logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

François Asselin (CPME) : « Pas de reprise en main de l’agenda social par les partenaires sociaux sans refondation du paritarisme »

Dialogue Social | publié le : 24.02.2021 | Benjamin d'Alguerre

La CPME se dit prête à emboîter le pas du Medef, qui propose un nouvel agenda social et économique en huit points* indépendant de celui fixé par l’État. Mais à la condition d’une « refondation » du dialogue social préalable qui replacerait les partenaires sociaux au cœur du dispositif. Entretien avec François Asselin, président de la CPME.

Que pensez-vous de la reprise en main de l’agenda social par les partenaires sociaux telle que l’a proposée Geoffroy Roux de Bézieux ?

François Asselin : C’est une bonne nouvelle. La CPME affirme que la décision publique doit s’appuyer sur les corps intermédiaires parmi lesquels les partenaires sociaux dans le cadre d’un dialogue efficace et productif. En 2019, nous avions d’ailleurs affirmé le principe d’une rénovation du dialogue social basée sur le tryptique « indépendance, responsabilité, transparence ». Lorsque nous avions soumis cette idée au Medef à l’époque, il n’avait pas donné suite. Il faut dire qu’à ce moment-là, le paritarisme n’y avait pas bonne presse. Aujourd’hui, la situation a changé et c’est tant mieux. Toutefois, nous pensons à la CPME que cette reprise en main de l’agenda social par les partenaires sociaux eux-mêmes ne pourra pas faire l’économie de la refondation d’un nouveau paritarisme car au fil des ans, le dialogue social est devenu un jeu à trois avec l’État, voire à quatre, avec l’Assemblée nationale. Nous avons accepté le mélange des genres et une clarification devient nécessaire. Le principe de subsidiarité doit retrouver ses lettres de noblesse. Si l’on veut que les citoyens acceptent les réformes, il faut que celles-ci aient été négociées avec transparence. Prenons l’exemple de l’Unédic, dont le périmètre s’est élargi aux solidarités – sujet qui relève de l’État – au-delà de la seule question de l’indemnisation des demandeurs d’emploi, compétence qui appartient aux partenaires sociaux. Il est nécessaire de clarifier qui décide quoi sous peine d’entretenir la confusion. Les partenaires sociaux devraient, par exemple, être libres de fixer une doctrine de la dette, voire une règle d’or, pour contenir les déficits de ce régime qui peut aussi facilement basculer dans le déséquilibre que revenir à l’équilibre. C’est ce qui se pratique par exemple dans la gestion paritaire de l’Agirc-Arrco où l’État n’intervient pas.

Les huit thèmes de discussions retenus par Geoffroy Roux de Bézieux vous paraissent-ils pertinents ?

F. A. : Oui, mais tant que nous n’aurons pas refondé le paritarisme, il sera difficile d’aborder les vrais sujets qui fâchent, comme les retraites ou l’assurance-chômage. Pour le reste, les choix du Medef sont pertinents, que ce soit sur la réforme de la justice prud’homale, sur une gestion paritaire de l’ATMP ou sur une évaluation de la réforme 2018 de la formation professionnelle qui fonctionne mal dans les PME. À cet agenda, nous souhaiterions d’ailleurs rajouter le sujet de la charge administrative liée à la fonction sociale des entreprises, qui croît de façon galopante. Il ne s’agit pas de vouloir bloquer le dialogue social dans les PME, ni d’y refuser la présence des IRP, mais de déterminer comment contenir ce surcroît de responsabilité administrative.

Pourquoi ce changement de braquet sur le paritarisme de la part du Medef qui, depuis 2018, y était plutôt opposé ?

F. A. : Je ne possède pas la réponse, mais j’imagine qu’à la lumière de la période que nous traversons, le Medef est revenu sur ses positions de départ. Durant cette crise, le dialogue social n’a pas si mal fonctionné. Les partenaires sociaux sortent de deux négociations (télétravail et santé au travail) délicates à mener et dont nous pouvons collectivement être tous satisfaits. Il n’est pas trop tard pour les partenaires sociaux de revenir sur le terrain.

* bilan de la réforme 2018 de la formation professionnelle, justice prud’homale, mise en place d’un organisme paritaire pour gérer la branche accident du travail/maladie professionnelle, gouvernance des groupes paritaires et de protection sociale, mobilité sociale, place de l'IA et transition écologique dans l'entreprise.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre