Cet essai clinique s’attaque à un tabou : celui de la consommation de drogues et d’alcool lié au travail. Selon les auteurs – médecins et chercheurs en sciences sociales – de plus en plus de salariés utiliseraient des substances psychoactives pour tenir bon face à l’intensification du rythme ou à des conditions de travail difficiles. Elles leur permettraient donc d’être productifs, sans que l’employeur partage la responsabilité de ce risque sur la santé : « Le dopage lié au travail ne rentre dans une aucune case. Il n’est ni un risque professionnel, ni un risque psychosocial, ni une maladie professionnelle » souligne le psychiatre-addictologue Michel Hautefeuille, qui parle « d’omerta » sur ce problème. Au travers différentes analyses de psychologues et de sociologues, le livre tente d’éclairer le lien entre drogue et conditions de travail : le recours aux drogues et autres psychotropes serait multiple, permettant aux salariés de dormir, de décompresser ou encore de masquer leur peur ne plus atteindre leurs résultats. L’essai comporte quelques études, dont une montrant l’usage du cannabis chez des intérimaires d’un aéroport pour compenser la fatigue des horaires décalés. À l’instar des risques psychosociaux, les chercheurs estiment urgent de sortir du déni, tant du côté des employeurs que des pouvoirs publics. L’essai est critique sur les politiques du « zéro alcool » ou du dépistage de cannabis dans certaines entreprises. Des mesures « qui ne disent rien du rapport du salarié à sa consommation et nie la question de l’organisation du travail ».

Note : lire aussi notre interview de Gladis Lutz dans Entreprise & Carrières n° 1337 du 16 mai dernier.