logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Le grand entretien

« Il faut montrer aux DRH que la formation ne touche pas que les partenaires sociaux »

Le grand entretien | publié le : 16.01.2023 | Benjamin d’Alguerre

Image

« Il faut montrer aux DRH que la formation ne touche pas que les partenaires sociaux »

Crédit photo

Organisée par Centre Inffo, l’Université d’hiver de la formation professionnelle (UHPF), le grand rendez-vous des acteurs du secteur, rouvre ses portes en 2023. Le sujet des transitions professionnelles et de la transformation des métiers sera au cœur des débats de cette première édition cannoise. Pascale Romenteau, directrice générale de Centre Inffo, en détaille les enjeux.

Après trois années d’absence dues à la pandémie, l’UHFP revient, du 25 au 27 janvier prochains, à Cannes. Quels seront les enjeux de cette édition ?

Le principal enjeu pour le monde de la formation, c’est avant tout de se retrouver. Il existe une véritable attente, car l’UHFP permet aux acteurs d’échanger entre eux, mais aussi d’entendre les messages passés à la filière à l’occasion des séances plénières, notamment celui, introductif, de Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnels auprès du ministre du Travail, qui ouvrira l’évènement. Le choix de transférer, pour cette nouvelle édition, l’Université d’hiver de la formation professionnelle de Biarritz à Cannes a été une décision (un peu contrainte) de mon prédécesseur, Patrice Guézou, et je l’approuve. Avec près de 1 500 invités attendus, Biarritz ne nous offrait plus la possibilité d’organiser l’entièreté de l’Université dans un seul lieu. Cette année, ce sera donc le célèbre Palais des festivals et des congrès de Cannes qui accueillera l’évènement. Dans un cadre magnifique, le Palais est attrayant, pratique et convivial. Par ailleurs, la capacité hôtelière de la ville nous permettra de recevoir au mieux participants et intervenants.

Quels seront les grands sujets à l’agenda de cette Université d’hiver ?

La question des transitions sera au cœur de cette édition. Transitions professionnelles, bien sûr, mais aussi industrielles, climatiques ou énergétiques… qui auront – et ont déjà – un impact significatif sur la transformation des métiers. Et là, on touche le point central de ce que représente la formation professionnelle de façon très concrète. Comment, par exemple, former sans délai les techniciens isolateurs qui interviennent pour régler le problème devenu crucial des passoires thermiques ? Et comment accompagner tous les publics à mieux entrer dans ces transformations ? L’Université sera rythmée par un certain nombre d’évènements, comme le dialogue entre le numéro 1 de l’Unsa, Laurent Escure, et son homologue de la CPME, François Asselin, modéré par Michel Yahiel, directeur des politiques sociales à la Caisse des dépôts et consignations et ancien conseiller social de l’Élysée sous François Hollande, ou une conférence inaugurale à deux voix, sur les compétences nécessaires aux transitions, assurée par la philosophe Cécile Renouard, présidente du Campus de la transition, et Jean-Claude Pats, directeur du personnel du groupe Michelin.

Les dernières évolutions en matière de réglementation de la formation et notamment les ajustements du CPF seront-elles également au programme ?

Oui, certains sujets « chauds » – comme tout ce qui tourne autour du CPF, de la contribution des entreprises au financement de la formation et de la régulation du marché de la formation – feront évidemment partie du programme des 64 ateliers et tables rondes qui se dérouleront sur ces trois jours. Nous y accueillerons notamment tous les acteurs publics intervenant sur la formation professionnelle (le ministère du Travail, la DGEFP (Direction générale à l’emploi et à la formation professionnelle), Pôle emploi, France compétences…). Carole Grandjean devrait notamment présenter ses projets concernant la « VAE inversée », parcours hybride mêlant montée en compétences et validation des acquis de l’expérience.

Justement, l’une des critiques récurrentes envers l’UHFP porte sur son caractère très institutionnel. Ces dernières années, des tentatives avaient été effectuées pour faire venir davantage de DRH ou de dirigeants d’entreprises à l’évènement. Comptez-vous inverser la tendance cette année ?

