Ni génération sacrifiée ni tous fainéants, les jeunes d’aujourd’hui ne sauraient être mis dans un même panier générationnel tant leurs destins varient. Certains s’en sortent, d’autres non, et l’écart entre eux grandit inexorablement. Si les débuts sont souvent difficiles pour tous, ceux qui obtiennent un diplôme finissent par s’insérer dans la vie professionnelle, tandis que ceux qui n’en ont pas connaissent un destin beaucoup plus aléatoire qui peut les conduire vers une exclusion durable du monde du travail. L’absence de diplôme devient, en effet, un handicap de plus en plus insurmontable à mesure que les emplois peu qualifiés dans l’industrie tendent à disparaître. Cette situation porte en germe une menace de division sociale et de violence inquiétante pour l’ensemble du pays. Pour P. Cahuc, S. Carcillo, A. Zylberberg, économistes, et O. Galland, sociologue, la raison essentielle tient à un système scolaire davantage orienté vers la sélection que vers les apprentissages, et qui s’est, de fait, transformé au fil des dernières décennies en une véritable machine à trier.

Du côté de l’école, malgré les multiples réformes, rien ne semble vraiment aider les jeunes issus de milieux défavorisés, tandis que, côté travail, la seule création d’emplois aidés dans le secteur public s’avère coûteuse et peu efficace au long cours. Pour les quatre auteurs, les moyens mis en œuvre en faveur de la jeunesse sont à la fois insuffisants et mal orientés, puisqu’ils profitent d’abord à ceux qui ont le moins de problèmes et ne permettent pas d’aider les jeunes les plus en difficulté.

L’objectif de l’ouvrage est de tirer la sonnette d’alarme et surtout d’empêcher que cette situation soit prise pour une fatalité. Lutter contre suppose de remettre sérieusement en cause le principe de méritocratie sur lequel sont fondés tant l’école que le marché du travail.

La Machine à trier

P. Cahuc, S. Carcillo, O. Galland, A. Zylberberg, Eyrolles, 140 pages, 12 euros.