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QuébecLA PROVINCE A IMPOSÉ “SA” MÉTHODE HAY

Pratiques | International | publié le : 29.10.2013 | LUDOVIC HIRTZMANN

La société de conseil en RH et en rémunération Hay Group a conquis plus de la moitié des grandes entreprises mondiales avec sa méthode de classification des postes. Elle est fondée sur trois critères… sauf au Québec, où elle en utilise un de plus, “conditions de travail”, rendu obligatoire par la loi sur l’équité salariale.

Dans son ouvrage événement publié au Seuil, DRH, le Livre noir (lire Entreprise & Carrières n° 1127), le sociologue spécialiste des relations sociales au travail Jean-François Amadieu, qui pointait du doigt la timidité des pratiques visant à l’égalité salariale en France, mentionnait, a contrario, une particularité québécoise : « Le fameux cabinet Hay a été obligé de modifier sa méthode, car la nouvelle loi sur l’équité salariale obligeait à tenir compte de certains critères qu’elle ignorait. » La fameuse méthode Hay de pesée des postes, sans doute la plus utilisée sur la planète, serait donc spécifique à cet endroit du monde.

Valoriser l’importance de la contribution

Cette méthode a pour objectif de valoriser les postes par l’importance de leur contribution à l’organisation à laquelle ils appartiennent, et retient trois grands facteurs d’évaluation : la finalité (effet mesurable du poste sur les résultats de l’entreprise), la compétence (les exigences requises pour tenir le poste de façon satisfaisante), l’initiative créative (la capacité à détecter les problèmes à résoudre et la manière de les résoudre). « Mais nous avons laissé la possibilité aux clients d’ajouter d’autres éléments, en fonction des circonstances et de leur culture, précise Philip Johnson, responsable mondial de la mesure du travail chez Hay. L’application pratique de la méthode peut être ajustée. »

Si ces trois critères intangibles sont utilisés par la firme de Philadelphie depuis sa fondation, il y a soixante-dix ans, Philip Johnson ajoute que, « de temps à autre, des clients ont demandé l’inclusion de facteurs qui pouvaient tomber sous le critère de conditions de travail ». C’est bien ce quatrième critère dont fait état Jean-François Amadieu. En Europe continentale et en Grande-Bretagne, son inclusion est « recommandée ». Le Québec, lui, exige ce quatrième critère. L’État américain de l’Oregon s’y est également intéressé, dans les années 1980, pour ses agents, en prévision de l’adoption d’un projet de loi sur l’égalité salariale, effective en 1987. Parmi les critères ajoutés au titre des conditions de travail, figuraient certains aspects du stress, dont le work demand, intégrant par exemple la maîtrise des émotions face à la détresse physique et émotionnelle…

Au Québec, la loi sur l’équité salariale a été votée en 1996 par l’Assemblée nationale de la Belle Province. L’objectif était de « corriger à l’intérieur d’une même entreprise les écarts salariaux dus à la discrimination fondée sur le sexe, à l’égard des personnes qui occupent des postes dans des catégories d’emploi à prédominance féminine ». Telle est la définition de la Commission de l’équité salariale, chargée de superviser l’application des mesures législatives.

Efforts et environnement physique

Selon l’article 57 de la loi, « la méthode d’évaluation doit tenir compte, pour chaque catégorie d’emploi, des facteurs suivants : les qualifications requises, les responsabilités assumées, les efforts requis et les conditions dans lesquelles le travail est effectué ». Parmi les sous-critères aux conditions de travail demandés à Hay : les efforts physiques, l’environnement physique et, là aussi, le stress et l’attention sensorielle.

L’application de la loi québécoise a été très lente, et elle exclut toujours de nombreuses sociétés. D’une part, les entreprises qui sont sous compétence fédérale (les banques, Air Canada, Postes Canada…), mais aussi les sociétés de moins de 10 salariés, soit plus de 80 % des 235 000 entreprises québécoises, à l’entrée en vigueur de la loi. Les autres, en cas de défaut de mise en œuvre, encourent des pénalités financières depuis le 1er janvier 2011.

Auteur

  • LUDOVIC HIRTZMANN