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Enquête

MIEUX INTÉGRER LE TRAVAIL RÉEL ET LA SÉCURITÉ

Enquête | publié le : 02.10.2012 | V. L.

L’équipementier automobile s’est approprié la méthode lean et a développé en parallèle des programmes pour prévenir les risques concernant la santé et préserver un vrai dialogue sur le travail avec ses opérateurs.

Ironie du sort, le site du groupe ACS à Bressuire (Deux-Sèvres) était destiné à disparaître il y a quelques années, mais c’est la maison mère Wagon Group qui a déposé son bilan en décembre 2008. L’entreprise spécialisée dans les produits de vitrage, les systèmes d’occultation et de maintien de charges pour les automobiles, grâce sa situation bénéficiaire, à ses innovations, à la spécificité de ses produits et au soutien de donneurs d’ordre comme PSA, a survécu à la crise de 2008. Elle fait partie, depuis 2009, de la joint venture RS Automotive et est implantée à l’international, en Espagne, en Chine, en Roumanie et au Mexique.

Impliquer les opérateurs

Avant de disparaître, Wagon Group avait décidé, en 2004, de déployer le lean dans toutes ses entreprises. « La démarche était alors très top-down : les théoriciens venaient nous expliquer ce qu’étaient les gestes justes et, au bout de trois jours, on pouvait gagner 20 % de productivité, témoigne Jean-Baptiste Quentin, le DRH. Mais notre directeur industriel, formé au lean management à l’Ecam Lyon, a été convaincu qu’on ne pouvait pas appliquer le lean sans impliquer les opérateurs. »

Appropriation des objectifs par la discussion

« À partir de 2010, l’entreprise a présenté sa stratégie, ce qui était totalement nouveau », se rappelle Laurent Motard, responsable adjoint à la production. « La direction industrielle fixe de grands objectifs en termes de qualité et de bien-être au travail, et ensuite une appropriation se concrétise à travers une discussion dans les équipes, indique Jean-Baptiste Quentin. Par exemple, chaque heure, la quantité de produits réalisée est notée sur un tableau, et si le manager constate qu’il y a un écart, il demande à l’opérateur ce qui se passe, afin de pouvoir l’aider. »

La formation des superviseurs a été centrée sur la capacité à écouter et, chaque jour, ils organisent une réunion de cinq minutes. Par ailleurs, un formateur est attribué aux lignes de production pour accompagner le développement de la polyvalence. Pour Patrice Bonnet, secrétaire du CHSCT, « le système fonctionne bien, car la communication est présente. Mais cela dépend beaucoup de la façon de manager. »

« Dans mon équipe, nous nous sommes fixé des objectifs réalisables tout en intégrant ceux de la direction », illustre Luc Pasquier, superviseur chef d’équipe d’une ligne de production. Pour un objectif de 390 pièces par jour, les opérateurs en ont réalisé 424. La direction serait-elle alors tentée de surenchérir sur les objectifs ? « Ils sont toujours inférieurs à ce que les opérateurs peuvent réaliser, car on doit tenir compte des aléas de la production », répond Isabelle Burvingt, responsable de la santé au travail.

Luc Pasquier indique également qu’une marge de manœuvre est laissée aux opérateurs pour sortir du standard : « Il existe de l’entraide et ils se régulent entre eux. » Chaque opérateur qui identifie une amélioration possible le signale sur un tableau. Quand le problème est résolu, il le valide. En outre, la participation des salariés est stimulée par un ”challenge d’amélioration continue” (Cac, dans le jargon maison): les opérateurs peuvent faire des propositions qui, si elles ne sont pas prises en compte, sont quand même rémunérées (10 euros). Lorsque l’idée est applicable, la somme perçue s’élève à 40 euros. Enfin, si elle procure à l’entreprise un bénéfice ou une économie importante, un pourcentage de la valeur engendrée sera calculé et restitué à l’opérateur. « 90 % de ces idées sont favorables aux conditions de travail, commente Isabelle Burvingt, car les opérateurs ne veulent pas se faire mal. »

Les standards définis pour le montage et l’assemblage des produits intègrent toujours des mesures de sécurité. Une précaution qui s’inscrit dans la lignée des politiques de l’entreprise en matière de santé au travail. Depuis 2008, elle est engagée dans une démarche de prévention durable des TMS avec l’Aract Poitou-Charentes, précédée en 2004 par un programme Safety first. L’entreprise ne recense pas de maladie professionnelle déclarée alors que la population est vieillissante. Son taux d’absentéisme est inférieur à 2 %.

Faire progresser la transmission des savoir-faire

Autre atout qui permet à l’entreprise de prêter attention aux conditions de travail : un bureau d’études intégré en interne. « Cela nous permet de faire intervenir des opérateurs dès la conception des postes de travail pour les nouveaux produits », se félicite Isabelle Burvingt.

Quels seraient toutefois les points d’amélioration et les faiblesses ? « Tous les managers n’ont pas encore la même sensibilité au sujet et notre système de management doit mieux intégrer le travail réel, estime Isabelle Burvingt. Nous devons aussi progresser dans la transmission des savoir-faire. » Autre point sensible, « l’incertitude des résultats à cinq ans sur les TMS ». Enfin, la responsable reconnaît la difficulté à valoriser les actions sur le bien-être et le confort de travail dans les tableaux de bord. Jean-Baptiste Quentin admet également que les services de production embauchent de nombreux intérimaires et que le risque de TMS a pu être reporté sur les services de maintenance et de logistique. Selon lui, il faudrait travailler à « détendre » les flux que ces services subissent.

ACS

• Activité : fabrication de produits de vitrage, systèmes d’occultation et de maintien de charges pour l’automobile.

• Effectifs : 300 salariés sur le site de Bressuire, 500 dans le groupe.

• Chiffre d’affaires 2011 : 71 millions d’euros.

Auteur

  • V. L.