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La gestion des talents passe en mode collaboratif

Pratiques | publié le : 13.03.2012 | JOSÉ GARCIA LOPEZ

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La gestion des talents passe en mode collaboratif

Crédit photo JOSÉ GARCIA LOPEZ

Pour recruter, évaluer, favoriser la mobilité interne ou fidéliser les collaborateurs, les solutions de gestion du capital humain adoptent le mode Web 2.0 et s’ouvrent de plus en plus aux réseaux sociaux. Valeurs sûres pour les éditeurs, ces logiciels toujours en plus communicants gagnent doucement du terrain chez les DRH.

Des boussoles pour temps agités. « Le besoin d’informations exactes pour piloter les RH, retenir les talents et mobiliser les compétences clés se fait particulièrement sentir en période de crise », indique Xavier Daguzan, directeur général Europe de l’Ouest de HR Access. Jean-François Lansard, analyste au cabinet d’étude CXP, constate que les outils de gestion du capital humain font bien partie des défis actuels à relever par les DRH : « De la part des entreprises, il y a une forte demande d’outils qui permettent de recruter, évaluer, former, développer et rémunérer. »

Hélène Mouiche, analyste au cabinet Markess International, note que les enjeux immédiats des DRH portent surtout sur l’automatisation des processus administratifs RH. « La problématique de la gestion des talents se pose plutôt sur le moyen terme, car il faudra bien gérer la sortie de crise. » À brève échéance, les priorités portent sur des outils de contrôle de gestion sociale, confirme Grégory Luneau, directeur marketing en charge des offres RH chez ADP : « 32 % des 1 200 entreprises que nous avons interrogées en mai 2011 placent la gestion de la masse salariale en tête de leurs priorités, devant la formation pour 27 % d’entre elles. »

De fait, la dernière enquête de Markess International* pointe que seuls 12 % des décideurs RH déclarent aujourd’hui avoir déjà mis en place des solutions permettant de gérer les talents. Ils sont 26 % à l’envisager d’ici à 2014.

Le marché des logiciels et services dédiés à la gestion des talents – qui croît à un rythme annuel de 18 % ! – offre donc encore de belles perspectives aux fournisseurs de logiciels. De plus en plus intégrées, les suites modulaires proposées couvrent un large éventail de processus liés à ce sujet. D’après Patrice Barbedette, vice-président en charge des ventes stratégiques et des alliances sur la région EMEA chez Taleo, que ce soit pour le recrutement, les évaluations ou la gestion de la formation, les utilisateurs bénéficient d’une vue globale et cohérente grâce à une solution de ce type : « Une seule suite intégrée pour gérer le profil unique du salarié. »

Des logiciels communicants

Aux yeux de Xavier Daguzan, les entreprises ont intérêt à choisir des outils intégrés : « Cela leur permet d’échapper aux maquis applicatifs coûteux qui, de surcroît, fragilisent la fiabilité des données. » Les décideurs s’arrachent en effet les cheveux à devoir relier entre elles leurs différentes applications. Et malgré les difficultés techniques que cela suppose, ils sont nombreux à vouloir disposer de logiciels qui communiquent : « Le sondage que nous avons réalisé fin 2011 auprès de 250 entreprises révèle que 77 % des logiciels de gestion des talents ne sont pas intégrés au SIRH, et ne sont donc pas connectés avec les données administratives et la paie », déclare Travis Turnbow, responsable de l’offre talent chez Northgate Arinso (NGA).

Les solutions de gestion des talents sont de plus en plus externalisées et disponibles en mode locatif. Une formule dont la souplesse séduit les décideurs RH : « 90 % des demandes de nos clients sont aujourd’hui en SaaS », énonce Éric Gellé, directeur général de Lumesse France. Selon lui, avec le service à la demande, les entreprises s’affranchissent des contraintes techniques : « Le système est prêt dès le démarrage. Le projet, plus court, nécessite peu de développements. » Ce que confirme José Felix, DRH du groupe Aldes. L’entreprise de 1 400 salariés, spécialisée dans la ventilation, a équipé ses filiales à l’étranger avec le module recrutement de la suite Lumesse : « Le lancement de la solution n’a pris que deux jours pour chaque site », se réjouit le DRH.

Pour Jean-François Lansard, les solutions externalisées présentent un autre avantage capital : « Elles permettent de variabiliser les coûts d’exploitation », affirme-t-il. Ce que relativise Frédéric Grazzini, directeur management des compétences chez Sopra Consulting : « Sur le moyen terme, le SaaS ne se révèle pas si économique que cela. » À en croire José Felix, les trois premières années d’abonnement coûtent jusqu’à dix fois moins cher que l’achat d’un logiciel sous licence. « Mais la question de l’avantage économique se pose dès la quatrième année », estime-t-il. Le bénéfice majeur d’une application en mode SaaS reste, selon le DRH, la simplicité d’utilisation par rapport à certains ERP jugés trop complexes : « Si l’on passe plus de temps à expliquer le fonctionnement du produit qu’à l’utiliser, l’investissement initial est perdu. »

La rapidité d’appropriation d’un outil par ses utilisateurs est d’ailleurs un facteur clé du succès d’un projet d’informatisation RH. Stéphane Amiot, directeur général France de SHL, observe que « les solutions de gestion des talents, de plus en plus simples à utiliser, se rapprochent des applications grand public ». Elles permettraient ainsi de mieux intégrer dans l’entreprise la génération de jeunes collaborateurs férus de nouvelles technologies.

