logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

SANS

Coaching, prothèse et jambe de bois

SANS | publié le : 23.04.2002 |

Dans la version DRH branché, c'est un beau modèle.

Son bureau est entièrement dédié à la réflexion sur l'entreprise, genre bibliothèque particulière de vieil érudit. Tous les ouvrages des trente dernières années, toutes les revues spécialisées, toutes les synthèses de colloques, c'est un empilement impressionnant de la culture managériale. On sent le grand penseur, on devine l'humaniste, on craint l'inutile, l'encombrant, le sentencieux.

On a tort. L'homme est habile.

La conversation roule sur le coaching, à la veille d'en proposer l'accès à toute une couche de managers des centres de profit de ce groupe industriel, pour mieux les aider à "accompagner les changements induits par la restructuration de l'outil de production". Sic.

Je pressens le grand nettoyage par le vide, le recyclage accéléré des incompétents, la formation-consolation des laissés pour compte, le tralala habituel des épisodes douloureux de reconfiguration.

A l'aube de ce désastre, un dispositif d'aide d'urgence se met en place, résigné devant l'inéluctable, geste tardif de solidarité pour les managers de province. (Bouquet de fleurs acheté dans le hall du service juste avant la visite au malade dans son stade terminal. Qui est dupe ?)

« Vous comprenez, nos directeurs d'usine sont dans des difficultés incroyables. Toutes ces négociations de fermeture sont compliquées, douloureuses, culpabilisantes. Le board (c'est comme ça qu'il a dit. La branchitude n'a pas de limites...) souhaite accorder à chacun le soutien dont il peut avoir besoin. Nous cherchons donc les meilleurs coachs pour les accompagner. Vous souhaitez en être ? »

Flatteur, en plus...

Mais ma réponse sera négative.

A mon sens, le coaching est une discipline trop précieuse pour être gâchée dans des circonstances qui relèvent, en réalité, de l'abandon. Je ne nie pas que les directeurs en question aient sûrement besoin d'un accompagnement solidaire. Mais, confié à un tiers, ça, c'est moins sûr. Quand le navire coule, les soutiers ont droit à autre chose qu'un émissaire pour les soutenir dans leur détresse. Une place sur le canot de sauvetage, ça oui. Et avant l'état-major, encore, comme dans la tradition.

Le coaching, peut-être, mais pas comme compensation.