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Les pratiques

Le long combat des Fralib contre une fermeture annoncée

Les pratiques | Retour sur… | publié le : 19.04.2011 | SOLANGE DE FRÉMINVILLE

Après l’annulation du PSE par le juge le 4 février dernier, Fralib a engagé une nouvelle procédure en vue de fermer le site de Gémenos (Bouches-du-Rhône), qui emploie 182 personnes. La bataille entre la filiale d’Unilever et les syndicats de salariés dure depuis septembre 2010.

Le bras de fer continue. Le nouveau plan social dévoilé en mars dernier par Fralib, puis le rapport de l’expert du comité d’entreprise, Progexa, présenté le 4 avril, n’ont pas permis de déboucher sur une négociation : « Fralib et le groupe Unilever n’ont pas fourni les informations dont l’expert avait besoin pour éclairer le comité d’entreprise. Certains documents n’ont pas été donnés, d’autres étaient insuffisants ou ne constituaient qu’un leurre », dénonce Gérard Cazorla, élu CGT et secrétaire du CE.

Le 4 février 2011, à la demande des représentants du personnel, le TGI de Marseille annulait le premier PSE et exigeait que Fralib reprenne à zéro l’ensemble de la procédure. Le tribunal jugeait insuffisantes les informations économiques destinées à justifier la fermeture du site de Gémenos, mais aussi à apprécier les capacités financières dont disposent Fralib et le groupe Unilever pour le PSE.

« Les moyens mis en œuvre pour le plan doivent être proportionnels à ceux du groupe, souligne Amine Ghenim, avocat du CE. La nouveauté, c’est que le juge a demandé, pour contrôler la proportionnalité des moyens, que des informations soient fournies sur les autres PSE menés par Unilever. » Selon la CGT, syndicat majoritaire, qui s’appuie sur le rapport de Progexa, le nouveau PSE n’apporte toujours pas d’éclairage suffisant, à la fois sur la situation économique et sur ce qui a été mis en place pour éviter les suppressions d’emplois.

Chiffres contestés

Mais, depuis le 28 septembre 2010, date à laquelle elle a annoncé sa décision, Fralib persiste dans sa volonté de fermer le site de Gémenos, qui fabrique des sachets double chambre de thé et d’infusion. La société met en avant deux arguments majeurs : la perte de 20 % de parts de marché pour ces gammes de produits, dans un contexte concurrentiel renforcé par l’essor des marques de distributeurs ; et le fait que l’usine de Gémenos serait la moins compétitive des sites européens : « Ce site produit 23,6 % des volumes de sachets double chambre, mais représente 57 % des coûts d’exploitation des quatre usines européennes », selon la direction. Elle annonce une perte annuelle d’environ 11 millions d’euros.

Des chiffres contestés par les représentants des salariés : « Au plan économique, le projet de fermeture ne se justifie pas. Cela ne tient pas la route », selon Gérard Affagard, délégué syndical CFE-CGC. D’après les syndicats, qui s’appuient sur les rapports de Progexa, le site de Fralib demeure rentable, mais Unilever aurait concentré ses investissements sur les deux usines polonaise et belge qui produisent les sachets pyramides, son produit phare. Gémenos n’aurait bénéficié que de 5 % à 6 % des investissements.

Le sort des salariés du site aurait été réglé il y a quelques années, quand Unilever a renoncé à implanter de nouvelles lignes de production, puis a diminué les volumes produits par Fralib et réduit une première fois le nombre d’emplois : en 2007, une quarantaine de postes ont été supprimés. Au même moment, la filiale française était réduite à l’état de façonnier : le groupe Unilever a créé une société en Suisse, baptisée USCC, qui fournit à Fralib les matières premières, puis se charge de commercialiser les produits fabriqués. « La fermeture était programmée dans le cadre d’une stratégie arrêtée par le groupe », renchérit Me Amine Ghenim.

Un deuxième PSE aux mesures renforcées

Pour convaincre les salariés, la filiale d’Unilever a annoncé, dans son deuxième PSE, des mesures renforcées, notamment 42 postes réservés aux salariés de Fralib au sein du groupe (au lieu de 21), une enveloppe de 600 000 euros pour la formation professionnelle, neuf mois de congés de reclassement pour tous, jusqu’à douze mois pour les plus de 50 ans et les salariés fragilisés, des indemnités de reclassement externe (jusqu’à deux mois de salaire).

Mais, pour la CGT, le combat porte sur le projet de fermeture du site. « Depuis le début, on ne cherche pas à négocier le plan social, parce qu’on veut conserver nos emplois. Tout le monde sait la difficulté de trouver du travail dans cette région. Et les précédents reclassements au Havre et à Poitiers se sont mal passés », s’insurge Gérard Cazorla.

Les syndicats, qui par ailleurs multiplient les manifestations et les opérations de boycott, élaborent un projet alternatif pour une reprise du site industriel de Gémenos. Ils réclament les bâtiments et la marque Eléphant. Mais la direction de Fralib, qui ne possède pas le site et veut conserver la marque, s’y oppose. La dernière réunion du CE, prévue le 4 mai, promet d’être tendue, les syndicats n’excluant pas une nouvelle action en justice.

Auteur

  • SOLANGE DE FRÉMINVILLE