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Les clés

Au secours du travail social

Les clés | À lire | publié le : 28.11.2022 | Irène Lopez

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Au secours du travail social

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Dans un propos hors norme et subversif, Christian Gauffer, psychologue et psychanalyste, crie haro sur le management actuel qui conduit au « désêtre social ». Analyse lucide et sans complaisance.

Selon Christian Gauffer, l’importance des protocoles, des procédures, des méthodes, des définitions de postes, de l’aménagement d’espace, des règlements et des normes techniques, sociales, commerciales s’est accrue de façon à directement participer à la déshumanisation du travail… « Les dispositifs liés aux objectifs, à la manière de faire ou à l’enrôlement des personnes dépersonnalisent le rapport au travail et au pouvoir, écrit-il. Ils empêchent de penser le travail, entravent la subjectivité et finissent par sortir le travail du champ politique, en individualisant et en standardisant les tâches. » Autant d’éléments qui participent à l’instauration d’un travail mort, désincarné. Dans les réorganisations des services et des directions, le terme optimisation du fonctionnement est employé sans limites depuis vingt ans : c’est un euphémisme issu de la novlangue managériale qui signifie faire plus avec moins de moyens, notamment moins de moyens humains, l’être humain étant considéré comme une simple variable logistique et financière.

La surcharge de travail endémique crée un effet de stress chronique et de fait, nuit à la santé des travailleurs. Personne n’y échappe dans la durée. Le fait que tout le monde fasse semblant d’y arriver et de réaliser du bon travail génère en outre une forme de complicité qui empêche toute disputation par rapport au travail réel et toute remise en question des consignes et pratiques managériales de la direction. Résultat : les salariés se protègent et se replient sur eux-mêmes. Leur silence constitue une forme d’acceptation de la situation qui les rend complices de la direction. D’où l’absentéisme, le turn-over, les burn-out…

Le renouvellement des pratiques managériales est-il possible dans ces conditions ? Pessimiste, l’auteur déclare ne pas savoir « si le renouvellement significatif des pratiques managériales est possible » sans l’affirmation claire de ce qui constitue le bien commun et le bien public, ainsi que les fondamentaux souhaités, « tant l’argent, les règles qui y sont liées et la cupidité gangrènent les relations professionnelles et sociales. »

Heureusement, il propose des pistes d’innovation ! « Il importe de redonner sa dimension politique au travail et de former les salariés en ce sens. Le travail est un lieu de vie et doit faire partie de l’espace démocratique », dit-il.

Pour lui, les salariés doivent pouvoir davantage peser sur les orientations stratégiques de l’entreprise. En outre, un comité de direction doit pouvoir être révoqué s’il ne représente plus la majorité des salariés. Enfin, le manager a une responsabilité politique et humaine dans ses fonctions. Il ne peut restreindre son champ de vision à une dimension gestionnaire et financière. Un ouvrage qui devrait devenir « une référence », autant pour les travailleurs sociaux que pour les cadres.

Auteur

  • Irène Lopez