mazars fait d’ailleurs aussi appel à ce type de prestations. D’autant que les tensions en matière de recrutement, déjà claires avant la crise sanitaire, se sont renforcées. "Nous ne trouvons pas de candidats pour nos postes en CDI. Nous devons faire appel à des indépendants si nous voulons être capables d’accomplir nos missions auprès de nos clients", dit-elle. Et évidemment, en position de force, ces cadres free-lance choisissent leurs missions et leurs employeurs… Mathilde Le Coz incite en conséquence les entreprises à travailler sur leur culture managériale. À l’image du numérique et du management, elle conseille aux entreprises des formations dans ce domaine, pour que leurs managers deviennent avant tout des "animateurs de communauté". La cohésion est à ce prix. "Il faut donner le goût de se retrouver, poursuit-elle. Les jeunes recrutés au début de la crise n’ont connu que le télétravail. Il faut leur expliquer ce que le collectif va générer comme richesse. Tous les aspects informels, tels que le rendez-vous à la machine à café, peuvent participer au sentiment d’appartenance." Au point que la création des liens sociaux dans l’entreprise reposera désormais sur les managers – qui devront composer avec la nouvelle charte sur le télétravail. Certains la trouvent "trop souple" et déclarent qu’ils n’osent plus, si un collaborateur reste travailler chez lui, lui demander de venir au bureau… À moins, évidemment, de pouvoir lui expliquer pourquoi sa présence est importante, dans le cadre du "travailler ensemble". Avec d’autres formations à la clé, dont celles qui apprennent à argumenter…

Le constat, chez Eurecia, est proche de celui du cabinet d’audit. Terminé, le manager qui donne des ordres. Louise Robitail a prévu une formation "Manager Ressource" qui fera des managers de véritables coachs pour accompagner les collaborateurs. En attendant, pour donner envie aux salariés de venir dans les locaux de l’entreprise, les dirigeants d’Eurecia ont choisi de leur offrir un cadre privilégié. Installé au sein d’un parc de 20 000 m2, à Castanet-Tolosan (Haute-Garonne), le "campus de vie" de l’entreprise ne ressemble en rien à des bureaux. Ruches, potager, terrain de volley, boulodrome, tout y est. Et l’entreprise a déjà été récompensée pour ses locaux. "Tous les midis, nous proposons des ateliers. Nous disposons d’une ludothèque en lien avec le CSE. Et chaque lundi, un collaborateur propose d’animer un jeu", énumère Louise Robitail. Atelier yoga, vide-dressing ou collecte de crayons pour une association en Afrique font partie des autres activités offertes aux 120 salariés d’Eurecia. Quarante personnes supplémentaires, en cours de recrutement, devraient également en profiter en 2022. "Grâce à ses activités, nous partageons autre chose que le travail. Et cela se répercute sur nos liens professionnels. Nous répondrons différemment à un collègue qui nous formule une demande. Nous nous investirons sûrement davantage auprès de lui, car nous avons déjà partagé quelque chose ensemble", conclut la DRH.

 

Troisième enjeu : apprendre à communiquer

Les salariés d’ADP, éditeur de logiciels et de solutions en gestion de paie et RH, ont été particulièrement affectés par la crise sanitaire, ne serait-ce que parce que près de 7 000 textes de loi, produits en quelques mois, devaient être interprétés puis paramétrés pour que la paie des salariés de leurs clients les reflète si nécessaire. "La paie doit prendre en compte le chômage partiel ou les arrêts de travail pour enfants malades. Du fait que les mesures n’ont cessé d’évoluer au cours de la pandémie, la charge de travail des 2 100 collaborateurs d’ADP France a été très lourde", souligne Élodie Gourmellet, la DRH. Des horaires à rallonge, du stress… Les dirigeants devaient motiver les salariés. Pour cela, ils ont donné du sens au travail des collaborateurs. Comme celui de fournir une paie en temps et en heure aux clients, en particulier à ceux qui souffraient en étant en première ligne dans le secteur de la santé ou la distribution des produits de première nécessité.

Pour plus de sens encore, une fois par semaine, le PDG d’ADP prenait la parole pour informer les salariés des nouveaux contrats signés, du nombre de bulletins de paie délivrés, de l’évolution de l’activité de l’entreprise. "En octobre 2021, nous avons déposé un million de bulletins de salaire dans des coffres digitaux, s’enthousiasme Élodie Gourmellet. Cela a donné de la fierté à tous les salariés et des réponses à ceux qui se demandaient pourquoi ils se levaient le matin pour aller travailler dans le salon ou dans la chambre de leur enfant…" La communication interne, enjeu primordial en 2021 chez ADP, continuera de l’être en 2022. Et des formations seront mises en place pour la développer à tous les échelons de l’entreprise.

 

Quatrième enjeu : les budgets formation

Face à tous ces enjeux, les entreprises vont-elles accroître leur budget formation ? Pas forcément, car certaines formations pourront être dispensées en ligne. C’est le cas des cours sur la cybersécurité prévus en 2022 chez Mazars. "Alors qu’avant la crise, l’espace de travail était défini par l’entreprise, aujourd’hui, chacun décide du lieu où il travaille le mieux, relève Mathilde Le Coz. Si c’est en dehors de l’entreprise, comment assure-t-on la sécurité des données ? Nous avons prévu plusieurs formations pour sensibiliser nos collaborateurs. L’e-learning sera le format privilégié. Il permet de faire des économies d’échelle."

Cela dit, les budgets formation pourraient augmenter, puisque certaines ne sont efficaces qu’en présence d’un formateur et de l’équipe formée. Or les formations en présentiel sont plus onéreuses que l’e-learning. La présence physique est notamment nécessaire pour les sessions qui ont trait aux enjeux de management. Les DRH choisiront sans doute, en fonction des besoins, un modèle hybride. "Nous nous sommes rendu compte que les sessions de formation de 7 heures, enfermés dans une salle, n’étaient plus d’actualité", note Élodie Gourmellet. Le projet de formation d’ADP pour 2022, intitulé "Apprendre autrement", vise ainsi à passer d’une logique de formation à une logique d’apprentissage continu, avec un mix de cours à distance (petits modules digitaux) et de lien individuel avec le formateur. "Ce sera lui qui, à des moments-clés de la formation, vérifiera que l’apprenant pourra passer au niveau suivant", explique-t-elle.

Alors qu’en 2022, l’agilité – pour réagir, changer de cap, innover – sera plus que jamais au cœur de la stratégie des entreprises, les RH ont appris. Ils ont même une longueur d’avance. La crise leur a apporté, de gré ou de force, la flexibilité nécessaire pour l’identification des bons supports et des contenus adéquats…

Auteur

  • Irène Lopez