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NORME QUALITÉLa lente certification des prestataires de formation

Pratiques | publié le : 30.10.2012 | VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE

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NORME QUALITÉLa lente certification des prestataires de formation

Crédit photo VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE

Moins de 100 organismes de formation sur 53 000 possèdent la certification NF Service formation professionnelle. Malgré l’avantage concurrentiel qu’elle procure et l’amélioration de la qualité de leurs services, le coût de la démarche reste rédhibitoire pour beaucoup.

Créée par l’Afnor en 1998, la certification NF Service formation professionnelle devrait dépasser, d’ici à la fin de l’année, la centaine d’organismes certifiés… C’est-à-dire très peu, au regard des 53 000 répertoriés en France. Validant une organisation centrée sur la satisfaction du client, cette norme (NF214) porte sur le traitement de la demande et de la commande, la conception du produit pédagogique, la préparation de la formation, sa réalisation et l’évaluation des résultats. « Le but est d’apporter de la visibilité et de la fluidité », témoigne Mélina Donzel, directrice de CFTP, organisme certifié (Saint-Vallier, Drôme). La NF214 « se distingue de l’ISQ-OPQF qui certifie, sur dossier, les moyens affectés et les compétences des formateurs, et de l’ISO 29990, centrée sur le management », explique Thomas Cornu, chef de projet à l’Afnor.

Pour Loïc Cordon, directeur adjoint d’Opcalia Rhône-Alpes, qui organisait en juin dernier une réunion d’information sur ce sujet, la certification NF Service « est une piste pour se démarquer des concurrents et pour se faire référencer ». Ce que les organismes ressentent parfois comme une quasi-obligation : « Nous sommes déjà agréés Veritas, Qualit’EnR, Qualipac, Qualibois, etc., mais je suis sûr qu’on ne coupera pas à la NF214 ! », lance Philippe Frouart, responsable du lycée des métiers Sainte-Claire (Sury-le-Comtal, Loire).

Jean-Marc Sidobre, directeur de Couzy Formation (Albi, Tarn), en cours de démarche, confirme : « Au vu du nombre de professionnels – dont des autoentrepreneurs – qui demandent l’agrément d’organisme de formation, la Direccte nous a informés qu’elle sera amenée à privilégier les certifiés. » Il ajoute cependant ne « pas croire beaucoup à l’impact commercial direct de la certification. Notre expérience de l’habilitation Caces nous a prouvé que l’intérêt est surtout la mise en place de procédures : cela demande du temps au départ, mais permet d’en gagner ensuite, sur la partie administrative notamment ».

Des stagiaires mystères à chaque session

C’est aussi ce qui a intéressé Bernard Martin, responsable qualité de l’Université de La Poste de la région Nord-Est, certifiée en décembre 2011 : « Bien que nous ayons un public presque captif pour l’instant, j’ai lancé cette démarche afin d’améliorer la performance de nos prestations. » Désormais, après chaque formation, des stagiaires mystères confirment ou pas qu’ils ont reçu la convocation en temps et en heure, que le formateur a transmis ses coordonnées, etc. « Les six autres universités de La Poste vont s’engager à leur tour dans le processus », assure-t-il.

Malgré ces retours d’expérience positifs, le nombre des certifiés n’augmente que lentement, à cause du coût de la démarche, rédhibitoire pour les PME. Outre le prix de l’audit de certification (puis de ceux de renouvellement) réalisé par l’Afnor, il faut généralement prévoir l’aide d’un consultant pour s’y préparer. Afin de lever cet obstacle, Agefos-PME monte des opérations collectives d’accompagnement depuis 2007 (lire Entreprise & Carrières n° 999 du 27 avril 2010) : une formation, en vingt jours (douze de regroupement et huit en individuel), d’une personne par organisme, assurée par l’Afdec (Association française de développement de l’emploi et des compétences). « Nous n’amenons pas les participants à la norme, mais à réfléchir à leur politique, commente Hubert Grandjean, dirigeant de l’Afdec. Ils deviennent pilote en management des organisations, option qualité en organisme de formation, un titre que nous venons de déposer au RNCP. »

