Rien moins que 10 000 salariés sont concernés par le choix pédagogique opéré par la direction de Volkswagen Group France (VGF) pour la nouvelle politique de formation après-vente de ses 850 sites (vente, réparation) : le taux de formation à distance doit y passer de 6 % en moyenne à une fourchette allant de 35 % à 65 % selon les domainesde compétence !

Jusqu’en 2011, où cette “révolution culturelle” a été décidée, le géant automobile allemand (Volkswagen, Audi, Seat, Skoda et Volkswagen Utilitaires) formait 94 % de ses collaborateurs français en présentiel aux 23 métiers de son réseau, dans trois sites dédiés (Paris, Bordeaux, Lyon). Problème : depuis deux ans, les coûts de formation ont augmenté de 27 %! Une première expérience faisant appel à PowerPoint avec suivi distanciel, menée en 2002, était restée marginale dans l’ensemble de l’effort formation du groupe.

Les formations concernant l’après-vente (pièces détachées, carrosserie, technique…) sont les premières à devoir fortement se dématérialiser. Pour y parvenir, VGF a choisi d’utiliser les services de Strass E-Learning, société sélectionnée par appel d’offres en août 2011, qui travaille depuis longtemps sur ce type de problématique, entre autres avec Renault. Dans la short list finale figuraient aussi notamment le prestataire d’e-learning espagnol GEC et le français Nexter.

Lors d’un premier travail pédagogique, les modules présentiels préexistants, construits par métiers, ont été analysés afin de bâtir les nouveaux contenus dans une logique de compétences métiers. « Les trois quarts des anciens modules ont été abandonnés », explique ainsi Bruno Lavoisier, responsable de la formation après-vente au sein du groupe automobile.

Les concepteurs de Strass E-Learning et les responsables-experts de compétences du constructeur automobile ont réalisé des modules d’e-formation d’une durée de 20 à 40 minutes. « La difficulté a été de gérer une énorme masse de connaissances et d’expertise », reconnaît Anne Marleix, présidente de Strass E-Learning.

À la fin 2012, 50 modules étaient créés, 60 le seront cette année. 55 heures d’e-learning seront ainsi disponibles sur la plate-forme LMS (learning management system) de VGF, qui est la plate-forme espagnole Lema, déjà utilisée dans l’industrie et la banque ibériques pour diffuser ce type de formation.

Comme le précise Bruno Lavoisier, l’utilisation de ces modules est prévue sur le lieu et le temps de travail. L’inscription se fait sur proposition du service formation, avec validation hiérarchique sur site. Point important : l’accès à cet e-learning est partiellement payant pour les partenaires (qui relèvent de l’opca ANFA, alors que le constructeur est adhérent de l’Opcaim). Mais, assure Bruno Lavoisier, « le prix demandé ne couvre pas le coût », qui s’élève à un total à 3 millions d’euros entièrement autofinancé.

Selon un premier bilan tiré à chaud par le responsable de la formation après-vente, à la suite de l’adoption de l’e-learning, les coûts de formation auraient d’ores et déjà baissé de 20 %, les durées de formation auraient également diminué, mais l’accès aux formations serait plus homogène. Certains domaines ont déjà atteint un taux de diffusion par e-learning de 65 % : la communication, l’accueil, les questions consuméristes, l’informatique… En revanche, les applications techniques ne sont dématérialisées qu’à 35 %. Ce qui pousse le constructeur automobile et son prestataire e-learning à travailler sur des modules plus poussés de serious games et simulateur.

Qu’en est-il de l’efficience pédagogique ? L’e-learning ancre-t-il aussi bien les contenus dans les têtes des apprenants que les formations présentielles ? Bruno Lavoisier dit noter « une hausse de la motivation et du niveau », mais pointe deux bémols. Premièrement, il est, paradoxalement, presque plus compliqué de planifier 1 h 30 d’e-learning dans une journée qu’une journée d’absence dans une semaine pour formation classique : l’arrivée d’un client pousse à lui répondre tout de suite, donc à extraire le salarié de son apprentissage.

Deuxièmement, cette nouvelle modalité pédagogique crée un besoin d’animation supplémentaire. Les échanges, les témoignages et les commentaires entre apprenants via LMS vont être encouragés et facilités, et VGF engagera prochainement une tournée en France afin de les motiver.

• Activité : constructeur automobile.

• Effectif : 10 000 salariés sur 850 sites.

• Chiffre d’affaires 2011 : 6,38 milliards d’euros.