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SANS

Tonsure et pelote basque

SANS | publié le : 17.12.2002 |

Convention de force de vente, au Pays basque. On m'a invité pour parler de l'évolution de la relation des jeunes diplômés avec leur première entreprise. Je suis venu expliquer à quel point la notion d'appartenance a évolué, et les précautions de management à prendre en compte pour répondre efficacement aux attentes de ces jeunes diplômés, désormais dans une relation affectivement moins dépendante de leur entreprise. Une relation plus volontiers contractuelle, plus marchande, moins exaltée, et peut-être plus mûre, finalement.

Ce n'est pas l'avis du client. « Au contraire, vous voyez, nous la jouons très complices. Très ancrés dans le tissu local. Une tribu de "pelotaris", accros de la chistera, et fiers d'entrer dans la tribu et d'y porter nos couleurs. Pareil d'ailleurs pour le surf. Bref, je suis sûr que nos performances doivent beaucoup à notre esprit de clan, à nos rites, à notre culture commune, et finalement, à tout ce que vous dénoncez... »

Bon. C'est ce qu'on appelle une objection. Modèle haut de gamme, en platine iridié... Tentons d'expliquer. « Vous êtes contents de vos résultats opérationnels, et vous avez raison : ils sont excellents. Après tout, c'est ce que vous cherchez le plus. Vous pensez qu'ils sont dus à vos pratiques tribales, et à votre immersion locale. C'est possible. C'est même une explication solide. Mais vous ignorez peut-être à côté de quoi, et surtout de qui, vous passez : tous ceux qui ne sont pas accros de votre folklore d'entreprise, et qui pourtant pourraient apporter beaucoup. Tous ceux qui ont d'autres qualités que celles que vous exigez d'abord, et qui pourraient apporter un peu de diversité dans vos approches. Tous ceux, et ils sont nombreux, qui veulent bien mettre en marche leur talent au service d'un projet, mais pas leur personne, pas leurs croyances, pas leurs affects. Tous ceux qui ne sont pas comme vous, finalement. Et ils sont nombreux... »

Ce sont tous ceux qui veulent bien contribuer au projet, mais revendiquent leur liberté d'appartenance.

Froncement de sourcils. Le client n'aime pas cette approche. D'ailleurs, cette idée de mercenaires du talent, franchement, est-ce que ce n'est pas le début de la fin de l'entreprise ?

La conversation s'enlise. Trop de divergences dans les points de vue. Trop de différences dans les approches de management. Un fossé. Nous en sommes là de la conversation, sur la promenade de bord de mer, à chercher une issue pour nous deux.

Bruits de musique. Clochettes. C'est un groupe d'admirateurs de Krishna, tous en tenue orange, qui défile derrière un gourou. Tongs et tonsure pour tout le monde. Appartenance maximale. C'est trop tentant et je m'apprête à faire une remarque.

« J'ai compris - dit le client - N'en rajoutez pas ! Je vous promets d'y réfléchir... »

Merci Krishna !