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CanadaCOMMENT LES ENTREPRISES AFFRONTENT L’HIVER

Pratiques | International | publié le : 07.01.2014 | LUDOVIC HITZMANN

De novembre jusqu’à la fin mars, les travailleurs doivent affronter de grands froids, la neige et la glace presque quotidiennement. Les autorités ont responsabilisé les employeurs et les entreprises ont dû adapter leur organisation du travail aux températures négatives.

Le 3 février 1947, la température avait atteint -62,8 degrés Celsius dans le Yukon, à Snag, l’une des villes qui fut le théâtre de la ruée vers l’or au Canada. C’est un record inégalé dans le pays mais, l’hiver, le mercure oscille régulièrement de -10 °C à -30 °C dans les principales villes canadiennes et les entreprises ne peuvent s’exonérer de cette réalité géographique et climatique. Selon la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec (CSST), « entre 2007 et 2011, au Québec, 63 salariés ont subi un accident de travail causé par le froid ».

Les travailleurs des secteurs du bâtiment et de la foresterie sont les plus exposés à ces froids polaires. Salarié dans l’industrie de la construction, le Québécois Alain Brazeau confie : « Il n’y a vraiment qu’une seule règle l’hiver : rester dehors le moins longtemps possible. » Outre l’obligation d’être chaudement vêtu de plusieurs couches plutôt que d’un seul vêtement très chaud, la CSST demande aux employeurs de « réorganiser le travail pour accomplir les tâches à l’extérieur durant les périodes les plus chaudes de la journée ».

Si le Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST) précise « qu’aucune limite n’est prévue pour le travail à l’extérieur par temps de froid », le législateur a encadré l’activité dans ces conditions, particulièrement au Québec, toujours plus “social” que les autres provinces. Les abris doivent être chauffés, les poignées de porte munies d’isolants thermiques et les locaux maintenus à 20 °C pour les salles à manger et de 12 °C à 20 °C pour les autres pièces.

Information régulière auprès des entreprises

La CCHST est un organisme consultatif fédéral, mais chaque province applique sa propre législation sur les risques professionnels. Ainsi, au Québec depuis 1999, la CSST peut mener une enquête en cas d’accident, demander l’indemnisation du travailleur blessé et engager la responsabilité de l’employeur. Jusqu’à -15 °C, le froid, même s’il est surveillé avec attention, est moins handicapant. « En deçà, nous restons le plus possible à l’intérieur dans des abris et faisons travailler les machines. L’hiver, nos employeurs sont plus tolérants. Mais même la machinerie souffre dans le froid, ce que les patrons n’aiment pas », souligne Alain Brazeau. La CSST quant à elle mène un travail d’information régulier auprès des entreprises, encourageant les travailleurs du froid à exercer une surveillance mutuelle entre collègues et précise : « L’employeur effectue une surveillance du milieu de travail par la prise de mesures de la température et de la vitesse de l’air. »

Les experts du CCHST exigent en effet que les périodes de travail, mesurées par tranches de quatre heures, comprennent des pauses plus ou moins nombreuses selon le froid, mais aussi selon le vent : « Les périodes de réchauffement sont de 10 minutes dans un endroit chauffé, et ont normalement lieu toutes les deux heures. Une longue pause est prévue à la fin de la période de quatre heures. » Lorsque la température atteint -25 °C (par vent faible), les travailleurs ont droit à au moins deux pauses toutes lesquatre heures et ils ne doivent pas travailler dehors plus de 75 minutes. Par -40 °C, la limite d’exposition à l’extérieur est de 30 minutes.

Du bon sens

En janvier et février, mois les plus froids de l’année, les chantiers sont cependant assez rares. « Comme la réglementation est quasi muette, les gens gèrent cet agresseur – le froid – suivant leur bon sens. Ils s’intéressent généralement au facteur de refroidissement éolien, qui est une bonne lecture de la froideur », confie Pierre Charles Dessureault, professeur de génie industriel à l’université du Québec à Trois-Rivières. Seule bonne nouvelle, selon un rapport de l’institut national Statistique Canada, la température nationale a augmenté de 1,4 °C depuis 1948.

Auteur

  • LUDOVIC HITZMANN