Avez-vous été harcelé.e? Oui, répondent 74% des salariés, dans une enquête de Qualisocial réalisée par l’institut Ipsos auprès de 2.000 salariés des secteurs privé et public. Un cinquième des sondés (15%) indique même avoir été victime de plusieurs situations de harcèlement. L’enquête révèle aussi que moins de la moitié des personnes (29%) s’estimant victimes de harcèlement en ont parlé à leur employeur. Parmi elles, plus de 7 sur 10 (71%) s’estimaient satisfaites de leur prise en charge. Le sujet manque pour le moins de repères clairs. Moins d’un cinquième des salariés (14%) déclarent enfin savoir ce qui relève du harcèlement.
La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (loi 2018-771 du 5 septembre 2018) a posé l’obligation, pour les entreprises employant au moins 250 salariés, de désigner un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Elle impose par ailleurs à tous les CSE, quel que soit l’effectif de la société, de nommer, parmi ses membres, un référent pour favoriser cette lutte. Un décret du 8 janvier 2019 est venu préciser que l’employeur est tenu de communiquer aux salariés l’adresse et le numéro d’appel de ces référents sur les lieux de travail, ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche.
Les entreprises respectent-elles leurs obligations? L’enquête de Qualisocial révèle que 44% des salariés déclarent ne pas être bien informés sur la thématique du harcèlement au travail, et seuls 14% se disent « très bien » informés à ce sujet. Une minorité plus importante (35%) dit bien connaître la législation sur le sujet. Aboutissement logique de cette situation: les trois quarts (73%) des salariés expriment une difficulté à « identifier avec précision » les situations de harcèlement au travail. En bout de course, l’enquête précise que près de la moitié des salariés (43%) dit avoir un niveau de connaissance « quasi-nul » sur le sujet. La situation des manageurs révèle un paradoxe: ils s’estiment mieux informés sur la thématique que les salariés, mais, lorsqu’ils sont soumis à des tests d'identification de situations de harcèlement, leurs performances sont inférieures à celles des salariés...
Qui sont les salarié.e.s les plus touché.e.s par le harcèlement? Les moins de 35 ans sont les plus affectés, puisque plus de 4 sur 10 (43%) déclarent avoir été victimes de harcèlement. Parmi les moins bien lotis figurent les salariés des petites entreprises de moins de 20 personnes (38%, contre 31%) et les femmes (38%, contre 31% pour les hommes). Plus intéressant encore: près de 4 manageurs sur 10 (36%) « pensent » avoir déjà été auteur de harcèlement. Sans surprise, une majorité franche (54%) de salariés estime que la dégradation des relations au travail est un enjeu prioritaire, et une majorité encore plus claire (63%) estime que le Gouvernement n’est pas assez actif sur le sujet.