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Bonnes pratiques

Formation : Le bras frères veut susciter des vocations dans les metiers d’art

Bonnes pratiques | publié le : 01.07.2023 | Pascale Braun

Spécialisée dans la restauration de monuments historiques, l’entreprise lorraine s’est dotée de sa propre académie et espère initier un pôle de formation spécifique.

Reconstruire la charpente de Notre-Dame de Paris, tailler les pierres qui rénoveront le château de Villers-Cotterêts ou édifier des immeubles contemporains de grande hauteur en paille ou en bois ne s’improvise pas. « Les compétences de nos compagnons sont le bien le plus précieux du groupe. Lorsqu’ils nous rejoignent, c’est par passion. Il est donc important de faciliter leur venue et de leur offrir de bonnes conditions d’apprentissage », estime Julien Le Bras, président du groupe familial Le Bras Frères. Basée dans la Meuse, l’entreprise emploie 300 salariés dans ses ateliers de Jarny (Meurthe-et-Moselle).

Pour attirer de nouveaux talents, Le Bras Frères a ouvert, en 2018, entre ses ateliers et ses bureaux, un complexe d’habitation de 26 chambres meublées. Des compagnons, apprentis et élèves ingénieurs venus de la France entière s’y installent pour effectuer leur apprentissage dans l’entreprise. Une cohabitation inédite s’est ainsi instaurée entre élèves d’origine géographique et de niveau différents. Les parents des apprentis apprécient d’être déchargés de la recherche d’un appartement. Le réfectoire et les espaces communs permettent les échanges professionnels et amicaux. Le covoiturage entre jeunes facilite l’accès aux sites de formation théorique, au lycée professionnel voisin de Jarny, au CFA des métiers du BTP, à Montigny-lès-Metz, au CFA des Compagnons du Devoir à Muizon (Marne) ou dans des établissements universitaires nancéiens. Le centre d’hébergement s’est ainsi transformé en un véritable creuset qui contribue ensuite largement au recrutement : 80 % des apprentis accueillis restent chez Le Bras Frères à l’issue de leur apprentissage, contre 15 % choisissant de retourner dans leur région d’origine. Et l’entreprise indique un taux d’échec remarquablement bas de 4 % à 5 % pour les formations.

L’hébergement en interne ne suffit pourtant pas à répondre au manque de personnel, particulièrement perceptible dans les métiers du bâtiment. Continuellement en recherche de candidats, Le Bras Frères embauche volontiers à l’essai, sans autre formalité. Elle pose également des passerelles en direction des jeunes. Les enseignants du collège de Jarny connaissent désormais l’entreprise et ont accompagné au fil des ans 240 élèves lors de visites des ateliers ou de chantiers. L’entreprise invite volontiers d’autres sociétés ou des architectes pour expliquer aux jeunes les subtilités de la restauration de monuments.

C’est dans la formation initiale de jeunes recrues que Julien Le Bras place le plus d’espoir. « Il faut redorer l’image de l’apprentissage et celui des métiers d’art. Aujourd’hui, les jeunes intègrent souvent les CFA par défaut et trop d’employeurs ne les accueillent que pour la prime. Pour qu’un apprentissage réussisse, il faut que le jeune voie du concret, qu’il ait les yeux qui brillent à l’idée de restaurer un monument », affirme Julien Le Bras.

Hébergement intégré à la formation

Président de la Fédération du BTP de la Meuse, Mickaël Laurent soutient le projet d’un pôle national de formation aux métiers d’art en Lorraine. « On a voulu créer des CFA de proximité, mais certains d’entre eux sont mal adaptés et vieillissants. En Lorraine, nous avons les compétences et les moyens d’accueillir, de loger et de former les meilleurs de nos jeunes et de nos apprentis », affirme l’entrepreneur, par ailleurs détenteur de plusieurs mandats régionaux et nationaux à la Fédération française du BTP et à l’Union des métiers de la finition, de la plâtrerie et de l’isolation. Il observe que nombre d’entreprises créent leur propre académie pour remédier aux pertes de compétences et de qualité induites par le manque de qualification. L’instauration de passerelles entre l’Éducation nationale et les métiers d’art permettrait d’orienter les jeunes vers des métiers pérennes, exigeant des compétences à la fois manuelles et intellectuelles. La création d’un pôle d’excellence national suppose que les jeunes soient logés, nourris et rémunérés. « Plus que de moyens financiers pour créer un nouveau CFA, nous demandons un changement de statut. Il faut que les apprentis aient de quoi vivre et de quoi se déplacer », affirme Mickaël Laurent, qui plaide ce dossier à l’échelle régionale. Précurseur d’une démarche intégrant hébergement et formation, Julien Le Bras a quant à lui évoqué ce projet directement avec Emmanuel Macron, lors de la visite présidentielle sur le chantier de Notre-Dame de Paris, chantier emblématique des métiers d’art, en avril dernier…

Auteur

  • Pascale Braun