Le président démocrate Joe Biden a choisi Julie Su, une fille d’immigrants chinois pour succéder à Marty Walsh, au poste de ministre du Travail. Lorsque ce dernier partira diriger l’association National Hockey League Players, la ligue professionnelle des joueurs de hockey, sa numéro 2, Julie Su, le remplacera… si bien sûr le Sénat, à majorité démocrate, lui donne son feu vert. Syndicalistes et économistes de gauche se félicitent de cette nomination. « Elle est faite pour cela, déclare Mary Key Henry, la numéro un du puissant syndicat SEIU (Service Employees International Union). Elle sait comment protéger et développer les droits des travailleurs modestes, ces immigrants et femmes de couleur qu’on a oubliés dans les lois sur le travail. »

Même son de cloche au laboratoire d’idées Center for American Progress (CAP) « Au moment crucial où les lois sur l’infrastructure, les semi-conducteurs et la lutte contre l’inflation deviennent réalité et se traduisent concrètement en construction de routes, ponts, usines et création d’emplois, personne n’est mieux équipé qu’elle pour s’assurer que les droits des travailleurs soient respectés dans cette économie que nous construisons », assure Mara Rudman, la vice-présidente du think tank.

« Julie incarne le rêve américain », s’est félicité Joe Biden en annonçant sa décision à la Maison Blanche. L’avocate quinquagénaire au CV impeccable n’a pas oublié ses origines. Elle a vu son père immigré, propriétaire d’une laverie, travailler dur. Du coup, lorsqu’elle achève ses études à Harvard et à Stanford, elle se met au service des petites gens. Julie Su est notamment connue pour avoir défendu 72 couturières thaïlandaises de Los Angeles qui étaient exploitées dans une « usine de la sueur ». La juriste n’avait que 26 ans à l’époque, mais elle a réussi à récupérer 4 millions de dollars d’arriérés de salaires et a inspiré la loi américaine anti-trafics de 2000 de lutte contre l’esclavage moderne.

Avant de monter à Washington, elle a fait carrière en Californie. Elle y a été commissaire du Travail puis ministre du Travail. Elle a ainsi mis au point une nouvelle manière de superviser le paiement du salaire minimum et des heures supplémentaires. Plutôt que de s’appuyer sur de rares inspections surprises dans les entreprises, elle a eu l’idée de s’intéresser d’abord aux plaintes des employés. Ce qui, aux dires de Mary Kay Henry, a rendu ses services beaucoup plus « efficaces ».

Elle est aussi connue pour avoir orchestré la protection des travailleurs essentiels en Californie en pleine épidémie de Covid-19. À cette époque bien sûr, elle a organisé le paiement des indemnités de chômage. Et aux yeux des élus Républicains du cru, la juriste n’a pas surveillé d’assez près la distribution de la manne étatique. Kevin Kiley, un élu du Grand Old Party en Californie l’accuse d’avoir envoyé plus de 20 milliards de dollars à des fraudeurs. La juriste reconnaît n’avoir pas été assez vigilante. Mais la négligence n’était pas uniquement californienne, tout le pays a profité de la généreuse aide du gouvernement de Donald Trump. Sans compter.

Aujourd’hui, la future ministre est prête à défendre l’agenda pro-syndicats de Joe Biden. L’ex-numéro 2 « connaît tous les recoins du ministère », se félicite Mary Kay Henry. Et elle est à l’écoute des plus modestes. « À tous les travailleurs qui peinent dans l’ombre, dit-elle, à tous ceux qui s’organisent pour qu’on les respecte sur leur lieu de travail, vous devez savoir que nous vous voyons, nous sommes avec vous et nous nous battrons pour vous. »

Aout 1995

L’avocate libère avec succès 72 couturières thaïlandaises enfermées dans une usine de la sueur.

2019

Elle devient ministre du Travail en Californie.

28 février 2023

Joe Biden la choisit comme future ministre du travail des États-Unis.