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PHILIPPE DÉTRIE LA MAISON DU MANAGEMENT

La chronique | publié le : 23.06.2015 |

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PHILIPPE DÉTRIE LA MAISON DU MANAGEMENT

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Éthique : et toc !

Clamer son éthique sent le toc.

Les chartes d’éthique n’ont rien de condamnable en soi : ce sont des outils de communication collective. Mais elles n’ont pas vocation à dicter les conduites morales individuelles. Ces dernières restent du ressort de l’individu, qui doit juger en son âme et conscience. Une action cesse d’être éthique ou morale dès lors qu’elle n’est plus une fin en soi. L’instrumentalisation de la morale ou de l’éthique comporte des risques graves d’embrigadement et de création de devoirs par des pouvoirs non autorisés dans ces domaines. L’éthique est affaire de conscience personnelle et donc ne concerne en rien l’entreprise en tant que personne morale. Cette dernière peut, et même doit rappeler un certain nombre de règles déontologiques que ses collaborateurs s’engageront à respecter. Au-delà, nous allons vers de « l’éthiquette », voire de la « cosméthique ». Très peu nombreuses en réalité sont les entreprises qui réfléchissent au véritable sens de l’interrogation éthique, c’est-à-dire qui se posent la question des finalités.

La préférence du court-terme et la versatilité des actionnaires de passage font douter d’un quelconque engagement de long terme. Leur seul intérêt est le profit financier : beaucoup et vite. Quelques effets d’annonce ne nuisent jamais, mais, à la première tempête, chacun constate que les engagements moraux disparaissent aux oubliettes, écrasés par le rouleau compresseur de la rentabilité. Tout suit en cascade. Un dirigeant est aux ordres des actionnaires, ou il n’est plus leur dirigeant. Sauf dans les cas où le capital est patrimonial ou salarial. La vision y gagne deux champs supplémentaires : le long-terme et la dimension humaine.

L’entreprise-organisation n’est plus uniquement face à son marché, mais face maintenant à la société. Elle ne doit pas rendre nécessairement des comptes à d’autres que ses « propriétaires », mais elle doit répondre à des interpellations d’autres partenaires qui peuvent nuire profondément à son capital image.

Depuis peu, l’opinion publique acquiert une puissance nouvelle, dont l’arme est le terrible réseau social, qu’il soit mis en œuvre par les clients, les citoyens, voire par les salariés. Des groupements privés internationaux comme les ONG imposent aujourd’hui leurs exigences en termes d’éthique de société : droits de l’homme, droits des minorités, respect de la nature, responsabilité sociale, biosécurité… Ces groupements, s’ils sont bien relayés par des médias, peuvent devenir plus puissants que les États, dont, bien souvent, ils inspirent les actes. Autrefois, l’entreprise était cadrée par le marché et par la loi ; il faut maintenant y ajouter les pressions directes de l’opinion qui transmet vigoureusement, à travers ces nouveaux canaux, des valeurs largement partagées de transparence, d’exemplarité et d’absence de nuisances.

En cas de difficulté, suivez le précepte d’Albert Einstein : « Ne faites jamais rien contre votre conscience, même si l’État vous le demande. »

* Lire Entreprise & Carrières n° 1238/39.