Ces opérations ont permis la certification de cinq groupes de douze organismes en Rhône-Alpes, puis de neuf autres groupes en Ile-de-France et un en Alsace. Plusieurs autres sont en cours de formation. Selon les financements trouvés chaque année, dans chaque région, le coût restant à la charge de l’organisme, sur un montant total d’environ 12 000 euros, a été réduit à une fourchette variant de 500 à 2 000 euros, et l’Afnor a diminué le prix des audits. « Pour les quatre premiers groupes, il y avait un financement substantiel d’Agefos-PME, aux plans national et régional, commente Laurent Alexandrowicz, responsable du projet en Rhône-Alpes. Pour le cinquième, le FSE a participé, mais ce n’est pas acquis pour la suite. Nous devrons trouver d’autres solutions. »

Afin d’assurer la réussite de tous les participants, Agefos-PME refuse souvent des candidats, « surtout les organismes unipersonnels et ceux dont la création est trop récente, car il faut un minimum d’organisation, ajoute-t-il. Il faut aussi un engagement du dirigeant : il participe aux deux premiers jours de formation, libère son chef de projet dix-huit autres jours et lui permet de travailler, en intersessions, avec les autres salariés ».

Gagner du temps pour réduire les coûts

L’autre difficulté de la démarche, qu’elle soit individuelle ou en groupe, est le temps que l’organisme doit y consacrer, généralement évalué à l’équivalent d’un mi-temps pendant six mois. C’est pourquoi, début 2012, lorsque Opcalia Midi-Pyrénées a mis en place une opération collective d’accompagnement, il a préféré un programme plus court. Ce dernier, élaboré par Afnor Compétences, prévoit, sur un an, cinq jours en présentiel, trois jours de classe virtuelle et un jour d’audit à blanc. « L’outil de classe virtuelle et des modèles de documents qualité sont disponibles sur une plate-forme Internet, explique Mathilde Alarçon, chef de projet à Opcalia. C’est ce qui nous a intéressés, outre le coût réduit de 4 433 euros pour l’organisme. »

Trois sessions de six personnes sont en cours. En 2012, la Direccte et le FSE ont financé 45 % des parcours, ce qui a permis d’accueillir des organismes non adhérents à Opcalia. Le reste à charge (2 100 euros pour les premières sessions et 2 670 euros pour les suivantes) est entièrement financé sur le plan de formation de chacun.

Autre intéret de la démarche : la certification appelle la certification. « Une fois qu’on a commencé à se donner des procédures qualité, accéder à une autre norme ne nécessite presque aucun effort supplémentaire », affirme Hubert Grandjean, dont l’organisme, l’Afdec, affiche une triple certification ISO 9001, ISO 29990 et NF214.« Il n’est pas impossible qu’après la certification NF214, nous visions l’ISO 29990 », confirme le directeur de Couzy Formation.

Pourtant, face aux aléas économiques, toutes ces incitations restent insuffisantes pour nombre de TPE : « Dès 2007, j’étais allée à une réunion d’information d’Agefos-PME Rhône-Alpes, mais la démarche restait trop chère pour nous », témoigne Nathalie Damet, dirigeante de Micro Formation (Saint-André-de-Corcy, Ain). Elle est revenue s’informer en juin dernier – sans pour autant se décider – auprès d’Opcalia Rhône-Alpes. Ce dernier n’a pas pu monter d’opération collective, faute de candidats.

L’ESSENTIEL

1 Sur le marché concurrentiel de la formation, la certification peut offrir un avantage pour se démarquer, être référencé et obtenir un agrément.

2 La certification NF214 Service formation professionnelle de l’Afnor vise à valider une démarche globale d’amélioration des prestations.

3 Plusieurs Opca ont proposé aux prestataires de formation un accompagnement permettant de réduire le coût des audits. Mais il reste encore trop élevé pour de nombreuses PME.

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  • VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE