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Un marché de l’emploi en équilibre

Dossier | publié le : 01.05.2019 | Gilmar Sequeira Martins

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Un marché de l’emploi en équilibre

Crédit photo Gilmar Sequeira Martins

Si le marché de l’emploi des fonctions RH reste porteur et les rémunérations en progression, le niveau de satisfaction des jeunes diplômés est très contrasté. Le baromètre est au beau fixe, mais la vigilance reste de mise.

L’emploi dans les RH navigue en eaux calmes. Selon une étude conjointe de l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) et de l’Apec, diffusée en décembre 2018, le taux d’insertion des diplômés en RH est élevé. Deux ans après leur sortie de formation, ils occupent un emploi dans plus de neuf cas sur dix. Ce taux d’insertion atteint 93 %, se situant légèrement au-dessus de la moyenne de l’ensemble des jeunes diplômés (90 %). Ils trouvent aussi rapidement un poste, puisque 60 % ont déclaré avoir obtenu leur emploi en deux mois, voire moins, soit une durée identique à celle observée pour l’ensemble des fonctions.

Dans une écrasante proportion (88 %), les postes occupés par des jeunes issus des formations RH sont rattachés à la fonction ressources humaines. La gestion-finance-administration ne capte que 4 % des diplômés. Globalement, les recrutements en RH représentent 9 % du total des recrutements de jeunes diplômés (toutes disciplines et types d’établissements confondus, niveau bac + 5 ou supérieur) qui recherchent et qui trouvent un emploi en suivant des méthodes traditionnelles. Le premier moyen de décrocher un poste reste, en effet, la réponse à une offre d’emploi pour 40 % d’entre eux.

Les entrants dans la fonction RH sont très majoritairement issus de filières universitaires, et plus de la moitié des jeunes diplômés de niveau bac + 5 en emploi sont titulaires d’un diplôme en ressources humaines. Les sciences humaines ne représentent que 11 % des recrutements, la gestion 10 % et le droit 6 %. Les écoles d’ingénieurs fournissent une proportion marginale de recrues (4 %). L’étude menée par l’ANDRH et l’Apec constate « une importante proximité entre la discipline de formation et le métier exercé au début de la vie professionnelle ».

Moins d’accès au statut cadre

À noter, toutefois, que les jeunes diplômés RH sont moins souvent cadres ou en CDI lorsqu’ils intègrent l’entreprise. Ce statut n’est accordé qu’à 49 % d’entre eux (contre 70 % de l’ensemble des jeunes diplômés) et 65 % obtiennent un CDI (contre 72 % pour l’ensemble). Pour Pierre Lamblin, directeur des données, des études et de l’analyse à l’Apec, cette situation tient pour l’essentiel à ce que ces jeunes diplômés en RH proviennent dans leur écrasante majorité de formations universitaires… qui assurent un moindre accès au statut de cadre et à un contrat en CDI en début de carrière. Cet écart s’estompe cependant rapidement. « Trois à cinq ans après l’obtention de leur diplôme, la très grande majorité des jeunes diplômés, de niveau bac + 5 et plus, occupent un emploi de cadre et en CDI, et ce quelles que soient la discipline de formation et la filière », précise Pierre Lamblin.

Les jeunes diplômés RH irriguent l’ensemble des secteurs. Leur répartition reflète d’ailleurs la structure du tissu productif, puisque 67 % se dirigent vers les services et 23 % vers l’industrie. La part des PME de moins de 250 salariés dans le recrutement des jeunes diplômés RH, qui représente 31 % du total, est cependant moindre que pour d’autres fonctions. Pierre Lamblin y voit l’inévitable corollaire de la taille de ces structures : « La plupart du temps, le dirigeant a plusieurs casquettes. Le temps partagé pour disposer d’un spécialiste RH existe, mais il reste marginal car il faut partager des informations confidentielles, ce qui implique un haut degré de confiance. » Dans le futur, l’équation pourrait devenir plus complexe, note toutefois le spécialiste : « Du fait du poids croissant de la réglementation, le recours aux experts RH sera de plus en plus nécessaire. Mais les PME en auront-elles les moyens ? »

Du côté des rémunérations, les jeunes diplômés ne sont pas oubliés. Selon une étude de l’Apec de septembre 2018, fondée sur la base des promotions 2015 et 2016 et portant sur les salaires des cadres à l’embauche, le premier décile des cadres de la fonction RH perçoit une moyenne annuelle de 28 K€, la médiane s’établit à 35 K€ et le maximum à 45 K€. Toutes fonctions cadres confondues, ces niveaux de salaires s’établissent respectivement à 28 K€, 38 K€ et 53 K€. La rémunération annuelle brute moyenne des jeunes recrues dans la fonction RH se révèle malgré tout inférieure de 11 % à celle de l’ensemble des jeunes diplômés qui émargent, eux, à 31 400 euros. Les causes du phénomène sont à rechercher dans la nature de la fonction RH : elle ne figure pas sur le podium des départements offrant les émoluments les plus élevés, mais ce handicap peut être compensé par le secteur économique choisi. « La combinaison fonction/secteur peut faire évoluer les choses favorablement, en particulier dans la chimie et dans la pharmacie, des secteurs très rémunérateurs », précise Pierre Lamblin.