Utilisation des réseaux sociaux

En toile de fond, Xavier Daguzan identifie un enjeu de fidélisation des talents : « Il s’agit de proposer des environnements de travail en adéquation avec des applications dont les salariés disposent dans leur vie privée. »

Depuis ces deux dernières années, les éditeurs renforcent l’orientation Web 2.0 de leurs solutions. En particulier dans le domaine du recrutement, où les acteurs du marché ont noué des partenariats avec des sites comme Viadeo ou LinkedIn. Exemple de nouvelle fonctionnalité : les candidats peuvent maintenant postuler en utilisant leur profil de réseau social, sans avoir à remplir de formulaires. « Cela facilite l’identification et favorise les candidatures en ligne », souligne David Guillocheau, directeur associé au sein du cabinet Talentys. Les entreprises utilisatrices peuvent afficher des offres d’emploi sur les réseaux sociaux professionnels et se constituer un vivier de candidats. Éric Gellé considère ces sites comme de puissants leviers d’un recrutement qualitatif : « Les réseaux sociaux permettent de sourcer facilement des profils pointus. »

Autre tendance affirmée, la poussée des fonctions collaboratives dans les outils de gestion des talents. En témoigne par exemple l’émergence des annuaires enrichis par les collaborateurs eux-mêmes. David Guillocheau y voit une possibilité de recueillir des informations en provenance directe du terrain : « Les RH bénéficient d’une CVthèque à jour et les managers peuvent, de leur côté, identifier des compétences utiles à leurs projets. »

La Française des Jeux, dotée de la solution TalentSoft, incite ses salariés à devenir contributeurs en remplissant eux-mêmes leur mini-CV. Résultat : 85 % des salariés ont joué le jeu. « La preuve que les collaborateurs s’impliquent et qu’ils ont compris que cela leur serait utile dans leur carrière », commente Jessica Loizeau, chargée de développement RH.

Parmi les nouvelles offres du marché, la mobilité figure en bonne place. Sur leur tablette ou leur smartphone, les managers ont ainsi la possibilité de consulter la liste des postes à pourvoir, les mini-CV ou les entretiens individuels des salariés. Les outils dédiés à l’onboarding permettent, eux, de coordonner les activités liées à l’intégration des nouveaux embauchés à travers un portail spécifique. En “socialisant” les nouvelles recrues dès leur arrivée, ils répondent à des enjeux de fidélisation.

David Guillocheau insiste plutôt sur les nouvelles fonctions de pilotage prédictif proposées par les éditeurs : « Des indicateurs qui alertent les managers et les RH sur des actions prioritaires à mener – augmentations, mobilités… – peuvent aider à éviter la fuite de talents. »

Et Jessica Loizeau rappelle qu’en zone de turbulences, les entreprises ont un besoin accru de tableaux de bord : « La crise nous pousse à développer une stratégie d’anticipation et de fidélisation, afin d’éviter les pertes de compétences. »

L’ESSENTIEL

1 Seules 12 % des entreprises sont équipées d’outils de gestion des talents. Malgré la crise, ce chiffre devrait tripler d’ici à deux ans.

2 Grâce aux passerelles entre ces outils et les réseaux sociaux professionnels, les recruteurs ont accès à des viviers de recrutement. En interne, les employeurs disposent de CVthèques actualisées qui facilitent l’identification des talents.

3 Le retour sur investissement de ces solutions, toujours difficile à chiffrer, constitue le principal frein à l’équipement des entreprises. Le ROI constaté est plutôt d’ordre qualitatif.

Managers et collaborateurs en demande d’outils innovants

D’après l’étude* de Markess International, 50 % des collaborateurs et des managers attendent de leurs RH la mise à disposition d’outils innovants permettant d’être plus efficaces dans leurs missions quotidiennes. Les cadres mettent en avant des outils de gestion de compétences, facilitant l’accès aux informations à distance et en situation de mobilité, ainsi que des outils collaboratifs comme les réseaux sociaux d’entreprise…

* Enquête “Solutions en réponse aux nouveaux enjeux RH : collaboration, réseaux sociaux, dématérialisation, applications mobiles… – Perspectives 2014” réalisée de décembre 2011 à février 2012 auprès de 100 entreprises. Synthèse consultable sur <bit.ly/markessREFRH>.

Quel retour sur investissement espérer ?

« La difficulté à estimer le ROI et à justifier les investissements reste le premier point de blocage pour mettre en place des projets de gestion des talents informatisée », rapporte Hélène Mouiche (Markess International). « Les ROI des solutions de gestion des talents sont difficiles à quantifier d’un point de vue financier », reconnaît Jean-Marie Mozziconacci, directeur service clients d’ADP. Les bénéfices constatés sont plutôt d’ordre qualitatif.

Pour Alexandre Pachulski, directeur général produits de TalentSoft, « le recrutement est l’un des processus où il est le plus facile à démontrer ». « Depuis que nous utilisons notre application, nous avons constaté une réduction de 35 % des délais de nos recrutements », témoigne José Felix, DRH de la société Aldes.

Sylvain Letourmy, directeur chez OpenPortal, note que les outils informatiques améliorent les campagnes d’entretiens annuels : « Sous format papier, le taux de réalisation des entretiens plafonne à 60 %. Avec une solution dématérialisée, on est rarement en dessous de 80 %. » En 2011, à la Française des Jeux, ce taux a atteint 98 %…

Auteur

  • JOSÉ GARCIA LOPEZ