Remerciée in extremis en juin 2011, deux semaines avant la fin de son mandat, Anne Lauvergeon, qui a été la patronne d’Areva pendant dix ans, raconte son parcours depuis l’enfance jusqu’à la traque et l’espionnage dont elle s’estime avoir été victime à la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Au-delà du parcours exceptionnel d’une femme dans le monde essentiellement masculin des dirigeants d’entreprise, c’est le rapport de l’économique et de la politique qui est passé au crible par celle qui refusa d’être ministre pour ne pas trahir le sens du service public acquis au fil de sa formation de normalienne, puis à l’école des mines. L’auteure déplore que la puissance publique ait cessé d’être à l’initiative de grands projets de développement au profit du secteur privé qui, lui, n’a pas vocation à se lancer dans de tels projets peu rentables à court terme. Elle rappelle également que l’innovation dans tous les secteurs dépend de la pratique. Il est donc particulièrement dangereux de privilégier les services au détriment du secteur industriel, au risque de stériliser notre capacité d’innovation. Et ce, tandis que de petites mains dans les ateliers du monde ne se contentent pas d’accomplir les sales besognes, mais apprennent très vite à inventer de meilleures solutions pour le faire.

Elle déplore enfin le clientélisme politique qui propulse à la tête des entreprises publiques des personnalités dont le plus grand mérite, avant toute expertise, est de savoir plaire à l’exécutif.

La femme qui résiste

Anne Lauvergeon, éditions Points, 240 pages, 6,70 euros.