Pour Khalil Ait-Mouloud, responsable du département enquêtes de rémunération de la société de conseil Willis Towers Watson, en France, le marché se caractérise surtout par sa stabilité : « Dans la fonction RH, les rémunérations des bac + 3 (assistant RH, assistant de formation et chargé de paie) et bac + 5 (relations sociales, gestion de carrière, gestion de rémunération et avantages sociaux), qui intègrent les équipes RH, sont plutôt stables, dans une évolution en ligne avec le marché des autres fonctions support. » Certains paramètres peuvent jouer favorablement, note-t-il : « En début de carrière, les rémunérations dépendent essentiellement du diplôme et de la région, l’Île-de-France se situant dans la fourchette haute. Les bac + 3 peuvent prétendre à une rémunération annuelle fixe brute de 32 à 34 K€. Les bac + 5 peuvent commencer dans une fourchette annuelle brute de 35 à 38 K€ annuels. » Willis Towers Watson observe depuis trois ans une progression annuelle de 2,5 % des rémunérations des fonctions RH. « Cette progression la place en position médiane, indique Khalil Ait-Mouloud. Ce n’est pas une fonction en tension. »

Satisfaction pleine de contrastes

Willis Towers Watson note toutefois que les nouveaux entrants dans la fonction RH ne sont pas tous logés à la même enseigne : « Les plus favorisés sont issus des écoles de commerce. Viennent ensuite celles et ceux issus de certaines formations universitaires renommées. » Il observe aussi que les fonctions RH intègrent un nombre croissant de collaborateurs avec des parcours dans le management ou la finance : « Ces profils permettent de faire le lien avec les indicateurs financiers ou organisationnels. » Sans doute aussi de quoi favoriser, à terme, une hausse des rémunérations. Si pour l’instant le marché ne génère guère de tensions, Oualid Hathroubi, directeur de Hays Paris, appelle les recruteurs à la vigilance : « Aujourd’hui, y compris dans les fonctions support, le premier moteur de recherche d’emploi n’est pas le salaire, mais la qualité du poste et de l’ambiance. La marque employeur est devenue primordiale. L’essentiel des entretiens de recrutement tourne autour des thèmes de la QVT : responsabilité de l’entreprise, relations avec la hiérarchie et confiance. »

La filière a cependant toutes les chances de continuer à attirer de nouvelles recrues. Elle apporte en effet un niveau de satisfaction assez élevé. Selon l’étude conjointe de l’ANDRH et de l’Apec, plus de 80 % des diplômés en poste dans les RH se déclarent satisfaits, dont 25 % « très satisfaits ». Mais l’unanimité n’est pas de mise, puisque 20 % décrivent leur travail comme un « job alimentaire ». Une appréciation qui tient le plus souvent au fait que ces jeunes diplômés n’ont pas réussi à décrocher un emploi au niveau envisagé (cadre, par exemple) ou que la filière RH n’était pas celle qu’ils souhaitaient intégrer. Une analyse plus précise des points de satisfaction laisse apparaître un paysage contrasté. La politique de formation de leur entreprise satisfait ainsi en moyenne bien plus les jeunes diplômés RH que l’ensemble des autres jeunes diplômés (68 % contre 58 %). Au contraire, ils se montrent moins satisfaits que l’ensemble des jeunes cadres au sujet de l’ambiance de travail (79 % contre 87 %), de leur contrat (77 % contre 84 %) et de leur statut (72 % contre 79 %). « Ils sont moins satisfaits concernant le contrat et le statut, car ils sont moins souvent cadres et en CDI, estime Pierre Lamblin. C’est l’inverse sur la formation, car les collaborateurs des fonctions RH sont bien informés et donc satisfaits. » Pour l’heure, les besoins des entreprises sont donc pourvus et la satisfaction globale des recrues est au rendez-vous. Pour autant, attention à ne pas se laisser assoupir par des eaux trop calmes…

Auteur

  • Gilmar Sequeira Martins