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Philippe Détrie la maison du management

La chronique | publié le : 23.02.2016 |

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Philippe Détrie la maison du management

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L’asymétrie des attentionsPhilippe Détrie a créé en 2014 La Maison du Management, dont la raison sociale est de développer un management responsable et entraînant pour l’ensemble des acteurs de la vie économique.

La symétrie des attentions est un récent concept managérial. Qu’est-ce que c’est ? La qualité de la relation des salariés auprès des clients dépend de la qualité de la relation du management auprès des premiers. Autrement dit, si vous voulez que vos salariés servent vos clients au mieux, vos managers doivent porter la même qualité d’attention auprès de leurs équipes.

Excellente idée, pas récente à la vérité, puisque déjà défendue depuis l’école des Relations humaines(1). La nouveauté est que l’idée a été instrumentée de façon originale(2) pour répondre à la nécessité des entreprises de transformer durablement leur qualité de service. On ne peut qu’en s’en réjouir.

Symétrie ou similitude ?

Mais parle-t-on réellement de symétrie ? Une symétrie met en relation deux choses semblables et opposées. Or les relations manager-salarié et salarié-client ne s’opposent en rien. Elles ne sont pas de sens opposé mais plutôt de même sens : manager → salarié → client ; et non manager → salarié → client. En géométrie, on a là une translation. Première pierre pour écrire l’asymétrie des attentions !

Est-ce toujours vrai ?

Ces deux relations n’ont pas le même sens, elles n’ont pas non plus la même intensité.

Quelques études corrélatives de ces deux relations indiquent un lien qui nous semble nécessaire mais pas suffisant. Nécessaire, parce que le bon sens et l’expérience démontrent qu’un salarié qui n’a pas plaisir à travailler sera naturellement peu impliqué. Mais pas suffisant, parce que l’attention du manager envers ses équipes apporte de la satisfaction mais pas nécessairement de la motivation, c’est un facteur d’hygiène, dirait Herzberg(3) : la présence d’un tel facteur ôte l’insatisfaction du salarié, mais ne crée pas pour autant de la motivation.

Attentions ou plus ?

D’autant qu’il n’est pas sûr qu’il s’agisse des mêmes attentions. Pour la relation salarié → client, comme le résume Xavier Quérat-Hément dans son blog L’Esprit de service, il s’agit d’attitudes et de compétences : l’accueil (aller vers l’autre avec le sourire), l’écoute (empathie, reformulation) et l’efficacité (rendre rapidement et avec compétence le service demandé). Elles sont toutes aussi essentielles pour la relation manager → salarié. On pourrait d’ailleurs ajouter, au moins dans les deux cas, confiance et envie. Un prestataire ou un manager qui n’inspire pas confiance et qui ne donne pas envie me semble assez disqualifié pour créer et développer une relation de service.

La différence de périmètre de la symétrie vient aussi du rôle plus large du manager : il doit également porter attention au développement de ses collaborateurs, à leur qualité de vie au travail, au bien-être individuel et collectif…

Priorité aux salariés ou aux clients ?

La symétrie des attentions évoque à juste titre les deux sens du mot attention : faire attention à l’attention, se concentrer sur la prévenance. Elle indique aussi une égalité entre les deux types de relations. Le client serait-il détrôné et placé sur le même piédestal que le salarié ? Voire devenu moins important, comme l’écrit Vineet Nayar dans son livre Employes First, Customers Second ? Ma position, déjà présentée ici dans une autre chronique, est : priorité au client. Sans client, pas d’activité, ou alors, vive la bureaucratie ! Puis le salarié, puis l’actionnaire, dont le résultat est la résultante de l’activité.

Attention à la tension

Asymétrie des attentions donc, qu’il s’agisse de nature, de permanence, de périmètre, de priorité. Et oui à l’attention pour faciliter les relations et pour éviter la tension !

(1) Mouvement psychosociologique né après la crise de 1929, qui cherche à compenser les excès du taylorisme par la prise en compte du facteur humain (Elton Mayo, Kurt Lewin, Abraham Maslow…).

(2) Du management au marketing des services, par Charles Ditandy et Benoît Meyronin (Dunod, 2007).

(3) La théorie des deux facteurs a été conçue en 1959 par Frederick Herzberg. Il distingue les facteurs d’hygiène, qui renvoient au contexte du travail : ils peuvent supprimer l’insatisfaction, mais ne suffisent pas à motiver. Les seconds facteurs de satisfaction ou « motivateurs » renvoient au contenu du travail. Ce sont les seuls éléments motivants véritables. La satisfaction d’un besoin (ce qu’on fait pour moi) diffère de la motivation (ce que je fais). L’enseignement : le contraire de l’insatisfaction n’est pas la satisfaction, mais l’absence d’insatisfaction, qui ne crée pas automatiquement de la motivation.