L’ultralibéralisme nord-américain n’a pas sa place au Québec. De fait, l’économie de la province francophone s’appuie depuis de nombreuses années sur les coopératives. « Le mouvement coopératif et mutualiste est une force économique particulière du Québec, qui n’a d’équivalent nulle part ailleurs en Amérique du Nord », précise à cet égard le Conseil québécois de la coopération et de la mutualité dans une étude. On y compte plus de 3 000 coopératives, présentes dans une quarantaine de secteurs, qui emploient entre 115 000 et 125 000 personnes. Des chiffres en forte progression depuis une décennie. D’ailleurs, le principal employeur québécois est une coopérative bancaire, le Mouvement Desjardins, dont les 58 000 salariés servent des clients fans de leur institution financière, fondée par Alphonse Desjardins en 1900. Autre objectif, au-delà des services bancaires : l’indépendance vis-à-vis du monde anglophone.

Aujourd’hui, une étude de l’institut de sondage Léger révèle que 61 % des 18-34 ans aimeraient travailler dans des coopératives. D’autant qu’elles sont moins touchées par les crises, n’ayant pas à répondre aux actionnaires. Et les salaires des dirigeants y sont moins élevés. Le PDG de Desjardins, Guy Cormier, a ainsi touché 4,9 millions de dollars canadiens en 2022 (3,3 M€), contre 13,5 millions pour son homologue anglophone de la Toronto Dominion.

Les coopératives sont aussi des modèles sociaux et de gestion RH. Desjardins a créé un bureau de l’équité, de la diversité et de l’inclusion, et nommé « une cheffe officier équité, diversité et inclusion pour assurer la cohérence du programme à travers toute l’organisation ». Les femmes ont toujours été majoritaires dans la gestion des caisses. Outre des programmes de mentorat, Desjardins a adopté en 2017 « une planification stratégique des talents ».

Le mouvement coopératif québécois se développe aussi à l’international. Depuis dix ans, Agropur, une coopérative laitière qui emploie 7 300 personnes et compte 2 800 membres actionnaires, a exporté son modèle en Ukraine, par le biais d’une coopérative située près de Lviv. Peu avant le début de l’invasion russe, le ministère des Affaires étrangères du Canada y a investi 3 millions de dollars, puis 2 millions cette année, pour terminer la construction d’une usine.