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L’enquête

Des jeux de rôle pour les managers de Bercy

L’enquête | publié le : 08.12.2015 | Rozenn Le Saint

Plus de 550 cadres du ministère de l’Économie et des Finances ont été sensibilisés ou formés pour mieux repérer et gérer les situations de stress vécues par leurs collaborateurs.

Après la Révision générale des politiques publiques (RGPP) enclenchée en 2007, la Modernisation de l’action publique (MAP) a pris le relais fin 2012, toujours avec des réductions d’effectifs, dans un contexte de montée en puissance de la thématique des risques psychosociaux (RPS). Bercy a alors décidé de débloquer un budget pour prévenir ces risques « en sensibilisant ses cadres en première ligne sur le sujet, plus globalement, à la qualité de vie au travail (QVT) », présente Coralie Oudot, sous-directrice en charge des politiques RH ministérielles au sein de la DRH des ministères économiques et financiers.

Deux modules sont prévus : l’un d’une demi-journée à destination des cadres dirigeants (directeurs, sous-directeurs et chefs de service) et l’autre pour les cadres de proximité, d’une durée de deux jours. « C’est trop peu, d’autant plus que la QVT englobe des thématiques plus larges. Les cadres sont à peine sensibilisés à celle des RPS », estime Denis Habouzit, secrétaire national de Solidaires Finances publiques. « Nous savons qu’il est difficile de capter les disponibilités des cadres dirigeants. En si peu de temps, ils ne sont pas formés, mais au moins informés du message donné à leurs managers, qu’ils peuvent régulièrement interroger sur le sujet », justifie Coralie Oudot. En tout, 110 cadres dirigeants et 370 managers ainsi que 76 nouveaux arrivants, soit la quasi-totalité, ont suivi le module à Bercy, et un kit de formation a été préparé pour être déployé par les administrations déconcentrées qui souhaitent s’en charger elles-mêmes. À titre d’exemple, douze formateurs ont été formés à cet effet pour les Douanes.

« Les managers ne comprenaient pas forcément pourquoi ils étaient envoyés en formation, mais à son issue, ils se rendent compte qu’ils doivent faire face au quotidien au stress de leurs collaborateurs, rapporte Mylène Orange-Louboutin, directrice de l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE), l’organisme chargé de la formation continue de ces ministères. Le but est de les amener à prendre du recul, à avoir un questionnement systématique et de les outiller pour prévenir les risques sans qu’ils se sentent stigmatisés ou responsables du stress de leurs équipes. »

Traduire les « signaux faibles »

Après la présentation des concepts, Bercy a même fait appel à une compagnie de théâtre qui met en place des jeux de rôles pour provoquer des échanges et de l’interactivité. L’objectif est d’amener les managers à être attentifs, à repérer et à traduire les “signaux faibles”, dans le comportement de leurs collaborateurs : être vigilants, par exemple, quand un collaborateur se replie sur lui-même, sans attendre qu’une crise survienne.

Autre exemple, pour éviter un stress lié à un déménagement de service, il est important de prendre le temps de montrer aux agents concernés que leurs conditions de travail ne vont pas se dégrader : « Si les managers ne peuvent pas empêcher un déménagement, ils disposent de marges en amont sur le temps consenti à la préparation des équipes au changement, afin d’éviter une crise en aval. D’autant que, par ailleurs, leurs supérieurs hiérarchiques sont sensibilisés à la démarche QVT grâce au module qu’ils ont suivi », souligne Coralie Oudot. Enfin, les formations rappellent les dispositifs d’accompagnement que les managers doivent mobiliser en cas de situations difficiles, « pour qu’ils aient le réflexe d’aller voir les RH, qui peuvent orienter vers des psychologues, des médecins du travail, des ergonomes… Et pour qu’ils n’imaginent pas qu’un bon manager doit tout gérer seul », indique Mylène Orange-Louboutin.

Les évaluations à l’issue de la formation des managers montrent qu’ils apprécient « le côté libérateur du recours au théâtre », témoigne-t-elle. L’initiative, pionnière, pourrait inspirer d’autres ministères.

Auteur

  • Rozenn Le Saint