Devant l’importance des changements de notre environnement, on se demande parfois si le management des entreprises ne devrait pas également faire sa révolution.

Effectivement, les organisations sont en train de passer de l’entreprise mécaniste au modèle biologique. Au lieu d’être pyramidale, la structure s’organise en réseau ouvert, en interaction avec son écosystème. Les frontières sont poreuses. Les partenaires (clients, prescripteurs, fournisseurs, prestataires, sous-traitants, etc.) sont en relation constante avec les différents acteurs de l’entreprise. Délaissant le mode taylorien trop cartésien, l’organisation fonctionne sur une logique de flux, échange des informations, évolue, s’adapte. Au lieu d’être contrôlable par des règles et des procédures, elle est pilotable par des valeurs, une vision et des principes d’action. On le devine, l’entreprise “organisme vivant” n’a plus grand-chose à voir avec l’entreprise “machine”, mais les managers sont-ils préparés à accompagner cette transformation ?

Le pouvoir change de nature. Les salariés d’aujourd’hui sont éduqués, ils comprennent fort bien les enjeux de leur entreprise et ne veulent plus jouer le rôle de simples soldats. Partout dans le monde, d’ailleurs, on assiste à la chute de “l’archétype parent-enfant”, que certains anthropologues avaient prédit pour le début du 21^e siècle. Personne ne veut plus du vieux schéma dominant-dominé, même si cette façon de penser a imprégné nos relations depuis plus de 6 000 ans. Le professeur et l’élève, le médecin et le patient, l’expert et le non-sachant, le chef et l’exécutant… tous ces positionnements volent en éclat au profit de nouvelles formes de partenariat à construire. Nous ne sommes pas pour autant tous égaux, mais chacun a sa place, on a besoin de nombreuses contributions pour coconstruire les solutions durables de demain.

La relation au travail évolue aussi. Les collaborateurs ne sont plus “mariés” à leur entreprise, le contrat est davantage donnant-donnant. Ils attendent beaucoup de leur manager et de leurs coéquipiers, mais ils sont prêts à s’investir si l’aventure en vaut la peine. Ils ont envie de se sentir utiles et respectés, d’avoir les informations en toute transparence et trouvent normal que leur opinion soit prise en compte dans les décisions. Les jeunes générations ne font qu’apporter davantage de force à ce désir d’expression, d’autonomie et de reconnaissance.

Dans ce mouvement où tous les repères changent en profondeur, la révolution digitale entre comme une bourrasque, accélérant la transformation de façon radicale. Instantanéité, effacement des frontières de l’espace et du temps, réactivité et collaboration, multiplicité des réseaux, bouillonnement d’idées et d’interactions, processus d’essai-erreur-amélioration, innovation ouverte, prototypage, coconstruction, toutes les façons de travailler sont chamboulées. Les mentalités se transforment, les logiques d’usage remplacent le traditionnel besoin de posséder, l’influence d’une personne ne se mesure plus à son statut mais aux informations qu’elle partage et diffuse.

Tous ces changements valent bien quelques ajustements ? Le grand chantier managérial d’aujourd’hui est d’accompagner les managers pour qu’ils puissent conduire ces mutations en devenant eux-mêmes d’authentiques leaders-facilitateurs.