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Sur le terrain

Inclusion : Les transports collectifs québécois misent sur la diversité

Sur le terrain | publié le : 07.02.2022 | Ludovic Hirtzmann

À force de politiques volontaristes, parfois contraignantes, la diversité est devenue une réalité au Québec. La Société des transports de Montréal (STM) est un modèle du genre.

Au Canada, pays qui accueille quelque 400 000 immigrants par an, les minorités visibles forment une part de plus en plus large de la population. Au Québec, Montréal n’a ainsi jamais été aussi multiculturelle. Les minorités visibles y constituent 31 % de la population, en forte hausse ces dernières années. Et si, dans le privé, les politiques de diversité et d’inclusion sont encore timides, dans le public, elles sont extrêmement dynamiques.

C’est particulièrement le cas de la Société des transports de Montréal (STM). Sa clientèle étant multi-ethnique, embaucher des chauffeurs appartenant aux minorités lui permet d’être plus représentative, selon la direction. D’ailleurs, en vertu d’un plan d’accès à l’égalité à l’emploi dont les débuts remontent à 1987, 25 % des recrutements annuels d’agents et de chauffeurs doivent provenir des minorités ethnoculturelles visibles. Considérant la diversité « comme une véritable richesse », la nouvelle vice-présidente du conseil d’administration de la STM, Laurence Parent, a récemment invité les minorités visibles à postuler à la STM. Au point qu’aujourd’hui, 36 % des 10 700 salariés sont issus des « minorités ethniques, visibles et autochtones », selon l’expression consacrée, contre 24 % des effectifs en 2015.

Un programme centré sur l’inclusion

La STM a également rédigé une déclaration de la diversité et de l’inclusion. Isabelle Tremblay, porte-parole et conseillère corporative de la STM, indique ainsi que la société dispense une « formation interne destinée aux collaborateurs et aux managers sur les mécanismes qui influencent les perceptions et mènent au racisme et à la discrimination. Une soixantaine d’experts RH et une trentaine de constables spéciaux (vigiles) ont récemment reçu des formations conçues par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec (CDPDJ), dans le cadre d’un programme centré sur l’inclusion au travail des personnes immigrantes ». Elle précise également que « sur le portail intranet de la STM, où se retrouvent les informations destinées aux managers, nous mentionnons des astuces pour une communication efficace dans un contexte de diversité et des trucs pour favoriser la mixité dans les milieux ». Après tout, la Charte québécoise des droits et des libertés de la personne garantit depuis 1976 ces droits « sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge ».

Reste qu’à la STM, cette diversité est très largement masculine, l’entreprise n’employant que 24 % de femmes. Ce qui ne l’empêche pas de recevoir des félicitations… « La STM est un modèle remarquable qui a fait ses preuves, parce qu’au fil des ans, la direction s’est investie et a fait des programmes d’accès à l’égalité en emploi une priorité », a ainsi déclaré CDPDJ, chargée depuis 2001 de veiller à l’égalité d’accès à l’emploi dans les organismes publics, dans un récent communiqué.

Un « Blanc » encore à la tête

Et reste enfin que si les minorités visibles représentaient bien 52 % de l’effectif embauché en 2020 par la STM – au point de devenir dès lors des « minorités majoritaires » ! –, cette diversité ne se retrouve pas à tous les niveaux de l’entreprise. Certes, selon Isabelle Tremblay, « 42 % du groupe est composé de chauffeurs de bus et d’opérateurs de métro », dont ceux issus des minorités visibles, le président du conseil d’administration, Éric Alan Caldwell, lui, est un « Blanc », tout comme l’était son prédécesseur, la majorité des administrateurs du CA et le directeur général de la STM. Ce dernier perçoit un salaire de 452 000 dollars canadiens par an (quelque 317 000 euros), une rémunération bien plus élevée que celle du Premier ministre du Québec – et bien difficile à abandonner pour privilégier un DG issu de la diversité…

En outre, ces politiques ont leurs limites, les nouveaux embauchés se faisant parfois reprocher par leurs collègues d’avoir été choisis parce qu’ils font partie d’une minorité visible. Et ces politiques de priorisation ont également d’autres impacts, surprenants. Ainsi, les immigrants japonais ou hongkongais, généralement plus fortunés que les autres, bénéficient, alors qu’ils n’en ont pas forcément besoin, d’une discrimination positive en raison de leur couleur de peau. Enfin, non sans ironie, à Vancouver, les employeurs originaires de la très large communauté hongkongaise, moteur économique de la région, demandent, eux, toujours à leurs candidats de parler cantonais ou mandarin !

Auteur

  • Ludovic Hirtzmann