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Les entreprises votent pour le scrutin électronique

Les pratiques | publié le : 29.06.2010 | CÉLINE LACOURCELLE

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Les entreprises votent pour le scrutin électronique

Crédit photo CÉLINE LACOURCELLE

Rationnel, économique, rapide, souple : les DRH ne tarissent pas d’éloges sur le vote électronique. A l’inverse, les syndicats restent méfiants malgré un cadre juridique exigeant. Cette modalité de vote semble pourtant promise à un bel avenir.

Le bulletin papier glissé dans l’enveloppe à l’abri de l’isoloir serait-il en train de vivre ses dernières heures ? La question est légitime, à voir l’engouement des entreprises pour le scrutin électronique. Et ce ne sont ni les parlementaires à la veille d’adopter le projet de loi sur le dialogue social dans les TPE, organisant la représentativité syndicale notamment par voie électronique, ni Jacky Richard, conseiller d’Etat, auteur d’un rapport prônant la généralisation d’Internet pour les élections prud’homales, qui vont contrarier cette tendance.

Le concept a de quoi séduire. Il suffit à l’entreprise de louer le système de vote paramétré par le prestataire, et de distribuer aux votants un identifiant et un mot de passe avec lesquels ils se connectent pour accéder à une urne virtuelle, disponible 24 h/24, 7 j/7 si besoin, dans laquelle ils déposent un bulletin crypté. L’opération se déroule, au choix, sur les postes de travail, au domicile (entre 5 et 10 % des votes se déroulent en dehors du temps de travail) ou depuis l’entreprise via un odinateur isolé. Un e-accusé de réception prouve le vote et fait office d’émargement.

Exit l’installation des bureaux de vote, l’impression des bulletins et les longs dépouillements. Moins d’une heure a suffi à Jean-François Sornein, directeur du pôle RH et formation du Commissariat à l’énergie atomique (CEA), pour connaître le nom des élus des instances locales et centrales. Quelque 18 000 salariés étaient appelés à s’exprimer lors des élections de mars dernier. Moins chronophage, la formule s’est révélée deux fois moins coûteuse. Cette simplicité a aussi décidé Christophe Babarro, DRH d’Altergaz (65 salariés): « Le scrutin, organisé en juin 2009, a duré deux jours et une nuit avec un taux de participation dépassant 80 % », explique-t-il. Un score inédit pour ce DRH qui avait l’habitude, en d’autres lieux, de taux de 50 %. Même réussite au CEA avec près de 6 salariés votants sur 10 au premier tour quand, trois ans plus tôt, ils étaient un peu plus de 4 sur 10.

Verdict immédiat

Le verdict est immédiat puisque l’outil calcule automatiquement la représen­tativité. Un atout supplémentaire au lendemain de la loi du 20 août 2008, mais qui n’est pas sans questionner les syndicats, inquiets de la tournure que peuvent prendre des scrutins avec cet afflux de nouveaux votants.

D’une manière générale, les syndicats sont partagés sur le vote électronique. Certains estiment que le système demeure opaque : à charge donc, pour le prestataire, de rassurer sur son outil*. D’autres, qu’il est déshumanisant : « Il rend ce rendez-vous de démocratie sociale plus anonyme, en éloignant les salariés des bureaux de vote », critique Xavier Burot, secrétaire fédéral à la fédération CGT des sociétés d’études.

C’est justement pour ménager les représentants du personnel que la direction de Dassault Aviation expérimente le 1er juillet prochain, un vote électronique d’un genre particulier sur le site d’Argonay (500 salariés). « L’accord d’entreprise prévoit que le scrutin se déroule dans des bureaux de vote où des ordinateurs seront installés dans les isoloirs », explique Patricia Sevault, DRH adjointe. Une sorte de galop d’essai pour rassurer sur la fiabilité de la formule à quelques mois d’échéances électorales concernant, cette fois, les huit autres établissements.

Evolution inéluctable

Le vote électronique a également été introduit par étape au CEA « avec, en 2007, le maintien des isoloirs dans lesquels étaient placés les ordinateurs. Nous avons ensuite fait admettre le vote depuis le domicile des collaborateurs. Puis, lors du renouvellement des représentants des salariés au conseil d’administration en 2009, le scrutin électronique a couru sur 24 heures. Enfin, les dernières élections se sont déroulées sur trois jours », précise Jean-François Sornein, pour qui il est inconcevable de faire machine arrière.

* Un système de vote conforme doit garantir la sécurité, le contrôle et le secret du vote ainsi que le principe de non-répudiation (un bulletin ne peut être remplacé par un autre), d’unicité (un salarié ne vote qu’une fois) et d’intégrité des données (une redondance du système doit pallier les pannes).

L’essentiel

1 La simplicité de mise en œuvre et le coût réduit des systèmes de vote électronique séduisent les DRH chargés d’organiser les élections professionnelles.

2 Les syndicats critiquent l’opacité du système et le caractère déshumanisé qu’il impose à ce « rendez-vous de démocratie sociale ». Mais le Code du travail encadre très strictement cet exercice.

3 Certaines entreprises ont procédé par étapes en commençant par installer l’équipement électronique dans leurs bureaux de votes habituels, au sein de l’entreprise.

Auteur

  • CÉLINE LACOURCELLE