C’est vrai. La part des directeurs des ressources humaines parmi nos participants reste faible. Il faut davantage les toucher et mobiliser autour de notre évènement des partenaires tels l’Association nationale des DRH (ANDRH) ou l’Association française des entreprises privées (Afep), par exemple, afin de montrer que les questions de formation ne touchent pas que les institutionnels, les partenaires sociaux ou les prestataires de formation. Sans doute attendent-ils des manifestations très opérationnelles sur des sujets précis avec des ateliers « mode d’emploi, clés en main », pour répondre aux questions quotidiennes que se posent les entreprises. Depuis ma prise de fonction, en octobre dernier, j’essaie de les faire venir à cette édition 2023. Les délais sont sans doute trop courts. C’est un chantier de longue haleine auquel je compte m’atteler dès la fin de cette UHFP.

L’idée d’une UHFP annuelle avait été évoquée fut un temps. Est-ce toujours d’actualité ?

Non. C’est difficile de tenir ce rythme, pour une petite structure comme Centre Inffo qui ne compte que 70 collaborateurs, tous déjà extrêmement mobilisés sur l’organisation d’un tel évènement tous les deux ans. Ce sera bien sûr au conseil d’administration d’en décider, mais à titre personnel, je n’y suis pas très favorable. Par ailleurs, est-ce pertinent d’organiser une UHFP et de rassembler les acteurs du secteur si aucune actualité particulière – réforme ou annonces – ne le justifie ? En revanche, je souhaite que des évènements de plus petit format soient organisés plus ponctuellement. Une réflexion est engagée avec le codir sur ce sujet, afin de valoriser davantage l’identité de Centre Inffo.

Comment se positionne aujourd’hui Centre Inffo dans l’écosystème de la formation professionnelle ? Le spectre d’une fusion avec France compétences, brandi en 2019-2020, s’est-il éloigné ?

Cette hypothèse de fusion a énormément frappé les équipes et le conseil d’administration qui s’est beaucoup battu pour conserver la spécificité, la mission et la personnalité morale de Centre Inffo. La mission première de Centre Inffo est de rendre la réglementation sur la formation professionnelle compréhensible et accessible aux acteurs du secteur, et de les aider à la mettre en œuvre dans les meilleures conditions. Ce qui inclut les prestataires de formation, mais aussi les personnes qui sont formées. C’est donc une mission d’intérêt général qui nous est confiée par les pouvoirs publics. Pour réussir cela, nous faisons feu de tout bois, en mobilisant toutes nos compétences internes : presse, services juridiques, conseil, évènements, documentation… Un exemple : Centre Inffo s’est énormément mobilisé autour de la labellisation Qualiopi, désormais indispensable aux organismes de formation pour pouvoir prétendre percevoir les fonds publics ou mutualisés. La complexité de la démarche de certification constitue un vrai casse-tête pour nombre d’organismes. Cela restera un gros sujet en 2023, d’ailleurs.

Comment Centre Inffo peut-il toucher davantage le grand public ?

Jusqu’à présent, sa mission n’était pas de s’adresser au public final, mais de soutenir les décideurs et les professionnels du secteur. Cela ne nous empêche pas de réfléchir à des produits qui faciliteraient la diffusion de l’information jusqu’à un public élargi. Cela ne sera pas forcément facile pour une structure aussi petite que la nôtre.

Quels sont les chantiers qui vous attendent en tant que directrice générale de cette institution ?

Un travail de réforme va devoir être mené pour rendre l’organisation plus agile. Par ailleurs, notre situation financière est fragile. Mais je ne m’inquiète pas : l’association dispose, en interne, d’une énorme valeur ajoutée en termes de compétences. Toutes ces compétences seront mobilisées pour faire croître Centre Inffo.

Parcours

Ancienne élève de l’École nationale de l’administration (promotion 1996), Pascale Romenteau est inspectrice générale des affaires sociales (IGAS). Elle a fait l’essentiel de sa carrière dans la protection sociale. Conseillère technique de Martine Aubry au ministère de l’Emploi et de la Solidarité (1999-2001), elle avait en charge le dossier des accidents du travail et des maladies professionnelles. Elle a également dirigé le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) de 2018 à 2022, avant de devenir directrice générale de Centre Inffo en octobre 2022.

Auteur

  • Benjamin d’Alguerre