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Les Pratiques

Individualisation des rémunérations et principe d'égalité de traitement

Les Pratiques | L'AVIS DU JURISTE | publié le : 21.12.2004 | Alice Fages Juriste en droit social

Le Code du travail consacre le principe « à travail égal, salaire égal » mais, en pratique, il n'est pas respecté. Dans ce cas, il est très simple pour les salariés d'obtenir gain de cause devant les tribunaux, le régime de la preuve leur étant particulièrement favorable.

Tous les salariés placés dans une situation identique doivent bénéficier d'une égalité de rémunération : le principe est clair mais son application plus difficile. Quand deux salariés exercent le même travail, ont le même coefficient, mais non le même salaire, l'employeur devra justifier cette différence de salaire en rapportant des éléments objectifs. La charge de la preuve repose principalement sur l'employeur, la Cour de cassation ayant à plusieurs reprises indiqué qu'il suffit que le salarié invoquant une atteinte au principe d'égalité de rémunération soumette au juge des éléments de fait (comme les bulletins de paie, par exemple) ; il incombe alors à l'employeur de « rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence » (Cass. soc. 28 septembre 2004, n° 03-41.825). Aussi, au final, ce n'est pas au demandeur (le salarié) de prouver l'inégalité de traitement, c'est au défendeur (l'employeur) de prouver qu'elle n'existe pas.

Quels peuvent être les « éléments objectifs » invoqués à l'appui d'une individualisation des salaires ? Un panorama rapide de la jurisprudence révèle une grande sévérité du juge :

- l'employeur ne peut alléguer la différence d'ancienneté entre les salariés pour justifier cette situation, dans la mesure où une prime d'ancienneté est versée dans l'entreprise (Cass. soc. 29/10/1996, Ponsolle) ;

- il ne peut pas plus invoquer « la prétendue médiocre qualité du travail », critère non mesurable (Cass. soc. 26/11/2002, n° 00-41.633) ;

- et pas plus les diplômes ni l'expérience professionnelle, cela ne constituant pas des « éléments objectifs tenant à la différence de travail fourni » (Cass. soc. 9/12/2003, n° 01-43.039).

Il importe donc de justifier, notamment, la différence de travail fourni en se fondant sur des éléments objectifs, c'està-dire quantifiables. Il est aussi admis de se référer aux responsabilités exercées par les salariés (Cass. soc. 28/6/2000), mais on notera qu'il est rare que des salariés ayant des responsabilités différentes aient le même coefficient !

Autant dire qu'il est très difficile pour l'employeur de justifier une individualisation dans la rémunération de plusieurs salariés placés dans une situation identique au regard des fonctions et du classement : les éléments apportés doivent non seulement être professionnels, donc non subjectifs, mais encore mesurables.

Auteur

  • Alice Fages Juriste en droit social