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Droit du travail : Une loi sévère, mais qui comporte des exceptions

Le point sur | publié le : 10.10.2022 | N. L.

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Droit du travail : Une loi sévère, mais qui comporte des exceptions

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Aucun salarié, stagiaire ou candidat à l’embauche ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire au travail en raison de son apparence physique. Décryptage.

Les employeurs ont intérêt à se pencher sur le sujet : selon l’article L. 1132-1 du Code du travail, aucun salarié, aucun candidat à l’embauche et aucun stagiaire ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de son apparence physique. Et le législateur a vu large, puisque la notion d’apparence physique correspond non seulement à l’ensemble des caractéristiques physiques ou corporelles visibles, mais aussi à des éléments liés à l’expression de sa personnalité – tenues, accessoires vestimentaires, coiffure, barbe, piercings, tatouages, maquillage… Ainsi, « on ne peut pas écarter une personne d’un processus de recrutement ou de nomination pour des raisons liées à son apparence physique, de même qu’on ne peut l’écarter d’un stage ou d’une formation, la sanctionner, la licencier ou lui imposer une mesure qui serait discriminatoire de manière directe ou indirecte, que ce soit en matière de rémunération, d’intéressement, de distribution d’actions, de formation, de reclassement, de qualification, d’affectation, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat », indique Emmanuelle Destaillats, avocate spécialisée en droit du travail, droit de la sécurité sociale et de la protection du travail et fondatrice du cabinet Siléas, à Bordeaux.

Sanctions civiles et pénales

Le risque ? Par exemple, dans le cadre d’un licenciement d’un salarié pour motif discriminatoire lié à son apparence physique, la sanction est la nullité du licenciement. « Le salarié peut être réintégré et s’il ne veut pas être réintégré ou que sa réintégration n’est pas possible, l’employeur peut être condamné à des dommages et intérêts qui ne peuvent être inférieurs à six mois de salaire. Et pour des candidats qui auraient été écartés du processus d’embauche pour des raisons discriminatoires, la sanction passera là aussi par des dommages et intérêts. Ils ont un délai de cinq ans pour agir en justice », poursuit-elle. Par ailleurs, les entreprises s’exposent également à des sanctions prévues par le Code pénal. Ainsi, pour les personnes physiques, trois ans d’emprisonnement et une amende qui peut aller jusqu’à 45 000 euros, tandis que, pour les personnes morales, celle-ci peut aller jusqu’à 225 000 euros. Les personnes morales peuvent en outre être placées sous surveillance judiciaire pendant cinq ans voire plus, condamnées à l’affichage du jugement, et à la fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans de l’établissement.

Exemples de jurisprudence

Parmi les exemples de jurisprudence, celui concernant une entreprise de sécurité, où le fait qu’un salarié portait une barbe était considéré par son employeur comme une provocation politique et religieuse – sans toutefois avoir procédé à une justification objective de son appréciation. Dans un arrêt du 8 juillet 2020, la Cour de cassation a estimé que le licenciement de ce salarié était discriminatoire. Néanmoins, des exceptions existent. « L’employeur peut prendre en compte des critères liés au physique ou à l’apparence physique à condition que ce soit pour des motifs objectifs et proportionnés au but recherché. Par exemple, pour des motifs liés à la sécurité, à l’image de marque de l’entreprise ou à des mesures d’hygiène », précise maître Destaillats. C’est ainsi qu’une jurisprudence a justifié le licenciement d’un chef de rang qui portait des boucles d’oreilles et un piercing : c’était de nature à choquer une clientèle d’affaires et familiale de l’établissement. Autre arrêt dans ce domaine, concernant les mannequins, où il a été considéré comme justifié le fait d’imposer une taille spécifique. Emmanuelle Destaillats recommande donc de prévoir ces critères dans le règlement intérieur de la société.

Auteur

  • N. L.