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Le "flicage" est mort, vive l'optimisation !

SANS | publié le : 25.03.2003 |

Dans un contexte économique difficile, les principaux spécialistes de la gestion des temps et des activités ont, l'an dernier, réussi à tirer leur épingle du jeu. Ils surfent actuellement sur des demandes complexes de planification et d'optimisation des ressources. Sans oublier le marché des PME/PMI, des collectivités locales et autres administrations.

Plus de 40 millions d'euros ! Tel est, selon le cabinet Pierre Audoin Consultants, le montant des investissements consentis l'an dernier par les entreprises françaises en matière d'achats de logiciels de gestion des temps et des activités (GTA). Une belle performance obtenue dans un contexte conjoncturel atone, qui a davantage poussé les entreprises à réduire leurs coûts, en différant, voire en annulant leurs projets informatiques. « L'exercice 2002 a été très tendu dans les métiers de l'informatique mais, pour autant, le marché de la GTA est encore en croissance. Certes, les entreprises ont été très prudentes dans leurs choix mais les investissements n'ont pas été gelés », confirme Samuel Serraz, directeur marketing de Chronotique, un des poids lourds de la GTA.

Autre surprise : l'appel d'air, provoqué par les lois Robien puis Aubry I et II, dans lequel se sont engouffrés ces prestataires informatiques, n'est pas retombé. Et ce n'est pas la loi Fillon, qui a assoupli les 35 heures, qui va changer la donne. « Le principe d'annualisation reste figé. Les entreprises ne doivent plus gérer un schéma immuable sur la base des 39 heures hebdomadaires, mais elles doivent optimiser les temps de leurs collaborateurs par rapport à leurs plans de charge », remarque Philippe Montagu, responsable marketing d'Octea, une entreprise située dans les Pyrénées-Atlantiques, qui édite la solution Octime.

Expression de besoins nouveaux

Si les éditeurs ont, l'an dernier, encore amélioré leurs chiffres d'affaires, c'est, en effet, surtout parce que les entreprises ont renouvelé leurs logiciels en exprimant des besoins nouveaux. Ainsi, l'époque où elles s'équipaient de produits de décompte des heures associés à des badgeuses est en passe d'être révolue.

Antichambre de la paie, la GTA, longtemps vécue comme du "flicage", devient outil de management. L'explication est simple : dans un environnement économique ultra-concurrentiel, les gains de productivité demeurent des denrées rares. Les entreprises veulent désormais des outils de pilotage afin de combiner la gestion des temps de leurs collaborateurs et celle de leurs activités opérationnelles. En clair, faire de la planification et de l'optimisation.

Plannings sur mesure

« Les entreprises ont besoin de résoudre l'équation suivante : comment modéliser l'activité afin de définir des cycles couvrant au mieux la charge de travail. Dans le secteur industriel, par exemple, les entreprises s'attellent à organiser leurs lignes de production en construisant des plannings sur mesure », indique Christophe Bouchardeau, directeur général France de TempoSoft. « Nos clients recherchent, aujourd'hui, des solutions d'organisation de leur activité. Ils veulent des produits qui tiennent compte de leurs contraintes. Dans l'ordre, nous avons eu le décompte des temps de présence, le suivi des temps et des activités, puis la planification. Le challenge, c'est de proposer un produit capable de prendre en compte ces trois paramètres », analyse Didier Bouju, président du directoire d'Horoquartz, une des marques phares de la GTA en France.

Gestion des aléas

Certains éditeurs poussent encore plus loin la démarche. C'est notamment le cas de Delia Systems et de son produit Opti-time. Cette société, qui lorgne vers les prestataires de service, la distribution et l'industrie, a axé son offre commerciale sur l'optimisation des ressources humaines et matérielles. Originalité : son produit permet de gérer, très rapidement, les aléas de planning. Parmi ses clients, des entreprises de transport express, des hôpitaux (Rouen, Genève, etc.), et des compagnies d'aviation. « Il est évident que, dans une conjoncture en berne, les entreprises cherchent à gagner en productivité et donc à optimiser leurs ressources, constate Laurent Cavélius, président de Delia Systems. Dans ce cas, notre offre est défensive. En revanche, les projets de mobilité, qui commencent à se multiplier, vont donner un coup de fouet à notre activité, car notre solution tient compte de trois facteurs essentiels : le temps, la localisation géographique et les compétences. Nous nous positionnons en spécialistes de la chaîne de valeur. » GFI Progiciels (groupe GFI Informatique) a également développé ce type de service à travers Gesplan, son logiciel d'optimisation des contraintes. Seul problème, selon Didier Marcel, directeur général GFI Progiciels en charge de la gamme GTA/Planification, les clients ne sont pas encore disposés à payer au juste prix ces produits de haute volée.

