Sans se concerter, deux grands acteurs européens de l'aéronautique et de l'espace ont eu la même idée lors du dernier salon aéronautique du Bourget : mettre en valeur leur politique en faveur des femmes.

L'ESA (Agence spatiale européenne), organisation internationale chargée de promouvoir la coopération pour la recherche et les technologies spatiales en Europe, réunissait autour de Pascale Depré, la responsable "diversité et égalité hommes-femmes" (voir Entreprise & Carrières n° 672), des femmes cadres de haut niveau d'autres entreprises - Schlumberger, Deloitte & Touche, IBM... - pour échanger sur les bonnes pratiques permettant de promouvoir les carrières des femmes.

EADS (European aeronautic and space company), qui regroupe les principaux industriels de l'aéronautique et de l'espace, choisissait de réunir 100 femmes professionnelles de l'aéronautique - 82 salariées d'EADS, 18 personnalités extérieures : pilotes, mécaniciennes, ingénieures, chercheuses, astronautes, aiguilleuses, etc.

Il faut dire que la promotion des femmes dans ces deux organisations ne relève pas de la philanthropie. Ces dernières voient, avec inquiétude, se profiler une pénurie de jeunes diplômés dans un avenir très proche. « Il existe un vrai problème en amont, car nous constatons une désaffection des jeunes pour les métiers scientifiques et techniques, souligne Jacques Massot, DRH France d'EADS. Si l'on y ajoute la baisse démographique prévue fin 2005, le recrutement deviendra problématique. Nous devrons travailler à la promotion des métiers d'ingénieur et nous nous apercevons, d'ores et déjà, que les femmes représentent un vivier important de vocations. » L'entreprise est, par ailleurs, attachée à la valeur de diversité, nécessaire à un développement de l'ensemble de ses filiales.

Comment faire pour susciter des vocations dans des milieux techniques traditionnellement masculins ? La direction générale de l'Agence spatiale européenne a proposé, dès octobre 2001, aux Etats-membres, la mise en place d'une politique d'égalité des chances avec la création d'un poste dédié. Il a été confié, en juillet 2002, à Pascale Depré, qui a présenté son plan d'action à l'automne dernier. Il vise trois objectifs : l'amélioration de la prise de conscience des managers de terrain, l'augmentation de la représentation féminine et l'équilibre vie familiale/vie professionnelle.

Pour donner véritablement leur chance aux femmes lors du recrutement, l'Agence a énoncé le principe suivant : quand, sur un poste, il y a égalité de compétences entre un homme et une femme, c'est la femme qui doit être choisie. Et les managers doivent expliquer pourquoi ils ont pris un homme plutôt qu'une femme. Une façon de lutter contre la discrimination inconsciente des managers hommes qui, par facilité, ont tendance à porter leur choix sur les hommes. Cette politique offensive a déjà porté ses fruits, puisque la part des femmes dans les grades d'ingénieur et administratifs de haut niveau est passée de 8,5 % à 11 % en deux ans.

Une fois recrutées, encore faut-il les retenir, notamment quand elles fondent une famille. L'Agence a, ainsi, créé des crèches et des systèmes de garde des enfants, avec des actions très différenciées selon les pays. Les efforts ont été particulièrement importants en Allemagne et en Italie, où les enfants ne vont pas à l'école l'après-midi. La conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle est aussi au coeur de la politique d'EADS : il existe une crèche au sein du site d'Airbus à Hambourg, des mesures d'aménagement du temps de travail spécifiques au personnel féminin ont été mises en place en France (disponibilité le mercredi, etc.). Dans le secteur Espace, il est possible d'emmener ses enfants le mercredi, une garderie étant organisée. Pour susciter des vocations, Airbus Allemagne a organisé un girl's day destiné à faire découvrir aux filles des salariés le métier de leurs parents. Cette journée sera prochainement élargie à Airbus France.

Le prochain comité des DRH de l'ensemble du groupe EADS planchera sur la synthèse des discussions qui ont eu lieu lors du salon du Bourget, afin de développer une politique RH plus adaptée et plus attractive pour les femmes. La prochaine action prévue est de recourir aux 100 femmes invitées comme ambassadrices des métiers de l'air et de l'espace auprès des étudiantes pour susciter des vocations.

1 Les entreprises de l'aéronautique voient avec inquiétude se profiler une pénurie de jeunes diplômés dans un avenir proche.

2 Ces entreprises se sont aperçues que les femmes représentaient un vivier important de vocations.

3 Pour les attirer, elles mettent en place, notamment, une politique spécifique de recrutement et aident à concilier vie professionnelle et vie privée.

Activité : organisation internationale chargée de promouvoir la coopération pour la recherche et les technologies spatiales en Europe.

Effectifs : 2 000 salariés, dont 24,8 % de femmes, répartis en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Italie ; 11 % de femmes dans les métiers de l'espace.

Activité : numéro deux mondial dans le domaine aéronautique, spatial et de défense. Regroupe les sociétés Airbus, Eurocopter, MBDA (2e missilier mondial), Astrium, etc.

Effectifs : 110 000 salariés, dont 15 000 femmes, répartis en France, en Allemagne, en Espagne et en Grande-Bretagne ; 16,5 % de femmes ingénieurs.