E & C : En tant que spécialiste de la qualité en formation, quelle est votre analyse de la réforme actuelle ?

H. G. : La suppression du 0,9 % va permettre de dépasser une vision stupide de la formation: celle qui estime qu’envoyer les collaborateurs en stage les rend compétents. Mais cette réforme est mal managée. Dans toute entreprise qui se respecte, lorsque l’on engage un grand changement, on appelle cela un projet stratégique, on planifie des objectifs avec des étapes dans le temps. On organise un plan de communication et on prévoit un accompagnement. Dans le cas présent, les partenaires sociaux renvoient à « l’intelligence économique » des acteurs le soin d’en réussir la mise en œuvre. Ce n’est pas raisonnable: les entreprises sont rares à avoir intégré le développement des compétences comme élément stratégique, et les salariés ont peu d’appétence pour la formation professionnelle.

E & C : Selon vous, les conséquences en seront dramatiques. Pourquoi ?

H. G. : On casse le système et on bloque toute l’économie de la formation professionnelle. Personne n’est en mesure, actuellement, de définir comment se gérera la transition et ce que deviendront les différents acteurs de ce marché, à commencer par les organismes de formation et les Opca. Le rythme des dépenses de formation est variable et le recours à l’Opca permet le financement d’opérations ponctuelles plus ambitieuses.

Aujourd’hui, je ne pense pas que, si le chef d’entreprise va voir son banquier, il obtiendra un financement comme pour des équipements techniques. On peut s’attendre à une transition de plusieurs années avec des étapes assez violentes, et le risque est énorme de voir la dépense formation réellement baisser, même dans les grandes entreprises.

E & C : Quel est votre souhait ?

H. G. : Qu’un véritable plan de transition soit mis en place et géré avec des objectifs et des étapes, dont préparer le système de formation à offrir une ingénierie efficace, à accompagner les entreprises dans la construction du financement de l’investissement formation, à mettre en place un véritable dialogue social avec une information claire des salariés.