Décentralisation

Autre nouveau besoin sur lequel surfent actuellement les éditeurs, celui de la décentralisation. Pour les entreprises, il se traduit par une volonté de déplacer la gestion administrative des horaires (et de la paie) vers les managers. Une approche qui passe par l'environnement intranet, et par d'autres technologies. Gestor, le logiciel de gestion des temps de GFI Progiciels, est désormais accessible via des PDA (Personnal digital assistant), des Palm, et des téléphones portables. « La demande est actuellement très forte sur la décentralisation, notamment parce que nos clients ambitionnent de repositionner la fonction RH sur des missions plus valorisantes », observe le président d'Horoquartz. « Face aux entreprises, insiste, quant à lui, Samuel Serraz, nous devons répondre à trois populations : la DRH, les managers et les salariés. L'outil doit faciliter les échanges entre ces trois parties. Décentralisé, il informe les salariés, et sert d'aide décisionnelle aux managers. En haut de la pyramide, il rassure la DRH sur la conformité réglementaire du dispositif. »

Reste que la décentralisation, qui induit de la flexibilité, nécessite, au préalable, une refonte de l'organisation. Un travail qui, selon le directeur général de TempoSoft, est loin d'être accompli dans l'Hexagone, alors que « les pays anglo-saxons paraissent beaucoup plus matures ».

Marchés potentiels

Des secteurs d'activité n'en sont pas encore à ce niveau d'avancement. Une aubaine pour les prestataires, qui voient, dans les PME-PMI, les collectivités locales et les administrations, des marchés potentiels de taille. L'entreprise Bodet, qui est implantée à Cholet, dans le Maine-et-Loire, s'est, par exemple, spécialisée sur les offres destinées aux petites entreprises, elles aussi contraintes de mesurer le temps de travail collectif et individuel et de calculer les heures supplémentaires dans le cadre de la RTT.

Dans le secteur public, le marché de la GTA est loin d'être saturé. Un décret, datant de janvier 2002, incite d'ailleurs les administrations à s'équiper de solutions informatiques. Dans la fonction publique, seuls 10 % des ministères seraient ainsi dotés de logiciels de GTA. La situation commence toutefois à évoluer. L'année dernière, GFI a pris pied au ministère de l'Agriculture (environ 15 000 personnes). Chronotique, lui, a signé avec la Ville de Paris, soit quelque 40 000 salariés. « Nous avons encore trois belles années à vivre sur notre marché d'origine », soulève Didier Marcel, de GFI Progiciels. Un prestataire qui a creusé son sillon dans le secteur hospitalier, où il revendique une position de leader. Ares et Equitime (cette dernière société, grenobloise, a été créée en 1999 par un docteur en médecine) sont également très bien implantées dans l'univers de la santé. Si l'assistance publique reste un marché difficile, avec des délais de paiement courant jusqu'à 180 jours, elle représente une manne considérable, compte tenu du niveau d'équipement des établissements de soins et de leurs problématiques en matière de gestion des ressources humaines.

Prochains bouleversements

Des terrains vierges d'un côté, des besoins de plus en plus complexes de l'autre, pour certains observateurs, le petit monde des éditeurs de GTA risque de subir des bouleversements dans les années à venir. Si les intégrateurs (Cap Gemini, Unilog, Arinso, etc.) peuvent entrer dans la danse, les spécialistes de la gestion des temps assistent au positionnement, sur ce segment, des grands éditeurs d'ERP (PeopleSoft, SAP, IBM...). « Attention, ces sociétés ont vendu des rêves sur la GTA. Nous voyons actuellement des entreprises qui acquièrent des solutions de GTA en complément des ERP existants », prévient un responsable. Ainsi, lors de la refonte de son SIRH, la société Spie-Trindel s'est appuyée sur PeopleSoft, mais a confié la GTA à Chronotique. En outre, la plupart des éditeurs de GTA ont noué des partenariats avec ces mastodontes. Reste que la puissance financière de ces majors pourrait avoir raison de certaines sociétés informatiques à la rentabilité très fragile.