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Enquête

LA SANTÉ DES TRAVAILLEURS DES MINES EN OBSERVATION

Enquête | publié le : 17.04.2012 | ROZENN LE SAINT

Sous la pression associative et pour éviter des risques judiciaires, le spécialiste du nucléaire a créé des observatoires de la santé au Gabon et au Niger.

C’est une première en France dans le cadre des mines d’uranium : Areva est poursuivi pour faute inexcusable. La famille d’un ex-salarié d’une exploitation d’Areva au Niger, décédé en 2009 d’un cancer du poumon, est à l’origine de cette requête jugée au tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun. Serge Venel a travaillé de 1978 à 1985 pour la Cominak, une société de droit nigérien, filiale du groupe industriel français. Le jugement sera rendu le 11 mai. Areva rejette la responsabilité sur la Cominak, estimant ne pas être l’employeur direct de Serge Venel. Pour Jean-Paul Teissonnière, qui défend la famille de la victime, « c’est bien Areva qui détient le savoir-faire et la technologie des exploitations minières, et non la Cominak. D’ailleurs, quand le cancer a été reconnu comme maladie professionnelle par la Sécurité sociale, Areva a été désigné comme employeur ». L’avocat déplore « la constitution de sociétés écrans de droit étranger, qui vise à se débarrasser du risque et à se dédouaner des conséquences sur la santé des salariés ».

Bien que peu médiatisée, cette affaire, ainsi que la pression associative, ont mis Areva en difficulté et l’ont incité à améliorer ses pratiques. Alain Acker, directeur médical du groupe, admet que l’accord conclu en 2009 avec Médecins du monde et l’association Sherpa a été décidé après que ces ONG, ainsi que des associations d’anciens travailleurs et de protection de l’environnement comme la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad), ont pointé des défaillances sur l’activité minière d’Areva à l’étranger.

Une démarche inattaquable

« Nous avons été beaucoup interrogés sur nos pratiques ; nous avons donc décidé de mettre en place une démarche robuste, inattaquable du point de vue scientifique », explique-t-il. D’où la naissance de l’Observatoire de la santé pour les activités d’Areva au Gabon en 2009, puis au Niger en décembre 2011. Leur but ? Mettre en place une veille sanitaire des anciens travailleurs des mines et des populations voisines des exploitations. Au Gabon, 500 consultations ont été réalisées et, pour l’heure, aucune maladie professionnelle n’a été décelée. Si elles étaient détectées, Areva s’est engagé auprès de Médecins du monde et de Sherpa à prendre en charge les frais de santé. Au Niger, les consultations viennent de commencer, et deux cas d’anciens expatriés français requièrent des examens complémentaires pour déterminer si leur cancer intègre ou non le tableau 6 des maladies professionnelles. Areva a prévu un budget de fonctionnement de 300 000 euros pour ces deux observatoires, sans compter les éventuelles compensations en cas de pathologies liées aux mines d’uranium.

Du côté de Sherpa, Sandra Cossart, responsable du programme RSE, se félicite que ces accords concernent non seulement les expatriés, mais aussi tous les anciens travailleurs locaux des filiales à l’étranger. « Ces observatoires permettent de mettre Areva devant ses responsabilités et d’accompagner la société civile locale dans ses démarches », affirme-t-elle.

Démarche globale

Didier Fohlen, directeur RSE pour les sociétés minières d’Areva, souligne que ces initiatives s’inscrivent dans une démarche plus globale lancée depuis 2009 : « Nous avons formalisé des accords entre la société civile et les sociétés minières, et effectué des études d’impact concernant les aspects environnementaux, socio-économiques, sociétaux et santé, pour tous les nouveaux projets » au Niger et au Gabon, mais aussi en Namibie, au Canada, au Kazakhstan et en Mongolie.

AREVA

• Activité : nucléaire.

• Effectif : 47 541 salariés dans le monde.

• Chiffre d’affaires 2011 : 8,87 milliards d’euros.

Auteur

  • ROZENN LE SAINT