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THERMADOR AFFICHE LES SALAIRES DE TOUT LE PERSONNEL

Pratiques | publié le : 05.03.2013 | LAURENT POILLOT

Dans ce groupe rhônalpin, la transparence est le fruit d’une politique de décentralisation des RH poussée à son maximum, et sans DRH.

La direction de Thermador vient « d’ouvrir la fenêtre du PEE » un peu plus que d’ordinaire. Durant deux semaines, les salariés se sont vu offrir un abondement de l’entreprise de 150 % sur leurs versements, contre 100 % les années précédentes. En période de restrictions propice aux accords compétitivité-emploi, cette initiative apparaît comme une incongruité. Une de plus dans ce petit groupe rhônalpin de distribution d’accessoires de chauffage et de sécurité sanitaire, qui observe l’étonnante coutume de dévoiler chaque année, en interne, les rémunérations de ses collaborateurs.

Souci de transparence

Dans chaque filiale, l’information est projetée entre deux Powerpoint sur les résultats et les perspectives d’affaires. Chacun sait que l’écart entre le plus grand et le plus petit salaire varie de 1 à 10, du magasinier débutant, qui perçoit 23 000 euros brut, au Pdg qui touche, lui, 255 000 euros. « Ce souci d’information est inscrit dans les gènes de l’entreprise, commente Guillaume Robin, à la tête de Thermador et de la holding du même nom, cotée à la bourse de Paris. Quand le fondateur Guy Vincent a créé l’entreprise, en 1968, une telle transparence allait de soi. Elle est restée dans les pratiques au fur et à mesure de notre développement », explique-t-il en listant les huit entités commerciales, la société immobilière et l’agence de communication réunies dans le groupe.

À l’en croire, la politique de rémunération est restée inchangée, même après l’entrée en bourse en 1987. « Nous versons des salaires fixes correspondant au marché du travail. Nous les augmentons d’une part variable qui dépend du résultat annuel de chaque société. Elle représente l’équivalent de deux à cinq mois de salaire, selon les années et les entreprises du groupe. Cette politique d’individualisation par entité des variables nous a toujours permis de compter sur des équipes motivées. »

La transparence vaut aussi pour les administrateurs. Le rapport annuel de 2011 mentionne jusqu’au montant de l’indemnité de départ du fondateur, qui vient de prendre sa retraite. Justification de Guillaume Robin : « C’est en dissimulant l’information qu’on fait naître des idées fausses et des rumeurs. Nous avons eu une réflexion poussée sur le sujet pour mobiliser chaque manager. »

Tous les mois, une revue d’activité est organisée dans chaque filiale avec le personnel. La taille des effectifs, qui oscille entre quatre et 51 personnes, le permet. Chiffre d’affaires, marge, frais, résultats : tous ont connaissance de ce tableau de bord, y compris les magasiniers (72 personnes) et les commerciaux itinérants (54 personnes) qui constituent la majorité des 252 salariés. Chaque dirigeant assigne ses objectifs en garantissant, simultanément, les moyens de les réaliser.

Décentralisation des RH

« Deux fois par an, nous nous rencontrons à l’extérieur de l’entreprise pour échanger sur les ressources humaines, la stratégie et l’organisation, sans le recours d’aucun DRH. Nous n’en avons pas besoin, insiste le Pdg. Quand elle se spécialise, la fonction RH a tendance à déresponsabiliser les managers. Chez nous, elle repose sur les épaules du patron de filiale – autonome dans la gestion de ses contrats et de la paie – et sur celles de ses cadres. La direction administrative intervient en support, par exemple pour le plan de formation. »

D’un point de vue social, ce dogme de la décentralisation n’aurait que des effets bénéfiques sur la stabilité des équipes intermédiaires et la fréquence des conflits individuels au travail. Le patron se flatte aussi de l’absence de turnover parmi les dirigeants de filiale, entrés dans l’entreprise entre 1990 et 2001. Mais les représentants de salariés restent discrets. Afficher les salaires en interne, oui. En parler à l’extérieur, c’est une autre histoire.

Auteur

  • LAURENT POILLOT