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Le fait de la semaine

Emploi : Le contrat d’engagement jeune est lancé

Le fait de la semaine | publié le : 28.02.2022 | Lucie Tanneau

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Emploi : Le contrat d’engagement jeune est lancé

Crédit photo Lucie Tanneau

À partir du 1er mars, le contrat d’engagement jeune remplacera la garantie jeunes. Il prévoit un accompagnement intensif des jeunes par les conseillers des missions locales ou de Pôle emploi et une allocation pouvant aller jusqu’à 500 euros. Une « petite révolution » pour le directeur de Pôle emploi.

Le décret n° 2022-199 du 18 février 2022 relatif au contrat d’engagement jeune (CEJ) a été publié au Journal officiel, confirmant ainsi sa mise en œuvre à peine dix jours plus tard, le 1er mars. Annoncé en novembre dernier, le CEJ remplace la garantie jeunes, lancée en 2015 et dont l’efficacité a été saluée par la Cour des comptes – fait assez rare pour être souligné… En pratique, il s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans (et 29 ans pour les jeunes handicapés) qui ne sont « ni en emploi, ni en études, ni en formation » et souvent hors de portée des institutions. Il prévoit un diagnostic de la situation générale du jeune, puis un accompagnement de 15 à 20 heures par semaine pendant une durée maximale de 12 mois (18 sous conditions). Les conseillers proposeront aux jeunes des « actions », à sélectionner dans une liste, comme refaire son CV ou renouveler une demande de logement. Une exigence remontée du terrain afin d’aider les jeunes les moins autonomes. En contrepartie de son propre engagement, le jeune pourra recevoir une allocation allant jusqu’à 500 euros maximum (pour un majeur rattaché au foyer fiscal de ses parents, non imposables). L’allocation ne peut pas être cumulée avec le RSA ou la prime d’activité, ni avec d’autres allocations, perçues dans le cadre du service civique, par exemple. Et elle pourra être supprimée en cas de non-respect du contrat.

Logique de droits et devoirs

Le contrat d’engagement jeunes va être proposé par les 900 agences Pôle emploi et les 1 400 missions locales, ainsi que par d’autres organismes publics ou privés, comme les Epide (Établissement pour l’insertion dans l’emploi) ou les Écoles de la deuxième chance.

Pour Jean Bassères, directeur de Pôle emploi, le dispositif est « une petite révolution ». Interrogé le 5 février dernier lors d’un événement au ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion visant à présenter le CEJ à l’ensemble des acteurs appelés à le déployer et réunissant plus de 5 000 personnes, il soulignait « un changement extrêmement important et sans équivalent au sein de Pôle emploi, sous la forme d’un accompagnement inédit, associé à une logique forte de droits et devoirs », telle que défendue par le président Macron lors de la présentation du dispositif. Jean Bassères en est convaincu : « Le CEJ est une opportunité – peut-être historique – de démontrer qu’un accompagnement réellement intensif, couplé à un fort encouragement du jeune et du conseiller qui l’accompagne (1 667 conseillers sont actuellement en formation au sein de Pôle emploi) va permettre de faciliter le retour à l’emploi et de réduire le délai d’accès à l’emploi, objectif ultime de la mesure », assure-t-il.

Immersion en entreprise

Dernière grande nouveauté inscrite dans le CEJ : la mise en ligne d’une application mobile dévolue aux jeunes et à leurs conseillers. Baptisée « Pass emploi » dans sa version initiale, l’application permet au conseiller et au jeune d’interagir via une messagerie instantanée et offre une prise de rendez-vous simplifiée, avec rappels afin de limiter l’absentéisme, souci majeur remonté par les acteurs de terrain. L’appli permet aussi d’orienter les actions et de suivre leur réalisation. Enfin, un moteur de recherche d’offres d’emploi (alimenté par toutes celles recueillies par Pôle emploi) est également disponible – avec la possibilité de postuler –, ainsi que de contrats d’alternance et de services civiques, mais aussi, et c’est une autre nouveauté, de périodes d’immersion en milieu professionnel (proposées par des entreprises qui se sont engagées à ouvrir leurs portes). « Pour que le CEJ réussisse, il faut que les entreprises soient hyper impliquées », soulignait Hervé Coué, directeur de l’École de la deuxième chance de Seine-Saint-Denis (93), lors de la présentation au ministère. Pour l’Union nationale des missions locales (UNML), au cœur du dispositif, ce changement de cadre par rapport à la garantie jeunes permet surtout davantage d’adaptations locales. « Le CEJ permet une plus grande ouverture vis-à-vis des partenaires », relève ainsi Christian Walter, président de la mission locale d’Issoire (Puy-de-Dôme) et administrateur de l’UNML. S’il souligne que les conseillers de Pôle emploi – « sans leur jeter la pierre » – auront peut-être « plus de difficultés à entrer dans cette démarche, puisqu’ils ont été formatés à proposer des emplois ou des formations », le CEJ, à ses yeux, « exporte » les manières de faire des missions locales vers d’autres acteurs. « Il faut partir du terrain pour arriver à quelque chose d’efficace, sinon nous allons perdre du temps et nous n’en avons pas à perdre », ajoute-t-il, pour conclure : « Le plus compliqué va être de prendre chaque jeune et de le faire entrer dans un planning personnalisé. » « C’est aussi le moment pour les entreprises de se remettre en cause et de proposer des choses différentes, car les jeunes ne sont pas seulement intéressés par le salaire, mais aussi par l’ambiance, les possibilités de formation… », insiste pour sa part Christian Walter.

Le CEJ, dont les premières signatures interviendront dans le mois précédant l’élection présidentielle, semble bien accueilli par ceux qui vont l’utiliser sur le terrain, malgré le retard de publication du décret qui a irrité les conseillers, notamment des missions locales qui se préparaient sans que l’appli ne leur ait été présentée, sans avoir reçu le kit de communication et « sans savoir si ce que les conseillers envisageaient correspondrait aux attentes gouvernementales », regrette une mission locale de Nouvelle-Aquitaine. Les syndicats, notamment la Fage (Fédération des associations générales étudiantes), la CFDT et la CGT, et certains candidats à la présidentielle sont plus réservés… Valérie Pécresse a ainsi dénoncé une « faute politique » et « une désincitation à l’apprentissage », jugeant que le « contrat d’engagement » allait maintenir les jeunes dans l’assistanat – comme un RSA jeune qui ne porte pas ce nom.

Le contrat d’engagement jeune représente un investissement de 2,6 milliards d’euros, qui entrent dans les 5,4 milliards de budget du plan « 1 jeune, 1 solution ». Il devrait permettre de suivre 400 000 jeunes cette année, puis 500 000 les années suivantes.

Auteur

  • Lucie Tanneau